Nous avons l’honneur de vous remettre ci-joint, en double exemplaire, le texte de la décision prise, le 14 mai, par le Conseil de la Société des Nations au sujet de la neutralité de la Confédération suisse dans le cadre de la Société2.
Ainsi que nous vous l’avons déjà indiqué, cette décision devrait être portée à la connaissance de l’Allemagne et de l’Italie par une démarche dont le succès serait complet si elle amenait les Gouvernements de nos deux grands voisins qui ont quitté la Société des Nations à nous faire connaître par écrit qu’ils ont pris note avec satisfaction de ce que nous avons fait et qu’ils continueront, comme ils l’ont toujours fait, à respecter la neutralité suisse.
Les conversations que nous avons eues à Berne avec les Ministres d’Allemagne et d’Italie nous font espérer que cet objectif pourra être atteint, mais nous indiquent aussi que certaines précautions sont à prendre. Il semblerait, en effet, que les deux Etats de P«axe» auraient peut-être quelque difficulté à enregistrer une décision du Conseil de la Société des Nations.
En conséquence, nous vous serions très obligés d’adresser à M. de Ribbentrop3 une lettre s’inspirant du projet ci-joint4 et de remettre vousmême cette lettre à l’Office5 des Affaires étrangères au cours d’une conversation qui vous fournira l’occasion d’y laisser, à titre de pure information, le texte même de la résolution du 14 mai et d’indiquer, de la façon que vous jugerez opportune, la satisfaction que nous éprouverions si votre note faisait l’objet d’une réponse approbative confirmant la volonté de l’Allemagne de respecter en tout temps notre neutralité et à pouvoir en faire état.
P.S.6 II ne nous a pas échappé que la presse allemande, tout en enregistrant en termes satisfaisants le succès que nous avons obtenu, remarque que toutes difficultés ne sont pas éliminées puisque la Société des Nations conserve son siège en Suisse et que la presse hostile à l’Allemagne exploitera cette institution. Nous n’avons pas besoin de souligner qu’il serait déplorable que des réserves à ce sujet fussent formulées officiellement. Mieux vaudrait que la notification dont nous vous chargeons plus haut restât sans réponse.
Au cas où, dans des conversations, les craintes exprimées par la presse allemande seraient abordées, il vous serait sans doute facile de les réfuter en faisant observer:
1° qu’elles sont assez théoriques, l’éventualité de voir la Société des Nations servir de base à une action contre d’autres Etats n’étant pas bien grande;
2° que nous serons, en temps de crise, en mesure de nous opposer à une action officielle de propagande;
3° qu’il convient de sérier les questions.