dodis.ch/46616
Le Représentant du Conseil fédéral à
Burgos, E. Broyé, au Chef de la Division des Affaires étrangères du Département politique,
P. Bonna1
San Sebastian, 9 août 1938
Pour faire suite à ma lettre No 9 du 19 Juillet cotée 0 14/112 à laquelle était jointe une liste de prisonniers de guerre suisses, détenus à Burgos, j’ai l’honneur de vous donner connaissance de l’extrait d’une lettre, reçue ce jour, de M. de Pourtalès, délégué du C.I.C.R. Ce dernier envisage la possibilité de la libération de ces citoyens suisses par la voie d’un acte du prince comportant leur manumission sur place, respectivement à la frontière française. Simultanément, un nombre égal de prisonniers étrangers (italiens) seraient libérés par les Gouvernementaux, d’où nécessité de négocier avec ceux-ci et avec l’Ambassade d’Italie.
Contrairement à ce que M. d’Ammann m’avait affirmé, M. de Pourtalès déclare que le C.I.C.R. est capable de réaliser et d’exécuter par ses seuls moyens cet échange sans l’intervention des Gouvernements, dont les prisonniers sont les protégés. Il n’en admet pas moins que, peut-être, la Confédération préférera mener elle-même les négociations nécessaires - ce en quoi il se trompe, je pense - et c’est pourquoi il m’écrit ce qui suit: «Le C.I.C.R. se chargera avec plaisir de la réalisation pratique de cet échange, comme il l’a déjà fait à plusieurs reprises dans le cas de prisonniers allemands ou italiens détenus à Barcelone contre des prisonniers russes incarcérés chez les Nationaux.
Les négociations préliminaires en vue de ces échanges ont été menées jusqu’ici par l’intermédiaire du C.I.C.R. et de ses délégués dans les deux Zones de l’Espagne. Toutefois, dans le cas particulier, le Gouvernement de la Confédération étant représenté aussi bien à Burgos qu’à Barcelone, il préférera peutêtre mener lui-même, par ses organes diplomatiques, les négociations en vue de l’établissement des listes de prisonniers à échanger quitte à charger le C.I.C.R. de la réalisation pratique de l’échange, c’est-à-dire de grouper les prisonniers et de les conduire aux frontières françaises de Hendaye et de Cerbère.»
En vous donnant connaissance de cette suggestion de M. de Pourtalès, je ne suppose pas que vous voudrez y donner suite, tant que cela ne paraîtra pas, le cas échéant, nécessaire ni même utile, c’est-à-dire tant qu’il n’aura pas luimême échoué dans des négociations qui s’annoncent longues et ardues et d’autant plus que ces prisonniers seront arrêtés et poursuivis en Suisse, bien qu’ils aient consenti par écrit à leur rapatriement. Vous m’obligeriez néanmoins en m’indiquant dans quel sens je dois répondre à la louable initiative du Délégué de la Croix Rouge de Genève.