Londres, 17 décembre 1925
Pour faire suite à ma lettre du 2 décembre2, j’ai l’honneur de porter à votre connaissance que ce n’est qu’aujourd’hui qu’il m’a été possible de rencontrer le Membre du Parlement qui avait interpellé le Foreign Office, le 25 Novembre dernier, sur les négociations officieuses entre la Suisse et la Grande-Bretagne au sujet de la conclusion d’un traité d’arbitrage.
Mr. Rennie Smith est un Membre du Parti ouvrier et appartient à une certaine fraction qui s’intéresse spécialement à la politique étrangère. Il m’a dit que la question posée par lui et m’intéressant spécialement, n’avait eu que le but de rappeler au Gouvernement l’utilité de la politique arbitrale en général. Selon Mr. Smith et ses amis du Parti ouvrier, l’objection du Gouvernement Conservateur à la conclusion de traités d’arbitrage est regrettable; il y a donc lieu de provoquer, le plus possible, des discussions à la Chambre des Communes, qu’elles soient brèves ou entrant plus avant dans la matière. Les pourparlers entamés dans le temps entre cette Légation et le Foreign Office au sujet du traité anglo-suisse, lui ont paru fournir un prétexte plausible. Il n’a pas eu d’autres raisons pour son interpellation.
Lui et ses camarades comptent revenir à la charge dès après la reprise des séances en février prochain. Il a offert ses services dans le cas où il pourrait m’être utile en exerçant quelque chose comme une pression sur son Gouvernement. J’ai, pour des raisons évidentes, répondu très évasivement et j’ai suggéré qu’il me paraîtrait, au contraire, habile, en cas de recharge, de ne pas citer la Suisse individuellement, mais de donner à la question une forme générale.
Ainsi que vous l’avez appris par la presse, l’Espagne a fait certaines propositions, dans ce même ordre d’idées, au Gouvernement britannique. Il paraîtrait qu’à Genève M. Quinones aurait parlé à Mr. Chamberlain directement. J’éprouve quelque difficulté à me faire une idée du programme pris en considération par l’Espagne; on parle tantôt d’un traité d’arbitrage, tantôt d’un «Locarno ibérique». Ce seraient deux choses assez différentes; mais l’expérience nous apprend que souvent la diplomatie espagnole n’est pas entièrement libre de confusions et que souvent elle prend un élan dans une direction sans s’occuper à fond des possibilités de réalisation. L’Espagne, et surtout ses Ambassadeurs, sont occasionnellement sujets à l’idée fixe que cette Monarchie est encore une grande Puissance et qu’elle doit de temps en temps manifester comme telle. Au Foreign Office, on accorde presque toujours à de pareilles impulsions un accueil peu empressé et, selon moi, ces négociations subiront le même sort. I...]