Lingua: tedesco
19.1.1934 (venerdì)
No 105. Fondations fascistes suisses à l’étranger
Verbale del Consiglio federale (PVCF)
Le Colonel suisse Fonjallaz à l’intention de créer un groupe fasciste à Milan, ce qui ne rencontre pas l’approbation du Conseil fédéral. Mais le Conseil fédéral juge inopportun d’entreprendre une démarche auprès du Gouvernement italien.

Également: Rapport du Consulat de Suisse à Milan sur la fondation d’un groupe fasciste suisse dans cette ville. Annexe de 30.1.1934
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Pubblicato in

Jean-Claude Favez et al. (ed.)

Documenti Diplomatici Svizzeri, vol. 11, doc. 3

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Bern 1989

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Collocazione

dodis.ch/45924
CONSEIL FÉDÉRAL
Procès-verbal de la séance du 19 janvier 19341

105. Fondations fascistes suisses à l’étranger

Verbal

M. le chef du département politique communique qu’il a été avisé il y a quelque temps par M. Wagnière2 de l’intention du colonel Arthur Fonjallaz3 et de l’avocat tessinois Rezzonico de créer un groupe fasciste suisse à Milan, sous la direction de M. Bühler, président de la chambre suisse du commerce. Il a donné pour instructions à M. Wagnière de faire une démarche pressante auprès de ce dernier pour le prier de renoncer à ce projet. Mais cette intervention n’a eu aucun résultat, puisque les journaux annoncent la constitution, sous la présidence de M. Bühler, d’un groupe fasciste suisse de la Haute-Italie, comprenant la Lombardie, le Piémont et la Ligurie4.

Cette création est infiniment regrettable. Il est à craindre, en effet, d’abord qu’elle ne soit un élément de division pour la colonie suisse, en outre que les autorités italiennes ne traitent plus favorablement des Suisses affiliés au groupe fasciste que les autres. Sans doute, le fascisme italien ne devait-il pas être, à l’origine, un objet d’exportation, mais depuis quelques années les avis se sont modifiés à cet égard, et le fascisme prétend aujourd’hui marcher à la conquête de l’Europe et du monde. Nous avons donc des raisons sérieuses pour entraver par tous les moyens le développement du fascisme suisse en Italie. Mais ces moyens ne sont malheureusement pas nombreux.

On peut se demander si nous ne devrions pas en appeler au gouvernement italien. A vrai dire, il serait singulier de devoir recourir aux bons offices d’un gouvernement étranger pour rappeler à la raison des Suisses qui n’ont pas voulu suivre nos conseils. Mais même au cas où l’on passerait outre à cette considération, il reste à savoir si une telle démarche aurait une utilité quelconque, si le gouvernement italien serait disposé à prendre des mesures qui iraient directement à rencontre de l’idée fasciste. On doit en douter. Et il faut ajouter qu’après avoir laissé se fonder à Milan et ailleurs des sociétés politiques suisses, nous serions mal venus de demander des mesures contre une association politique dont les buts se rapprochent précisément beaucoup de ceux du gouvernement italien.

M. Motta a néanmoins prié M. Wagnière de sonder l’opinion gouvernementale à Rome5. Il demande aujourd’hui au conseil d’approuver les mesures prises et d’inviter le département à poursuivre son activité dans la même direction.

M. le chef du département de justice et police fait observer que l’affaire intéresse également nos colonies en Allemagne, où il s’est formé des groupes nationauxsocialistes suisses6. Ces formations présentent, outre le danger signalé par le chef du département politique, celui d’encourager les naturalisations et de favoriser ainsi un mouvement très actif tant en Allemagne qu’en Italie. Il est difficile d’assister passivement à ces formations. Mais les voies à suivre pour les entraver ne sont pas nombreuses. L’appel de M. Wagnière n’ayant pas été entendu, nous devons renoncer à agir par la persuasion à l’égard de nos nationaux. Il ne saurait être question non plus pour le Conseil fédéral de traiter différemment ceux qui sont entrés dans des groupements fascistes. Le seul moyen à notre disposition est donc, quelques inconvénients qu’il présente, de s’adresser au gouvernement italien. Il ne doit pas être impossible de le convaincre qu’il n’a pas lui-même d’intérêt à favoriser des groupements dont le développement sera déterminé beaucoup moins par des convictions que par des intérêts. Nous pouvons, d’autre part, donner l’assurance aux gouvernements étrangers que nous ne permettrions pas à leurs nationaux de former sur notre territoire des groupements qui se rattacheraient à la politique suisse. L’entreprise vaut en tout cas la peine d’être tentée, et plus tôt nous agirons, plus efficace sera notre intervention, car si nous laissons se développer le mouvement actuel il nous sera impossible ensuite d’en devenir maître.

