dodis.ch/45909 Le Ministre de Suisse à Rome, G. Wagnière, au Chef du Département politique, G. Motta1

De Reynold2, dans l’entretien qu’il a eu hier avec le Duce et dont je vous parle dans ma lettre de ce jour3, a eu l’impression qu’il se préoccupait beaucoup de l’état intérieur de la Suisse. C’est une des raisons sans doute pour lesquelles Rleynoldj a été convoqué sans avoir demandé d’audience. Il est vrai qu’en arrivant à Rome pour la séance de l’Institut de cinématographie il avait prié De Feo4 de faire savoir au Duce «qu’il était là»!

MJussoliniJ a été évidemment alarmé par les récentes élections à Genève et Lausanne5. Il s’intéresse beaucoup à la Suisse par amitié et aussi pour les conséquences que peut avoir pour l’Italie une Suisse socialiste ou hitlérienne, ce qu’il redoute également. Il n’a pas dit cela en ces termes mais cela résulte de ses propos. Il paraît craindre beaucoup pour notre pays une sorte de désagrégation qui ne ferait que commencer et dont il voit les symptômes dans les mouvements divers qui se forment en Suisse et dans les progrès d’un socialisme anti-patriote et anti-national. Je le répète, il n’aura pas dit cela dans ces termes; ce sont les impressions que Rleynoldj (qui saisit les choses au vol) a emporté de sa conversation. Il a aussi le sentiment que MJussoliniJ ne demanderait pas mieux que de s’entendre avec vous au sujet de la S.d.N.6 et je me permets de former le vœu que vous trouviez le moyen de revenir, pour une raison ou pour une autre, à Rome avant longtemps7; je suis convaincu que cela serait très utile à beaucoup d’égards, pour le bien de la Ligue et pour le nôtre aussi. Je vous prie de faire usage strictement confidentiel de ce qui précède: le nom de Rleynold\ ne devrait pas être prononcé.

Je suis extrêmement attristé par les événements de Genève: le drapeau suisse bafoué par le parti au pouvoir, un régime de haine sociale et d’hostilité à la patrie et à toutes nos traditions installé pour longtemps et cela après un siècle de démocratie, de progrès, de paix, de culture générale! Quelle tristesse.