Printed in
Diplomatic Documents of Switzerland, vol. 10, doc. 251
volume linkBern 1982
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Archive | Swiss Federal Archives, Bern | |
▼ ▶ Archival classification | CH-BAR#E2001C#1000/1533#2344* | |
Old classification | CH-BAR E 2001(C)1000/1533 99 | |
Dossier title | Affaire Firstermacher Alberto (1932–1933) | |
File reference archive | B.46.12.2 • Additional component: Italien |
dodis.ch/45793
J’ai l’honneur de vous confirmer mon télégramme no 102 faisant suite à ma lettre de 13 mars3 concernant l’affaire d’espionnage politique4 sur notre territoire.
Je commencerai par rectifier une malheureuse erreur de copie qui s’est produite dans ma lettre du 10 mars5, dans laquelle je vous rapportais mon entretien avec M. Suvich. Dans la déclaration qu’il m’a remise en italien, sous chiffre 4 il faut lire: «il fermo atteggiamento tenuto dalle autorità federali», et non pas «italiane»6. Cette lettre a été écrite très rapidement, de façon à pouvoir être remise à une personne qui partait pour la Suisse. C’est la cause de cette regrettable erreur, que je vous prie d’excuser, et que j’ai déjà rectifiée hier par téléphone.
J’ai donc été reçu hier par le Chef du Gouvernement. J’ai commencé par le remercier de m’avoir accordé cette audience si rapidement, alors qu’il est assailli de visites importantes ces jours-ci: le ministre des Affaires Etrangères de Hongrie7 qui, à peine nommé, s’est empressé de venir lui apporter ses hommages, et aujourd’hui MM. Mac Donald et Simon, qui arrivent en aéroplane pour de si graves conversations8.
J’ai reconnu que les déclarations qui m’avaient été faites par M. Suvich sur la question de l’espionnage politique au Tessin étaient certainement inspirées de sentiments de correction et d’amitié, mais ce qui m’avait péniblement impressionné, c’était le rapport de la direction de police dont M. Suvich m’avait donné lecture, et qui niait tout simplement tous les faits que nous avions allégués, et dont nous étions absolument certains9. M. Mussolini m’a interrompu en me disant que ce rapport était fait pour lui et non pas pour nous, et il n’a émis aucun doute sur la véracité des faits que je lui ai énumérés de nouveau afin de lui expliquer la profonde émotion de notre opinion publique et les raions pour lesquelles mon Gouvernement m’avait engagé, malgré les déclarations de M. Suvich, à faire une démarche personnelle auprès du Chef du Gouvernement italien. Je lui ai donné lecture brièvement de quelques passages de la lettre que vous m’aviez adressée10, en lui exprimant le vœu de recevoir de lui quelque déclaration plus satisfaisante.
C’est alors que, sans aucune hésitation, il a prononcé les paroles dont j’ai pris note par écrit sous ses yeux, et que je vous ai immédiatement télégraphiées. Je les reproduis ici dans leur texte italien:
«Ritengo ehe la libertà interna délia Confederazione svizzera deve essere rispettata al sommo grado, ehe l’Italia è in quest’ordine d’idee, e ehe è proposito del Governo fascista di evitare d’ora innanzi con maggiore attenzione tutto quello ehe puô turbare l’atmosfera cordiale ehe deve esistere fra i due paesi». Si vous publiez cette déclaration, peut-être serait-il indiqué de supprimer les paroles «d’ora innanzi» «dorénavant». Ceci pour des raisons de convenance. Du reste, je pense qu’il vaut encore mieux en donner lecture ou simplement en donner le sens en réponse aux interpellations parlementaires, sans en faire l’objet d’un communiqué à la presse. C’est un avis que je me permets d’exprimer.
J’ai alors pris congé, avec mes remerciements. Notre entretien a duré 30 minutes.
Le Duce m*a encore demandé si l’affluence des communistes allemands en Suisse ne nous causait pas quelques préoccupations. Il venait d’être informé de l’arrivée à Zurich de deux camions chargés de caisses (sauf erreur une vingtaine) contenant des documents et archives du parti. Il m’a encore demandé si nous avions beaucoup de juifs en Suisse. Je lui ai répondu qu’ils ne jouaient chez nous aucun rôle dans la vie publique.
Il s’est encore enquis de l’attitude de nos troupes dans des cas de troubles révolutionnaires, suivant les diverses régions, cantons, religions de la Confédération. Comme vous voyez, cette question de l’ordre intérieur en Suisse ne cesse d’intéresser particulièrement le Chef du Gouvernement italien.
P. S. Par principe je redoute les communiqués à la presse, qui nous ont souvent causé des embarras lorsqu’il s’agit d’affaires délicates11.
- 1
- Lettre: E 2001 (C) 3/99. Remarque manuscrite de Motta: On ne fera pas de communiqué à la presse. L’affaire sera traitée, au moment opportun, devant l’Assemblée fédérale. 20. 3.33.↩
- 2
- Du 17 mars. Non reproduit.↩
- 3
- Non reproduit.↩
- 4
- Cf. no 204.↩
- 5
- Non reproduit.↩
- 6
- Cf. no 246, n.5.↩
- 7
- K. De Kanya.↩
- 8
- Le Chef du gouvernement britannique et son Ministre des Affaires étrangères arrivent à Rome pour discuter le projet mussolinien de Pacte à Quatre.↩
- 9
- Cf. no 246.↩
- 10
- Cf. no 247.↩
- 11
-
Dans la séance du Conseil fédéral du 20 mars suivant, Motta donne communication de la déclaration de Mussolini. Cf. PVCF du 20 mars 1933: [...]
Le Conseil, conformément aux propositions du Chef du Dépt. politique, estime que cette déclaration de M. Mussolini est de nature à nous donner satisfaction. L’incident serait donc maintenant clos. Il n’y a cependant pas lieu de publier les paroles du Chef du Gouvernement italien dans les journaux. Par contre, il en sera donné connaissance au parlement lorsque le Conseil fédéral devra répondre aux interpellations sur les dernières affaires du Tessin. Mais il va sans dire que les mots «d’ora innanzi», qui revêtent une importance capitale, ne sauraient être escamotés (E 1004 1/339). Cf. aussi la lettre de Motta à Wagniére du 21 mars 1933 (E 2001 (C) 3/99).
↩
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