Classement thématique série 1848–1945:
2. RELATIONS BILATÈRALES
2.19 ROUMANIE
Printed in
Diplomatic Documents of Switzerland, vol. 14, doc. 196
volume linkBern 1997
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Archive | Swiss Federal Archives, Bern | |
▼ ▶ Archival classification | CH-BAR#E2001D#1000/1552#7362* | |
Old classification | CH-BAR E 2001(D)1000/1552 233 | |
Dossier title | Rumänisch-schweiz. Wirtschaftsverhandlungen (1941–1943) | |
File reference archive | C.21.21.1 • Additional component: Rumänien |
dodis.ch/47382
Le Ministre de Suisse à Bucarest, R. de Week, au Département politique1
M. Clodius poursuit ses négociations, si l’on peut employer ce terme pour désigner les exigences formulées par un suzerain parlant à ses vassaux.
Deux points de son programme sont aujourd’hui connus avec certitude:
1° il ne demande pas seulement pour son pays le monopole des produits pétroliers roumains, mais celui de toutes les marchandises exportées par le royaume danubien;
2° il parle au nom de toutes les puissances affiliées à l’Axe et réclame, en particulier, des contingents supplémentaires de carburants, de céréales, de viande, d’autres produits alimentaires pour l’Italie et la Croatie, dont l’approvisionnement, dans les circonstances actuelles, constitue, selon ses propres paroles, «un problème insoluble».
Il est inadmissible à ses yeux que la Roumanie alliée dispose librement d’une partie de sa production et la vende à des pays neutres comme la Suisse et la Suède envers lesquels les puissances du pacte tripartite n’ont aucune obligation. Toutes les marchandises roumaines exportables doivent donc être remises au Reich, qui les distribuera dans la mesure et d’après les normes imposées par les nécessités politiques et militaires du moment.
M. Clodius a insisté sur la situation alimentaire très grave de la Croatie. Un ministre croate, M. Toth, est accouru inopinément à la rescousse, sans même que la légation de son pays fût prévenue de son arrivée.
Les milieux roumains de la finance et de l’industrie s’efforcent de convaincre le gouvernement que l’acceptation des demandes allemandes équivaudrait à la perte totale d’une indépendance économique déjà très lourdement hypothéquée et qu’elle entraînerait des dommages immédiats et incalculables pour l’économie nationale, la situation financière et la monnaie.
Le gouvernement résiste de son mieux. Il reproche à l’Allemagne de ne pas livrer les produits sidérurgiques (fer et acier surtout) dont la Roumanie a besoin. M. Clodius propose d’établir l’ordre d’urgence dans lequel devront être exécutées les nombreuses commandes passées à l’industrie allemande.
Il réclame la création de ports francs au bénéfice de l’Allemagne.
Des discussions très âpres ont eu lieu sur ces divers thèmes samedi 23 jusque tard dans la nuit et dimanche 24. Le 25, lundi de Pentecôte, il y eut relâche.
Le mardi 26, pendant toute la journée, la Suisse fut sur la sellette. Le «négociateur» allemand «fit honte» à ses partenaires roumains des «complaisances» qu’ils ont pour elle. M. Marinesco rétorqua non sans vivacité qu’il préférait vendre à la Suisse, qui lui offre des contre-prestations, plutôt qu’à la Croatie, incapable de rien fournir d’utile. Il osa même affirmer que, pour certains articles indispensables à la Roumanie, notre industrie suppléait à la carence de celle du Reich.
Pour se rendre compte de ce que notre pays pourrait attendre d’un accord germano-roumain homologuant les demandes allemandes, il suffit de mentionner les quantités de carburants liquides livrées par l’Allemagne à la Croatie «alliée»: elles se réduisent, depuis le début de l’année, à 500 tonnes d’essence, 500 tonnes de pétrole et 500 tonnes de «gas oil». La résistance opposée à M. Clodius par le cabinet de Bucarest présente donc pour nous le plus grand intérêt: nous devons l’encourager de toutes nos forces.
Le négociateur allemand ne cesse de proposer aux Roumains l’exemple de la Hongrie. Celle-ci, à en croire M. Clodius, aurait promis au Reich tout son excédent de céréales et ferait même des prélèvements sur ses réserves. Les Allemands reconnaissent néanmoins que la situation alimentaire, dans le royaume de Saint Etienne, est très difficile, particulièrement en Russie subcarpathique et en Transylvanie. Au sujet de cette dernière province, les Roumains affirment que Budapest leur demande d’y envoyer du maïs. Ils voient dans cette requête la reconnaissance tacite d’une sorte de droit de regard sur la région cédée ou, tout au moins, sur le sort des populations roumaines.
De tout cela, on peut conclure que les Magyars préfèrent sacrifier à la «cause commune» leurs biens matériels et les Roumains leurs soldats. Les premiers n’envoient sur le front que 150000 hommes (surtout des minoritaires, dont beaucoup sont de race roumaine). Les seconds, en revanche, défendent les derniers restes de leur indépendance économique, mais paraissent disposés à prendre une part importante aux luttes qui se poursuivent sur le front russe. Leurs dirigeants prétendent ne pas vouloir tolérer que leur peuple soit réduit à la famine.
Pendant ce temps, la tension roumano-magyare s’accentue2.
- 1
- E 2001 (D) 2/233. Paraphe: RP.↩
- 2
- Ayant pris connaissance de ce rapport, la Division du Commerce du DFEP fait le commentaire suivant: Dieser Bericht enthält im Zusammenhang mit den gegenwärtig in Bukarest schwebenden Verhandlungen zwischen Deutschland und Rumänien Mitteilungen, die für uns von grossem Interesse sind hinsichtlich der Aufrechterhaltung unserer direkten Wirtschaftsbeziehungen zu Rumänien, für die wir uns gegenüber der deutschen Regierung immer mehr einsetzen müssen. Die Handelsabteilung steht in dieser für die Versorgung unseres Landes mit lebenswichtigen Produkten eminent wichtigen Frage auch in direktem Kontakt mit der Schweizerischen Gesandtschaft in Bukarest.↩
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