Printed in
Diplomatic Documents of Switzerland, vol. 8, doc. 335
volume linkBern 1988
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| Archive | Swiss Federal Archives, Bern | |
▼ ▶ Archival classification | CH-BAR#E2001B#1000/1505#457* | |
| Old classification | CH-BAR E 2001(B)1000/1505 18 | |
| Dossier title | Incident: frontière Ponte Tresa et Varese (1924–1924) | |
| File reference archive | B.46 • Additional component: Italien |
dodis.ch/44977 Le Ministre de Suisse à Rome, G. Wagnière, au Chef du Département politique, G. Motta1
J’ai l’honneur d’accuser réception de votre télégramme No 72 et vous confirme celui que je vous ai envoyé hier soir No 12.3
M. Mussolini m’avait fixé son rendez-vous pour hier, mercredi, à 17 heures. Mardi soir, j’ai déjà eu l’occasion de le rencontrer à la Légation de Siam où je dois dire que je m’étais rendu tout exprès. Il m’a le premier adressé la parole en ces termes:
«Je vous attends demain au Palais Chigi, mais je pense bien que vous ne venez pas pour me parler de cette affaire de Ponte Tresa4; je n’y attache aucune importance.» Je lui ai répondu que j’étais heureux de l’entendre, vu que la presse me paraissait avoir grossi considérablement cet incident avec de très fâcheux commentaires. Il m’a répondu d’un ton ironique: «que voulez-vous c’est la liberté de la presse». Il était, du reste, d’une humeur charmante.
Hier, mercredi, il m’a immédiatement reçu et m’a retenu plus d’une demiheure dans son bureau. Il a commencé par me répéter ce qu’il avait dit la veille. Je lui ai fait remarquer que les termes de «vives protestations» dont s’était servi le Ministre d’Italie à Berne montraient cependant que le Gouvernement Royal attachait une certaine importance à ces faits. Le Ministre [Président a paru surpris que l’on se soit servi de ces termes, ce qui me ferait croire que les instructions à M. Garbasso n’émanaient pas directement de lui. Il s’est encore élevé contre les exagérations de la presse et s’est montré très surpris qu’un journal aussi sérieux que les «Basler Nachrichten» ait publié une édition extraordinaire à ce propos.
Je lui ai objecté que les faits de Varese et l’agitation à Ponte Tresa justifiaient, en quelque sorte, certaines alarmes. Il m’a répondu qu’il allait encore télégraphier au Préfet de Côme de prendre, à la frontière, toutes les mesures afin d’empêcher tout acte de représailles.
J’ai saisi l’occasion pour lui dire alors tout ce que j’avais sur le cœur. En lui rappelant les déclarations si amicales qu’il m’avait faites lors de sa venue au pouvoir5 suivant lesquelles il ne devait y avoir aucune question territoriale entre la Suisse et l’Italie qui devaient vivre ensemble dans les termes d’une absolue cordialité, je lui ai fait remarquer combien certains éléments fascistes, près de notre frontière, étaient peu pénétrés de ces idées: aussi longtemps que le Chef du Gouvernement n’aura pas imposé sa manière de voir à ces milieux turbulents, les alarmes, de notre côté, seront justifiées et des incidents surgiront.
«J’agirai dans ce sens», m’a-t-il dit d’un ton résolu.
Au sujet de l’attitude de quelques soldats tessinois, j’ai cru devoir, au cours de la conversation, lui rappeler l’indigne brochure publiée en Italie et gravement offensante pour l’honneur d’une armée, qui en défendant sa frontière nationale pendant quatre ans, a rempli aussi tout son devoir vis-à-vis de ses voisins.
Le Président m’a demandé, à ce propos, des précisions que je lui ai fournies au sujet d’une brochure qu’il n’avait pas lue, mais qu’il connaissait parfaitement. Il a même fait venir un rapport qu’il avait reçu de Lugano du nommé Ferrata et il me l’a lu tout entier. Ce rapport, conçu dans un excellent esprit, ne craint pas de dire que l’action de ces giovani Ticinesi fait le plus grand tort aux Italiens résidant dans le Tessin.
Le Président m’a parlé ensuite de la situation intérieure au Tessin. Il s’est exprimé avec les précautions voulues. Je me réserve de vous rapporter ses propos de vive voix après-demain matin. Il m’a encore chargé très amicalement de vous présenter ses salutations.
En sortant de son cabinet, j’ai vu encore le Sénateur Contarini auquel j’ai cru devoir répéter ce que j’avais dit au Président au sujet des «vives protestations». Cette démarche me paraissait contraster avec toute l’attitude du Gouvernement Royal, d’autant plus que les faits de Ponte Tresa n’avaient pas encore été clairement établis. M. Contarini m’a fait entendre que les instructions envoyées à Berne étaient parties du cabinet du Ministre sur une première émotion qui paraissait, depuis lors, s’être calmée.
- 1
- Lettre: E 2001 (B) 5/18.↩
- 2
- Extrait de ce télégramme du 16 avril: Déclarez que Conseil fédéral n’omettra rien pour maintenir excellentes relations entre deux Gouvernements et pays. Population Ponte Tresa semble toujours préoccupée à cause possibilité incursions fascistes. Lorsque incident sera liquidé, il conviendra que deux Gouvernements s’expliquent très amicalement sur causes profondes des incidents regrettables de ces derniers mois (E 2001 (B) 5/18).↩
- 3
- Non reproduit.↩
- 4
- Cf. ri' 333.↩
- 5
- Cf. no 231.↩
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Italy (Others)
Press incidents and polemics in Ticino (1921–1924)


