dodis.ch/45042 Der schweizerische Gesandte in
Paris,
A. Dunant, an den Vorsteher des Politischen Departementes,
G. Motta1
En possession de votre lettre du 13 courant2, je suis allé au Quai d’Orsay voir M. Clinchant, Sous-Directeur d’Asie, pour lui exposer, à titre confidentiel et officieux, nos tribulations en Chine; mon interlocuteur, très intéressé par mon récit, a fait venir un de ses principaux collaborateurs, M. Léger, qui a passé plus de 5 ans à Pékin et est, au Ministère, le spécialiste des questions chinoises.
M. Léger connait notre Traité et est plein d’admiration pour l’habileté avec laquelle la Suisse a su manœuvrer; après nous, plus personne n’a pu obtenir les mêmes avantages, parce que le Traité de Versailles est entré en vigueur et cela a complètement modifié la situation pour la Chine, qui était du nombre des Puissances victorieuses. Vainement la Roumanie, la Pologne, la Tchéco-Slovaquie et la Serbie ont tenté de marcher sur les brisées de la Suisse. La Chine n’admet plus que d’autres pays jouissent d’immunités de juridiction, et malgré tout le désir qu’aurait le Gouvernement français de nous être agréable, il se heurterait à cette décision unilatérale du Gouvernement chinois. M. Léger a été tout-à-fait catégorique: la France peut prêter ses bons offices pour rendre tel ou tel service à Pékin, mais elle ne saurait, comme naguère, prendre sous sa protection complète (y compris la juridiction) des ressortissants étrangers.
Par contre, M. Léger estime que notre traité est «inattaquable et doit être défendu âprement»; au surplus, la ratification parlementaire chinoise était-elle réellement nécessaire, au bout de 4 ans, et alors que le traité est entré en vigueur à une époque où le parlement de Pékin était dissous? A première vue, M. Léger tranche cette question par la négative, mais il désire encore l’étudier plus à fond et se réserve une communication ultérieure à cet égard.
En résumé, rien à faire, dans l’état actuel de la situation de politique intérieure en Chine, pour mettre ses nationaux sous la protection d’une tierce puissance. Par contre, conseil très positif de tenir bon, notre position étant excellente; au besoin, aller à l’arbitrage où, d’après l’opinion de M. Léger, nous gagnerions sans l’ombre d’hésitation.