Il ressort de la discussion que tous les autres membres déconseillent actuellement une démarche auprès du gouvernement italien et comptent plutôt sur l’opinion publique suisse pour arrêter le mouvement. En conséquence, M. le président constate:

1° que le conseil est unanime à désapprouver la formation, dans nos colonies, de groupes qui transportent des conflits politiques sur territoire étranger;

2° qu’il est également unanime à approuver les mesures prises jusqu’ici par le département politique en Italie;

3° que dans sa majorité il n’estime pas le moment venu de faire une démarche auprès du gouvernement italien, la situation devant être éclaircie d’abord par les sondages de M. Wagnière.

1
E 1004 1/344. Absent: Pilet-Golaz.
2
Par lettre du 8 janvier (E 2001 (C) 4/103).
3
Cf. DDS vol. 10, nos 343, dodis.ch/45885 et 344dodis.ch/45886 + A. Sur la personnalité du colonel A. Fonjallaz, cf. aussi la notice du DP F, non signée, datée du 1er mars, envoy ée le 2 mars par M. de Stoutz au ministre Wagnière: Le Colonel Arthur Fonjallaz est né en 1875 dans un asile d’aliénés, où sa mère, atteinte d’aliénation mentale, était internée. Il a débuté dans la carrière militaire avant d’avoir atteint sa majorité comme élève d’une école préparatoire d’officiers à Turin. Les circonstances dans lesquelles il a été admis dans cette école n’ont pu être déterminées. Il s’y trouvait au moment où il a été appelé à faire son école de recrue en Suisse. Le Colonel Fonjallaz est entré dans le service d’instruction en 1900 et y est resté jusqu’en 1921. Officier d’état-major de la brigade 3 en 1914, il s’est débarrassé de son chef en lui faisant signer un rapport accablant pour lui. Cet acte a été, à l’époque, assez sévèrement jugé, mais n’a pas empêché Fonjallaz de recevoir le commandement d’un régiment, puis, en 1921, d’une brigade. Le Colonel Fonjallaz a pris sa retraite comme officier actif en 1923. Il semble s’être alors consacré à des affaires, notamment en Turquie, où il a dû perdre une part considérable de sa fortune personnelle. Rentré à Cully, où il possède une propriété magnifique, le Colonel Fonjallaz a cherché à se pousser dans la politique et a financé de ses deniers la création d’un parti agrarien vaudois, qu’il a quitté avec fracas lorsqu’il a vu qu’il n’arrivait pas à se faire élire député au Conseil national. Madame Fonjallaz, née Geiser, a hérité en 1919 d’un oncle établi en Amérique du Sud une fortune de plusieurs millions, dont il doit certainement rester quelque chose aujourd’hui. Néanmoins, il y a quelques années, soit que sa femme lui ait coupé les vivres, soit que les revenus de cette fortune sud-américaine aient baissé, le Colonel Fonjallaz avait demandé au Département militaire de lui procurer du travail. Il fut ainsi chargé, à partir de 1931 sauf erreur, d’un cours d’histoire militaire à l’Ecole polytechnique fédérale. Le Colonel Fonjallaz a donné sa démission de chargé de cours à l’Ecole polytechnique en novembre 1933 et a été relevé de toute obligation militaire. Au Département militaire, le Colonel Fonjallaz est jugé comme un officier extrêmement capable, d’une intelligence au-dessus de la moyenne, mais d’une instabilité de caractère qui le rendait d’un commerce peu sûr et permet de le considérer, à certains égards, comme un névrosé. Il est considéré comme un homme à lubies, désireux de jouer un rôle à n’importe quel prix. (E 2200 Rom 22/1).
4
Cf. annexe au présent document.
5
Par lettre du 18 janvier (E 2001 (C) 4/103).
6
Cf. no 4.