dodis.ch/47626 Le Général H. Guisan au Chef du Département de Justice et Police, Ed. von Steiger1
Quartier Général de l’Armée, 13 octobre 1943
Au cours d’un entretien récent, j’ai eu l’honneur d’attirer votre attention sur les inconvénients qui résultent de l’accroissement régulier du nombre des réfugiés, militaires et civils, que nous avons à hospitaliser.
Le Commissariat fédéral à l’Internement annonce un effectif de 34000 internés. Le service territorial de l’Armée en compte dans ses camps environ 5500. Il faut ajouter à ce dernier chiffre les 7500 réfugiés des camps de travail. Ce sont donc déjà près de 50000 étrangers dont nous assumons la garde et l’entretien. Et ce nombre augmente journellement au rythme que vous savez.
Je suis d’ores et déjà obligé d’affecter à la garde des réfugiés, tant civils que militaires, la valeur d’un régiment. Les troupes ainsi employées ne peuvent faire de l’instruction; elles ne contribuent en rien à la sécurité militaire du pays; en cas de mobilisation de guerre, elles ne pourraient rejoindre immédiatement leur emplacement de combat.
D’autre part, je n’ai pas besoin d’insister sur le grave danger que représenterait, en cas de troubles, la présence sur notre territoire d’une telle quantité d’étrangers accessibles à toutes les excitations. Responsable du maintien de l’ordre dans le pays, le Commandant en Chef de l’Armée ne peut voir sans inquiétude leur nombre augmenter encore.
Aussi vous serais-je obligé d’étudier la possibilité de mesures nouvelles qui fermeraient plus hermétiquement notre frontière.