Classement thématique série 1848–1945:
II. RELATIONS BILATÉRALES
10. Ethiopie
10.1. Traité d’amitié et de commerce
Imprimé dans
Documents Diplomatiques Suisses, vol. 10, doc. 79
volume linkBern 1982
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Archives | Archives fédérales suisses, Berne | |
▼ ▶ Cote d'archives | CH-BAR#E2001C#1000/1533#301* | |
Ancienne cote | CH-BAR E 2001(C)1000/1533 14 | |
Titre du dossier | Handelsvertrag mit Abessinien (1905–1935) | |
Référence archives | B.14.2.1 • Composant complémentaire: Aethiopien |
dodis.ch/45621
Dès mon retour du Maroc, je m’étais enquis si mon collègue de Grèce2 était rentré de son voyage en Ethiopie; c’était le cas; M. Politis est également commissaire général de la section hellénique à l’Exposition coloniale internationale qui s’est ouverte avant-hier, ce qui lui a valu une lourde besogne ces derniers jours; il n’a donc pu me recevoir qu’hier soir et je lui ai demandé quelles sont les impressions qu’il a rapportées d’Addis-Abeba.
Tout d’abord, M. Politis m’a exprimé son regret de n’avoir pu voir M. Jenny3 à Athènes, où son séjour fut de courte durée...
En ce qui concerne l’exercice de la justice à l’égard des étrangers, il est confié en Abyssinie à des tribunaux mixtes qui sont composés d’un juge indigène et du Consul dont l’étranger dépend; en première instance, on tâche de s’arranger tant bien que mal; si l’une des parties désire néanmoins aller en appel, c’est le Tribunal de l’Empereur qui est compétent; or, le souverain actuel a l’habitude de s’occuper de tout, même des procès; mais comme il n’a réellement pas le temps d’étudier des dossiers judiciaires, il a confié ce soin à des conseillers plus ou moins éclairés, lesquels proposent tel ou tel arrêt. C’est encore bien sommaire. M. Politis s’en est entretenu avec l’Empereur et lui a suggéré de faire venir d’Europe trois jurisconsultes pour organiser la justice; comme l’Abyssinie fait partie de la Société des Nations, celle-ci pourrait être saisie d’une demande de désignation de ces 3 juristes, qui seraient choisis de préférence parmi des Etats comme la Hollande, la Suisse ou les pays Scandinaves, parce qu’en Ethiopie on a des raisons de se méfier de l’Italie, de la Grande-Bretagne et de la France.
L’Empereur a beaucoup de sympathie pour notre pays où il possède une villa (Vevey); il désirerait introduire le Code civil suisse, mais M. Politis lui a fait remarquer que cela ne pourrait se réaliser sans de profondes modifications, qui devront être apportées par suite de la différence très grande entre les coutumes des deux pays et leur degré de civilisation.
M. Politis a entrevu notre compatriote Auberson4, qui semble jouer un rôle assez effacé; il étudie des dossiers et lorsqu’il donne raison à l’administration abyssine, on est satisfait, tandis qu’on l’eng.... (sic) s’il a le courage et l’indépendance d’esprit de lui donner tort.
Addis-Abeba est relié à la Mer Rouge (port français de Djibouti) par une ligne de chemin de fer de près de 800 kilomètres; cette ligne est divisée en trois sections parcourues chacune en un jour; il n’y a pas de trains de nuit. Ce chemin de fer, construit par une compagnie française, ne sera pas prolongé. Par contre, des routes seront prochainement entreprises vers la frontière du Soudan (200 kilomètres) pour l’exploitation de services automobiles; il y aurait là quelque chose à surveiller pour des techniciens suisses; sur le territoire du Soudan et jusqu’à Kartoum, la route existe déjà.
Le système monétaire est primitif et n’est pas encore légalement établi: c’est toujours le Thaler de Marie-Thérèse qui est la monnaie courante; n’importe quel monsieur ayant un lingot d’argent pourrait faire frapper à Vienne de ces Thaler et les envoyer en Ethiopie.
Une seule Banque, d’origine anglaise, fonctionne; mais le Souverain, hanté par le désir d’avoir sa banque à lui, une banque d’Etat, est en train de racheter cet établissement britannique; toutefois personne ne sait par qui elle sera dirigée et comment les services en seront assurés, car il n’y a, en Ethiopie, personne qui ait une formation de comptable; M. Politis a attiré l’attention de l’Empereur sur les inconvénients sérieux devant lesquels.il ne tardera pas à se trouver dans ce domaine.
Les 200000 prêtres koptes sont fort peu recommandables; parmi eux il en est beaucoup qui n’ont aucune instruction, mais, par contre, un passé douteux; il suffit de se faire plus ou moins sacrer par un autre prêtre, et le tour est joué; c’est là une cause de tristesse pour l’Empereur, lequel veut s’efforcer de créer plusieurs diocèses réguliers qui dépendraient d’un archevêque; mais, avant tout, il y a lieu de réprimer les déplorables abus actuels.
Le commerce international se développe assez lentement; il serait toutefois opportun de ne pas perdre de vue cette question; n’avons-nous aucun observateur qui pourrait ouvrir l’œil?
L’Empereur a quelques milliers d’hommes qui servent beaucoup plus à un service de gendarmes qu’à des buts militaires; ils disposent de 3-4 avions et d’une dizaine de mitrailleuses; les instructeurs sont belges; parfois une petite expédition de réprimande est nécessaire contre des dissidents.
M. Politis ne croit pas que ce serait prudent de s’intéresser dès maintenant à des affaires financières; le pays n’est pas encore suffisamment dirigé vers une évolution de progrès et de développement; mais il faut que les petits pays surveillent ce développement afin d’intervenir en temps voulu, car ils jouiront certainement d’un accueil plus favorable que les grandes Puissances (voir plus haut).
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