Classement thématique série 1848–1945:
I. LA SUISSE ET LA SOCIÉTÉ DES NATIONS
I.7. Les bureaux et offices internationaux
Également: Intervention de Motta devant le Conseil de la SdN au sujet de la responsabilité particulière de la Suisse à l’égard des bureaux ou offices internationaux dont le siège est en Suisse. Nécessité de clarifier les relations entre ces bureaux et la SdN. Annexe de 29.9.1923
Pubblicato in
Documenti Diplomatici Svizzeri, vol. 8, doc. 295
volume linkBern 1988
Dettagli… |▼▶Collocazione
Archivio | Archivio federale svizzero, Berna | |
Segnatura | CH-BAR#E2001B#1000/1508#167* | |
Titolo dossier | Régime international des voies ferrées (1923–1923) | |
Riferimento archivio | B.56.41.08.6 |
dodis.ch/44937
Le Directeur de l’Office central des transports internationaux par chemins de fer, H. Dinkelmann, au Chef du Département politique, G. Motta1
Nous avons l’honneur de vous accuser réception de votre lettre B.56/41/8/8 -FS. du 23 octobre2 par laquelle vous nous faites part de votre satisfaction d’apprendre que notre Office sera représenté à la 2me Conférence générale des communications et du transit de la Société des Nations, qui se réunira à Genève le 15 courant.
Depuis quelques jours nous avons reçu les documents préparatoires de cette Conférence. Après les avoir examinés, nous croyons qu’il est de notre devoir d’attirer votre attention sur le point suivant:
Le «Document préparatoire I (Voies ferrées)» daté de Genève, juin 1923, renferme, aux pages 15 et suivantes, un «Projet de convention et de statut sur le régime international des voies ferrées». La première partie (projet de convention) ne nous suggère pas d’observation spéciale. En revanche, la deuxième partie (Projet de statut, pages 17 et suivantes) renferme un article 42, dont la teneur est la suivante:
Art. 42
«Sans préjudice des dispositions de l’article 24 du pacte, tous offices ou bureaux internationaux qui auraient été ou qui seraient créés par conventions internationales, en vue de faciliter le règlement entre Etats de questions relatives au transport par voie ferrée, seront considérés comme placés sous les auspices de la Société des Nations, échangeront directement avec les organes compétents de la Société tous renseignements utiles concernant l’exercice de leurs missions et adresseront à la Société un rapport annuel.
«Il est toutefois bien entendu qu’il n’est, par le présent article, porté aucune modification et aucune atteinte à l’organisation intérieure des dits offices ou bureaux, telle qu’elle peut être fixée par les conventions internationales qui les instituent, non plus qu’aux missions et prérogatives qui pourraient être confiées, par ces conventions internationales, à un gouvernement particulier quelconque, ces missions ou prérogatives étant seulement considérées dans ce cas comme exercées sous les auspices de la Société.»
Le Rapport (lettre A du document précité) s’exprime comme suit au sujet de cet article 42:
«L’article 42 traite, conformément au principe de la recommandation 6 de Barcelone sur le régime international des voies ferrées, de la question des relations entre la Société des Nations et les offices ou bureaux internationaux qui auraient été ou seraient crées par convention internationale en vue de faciliter le règlement entre Etats de questions relatives au transport par voies ferrées.
«Le texte proposé marque nettement le désir de ne porter aucune atteinte au fonctionnement de ces bureaux et offices tel qu’il est réglé par les conventions qui les instituent. Mais il a paru indispensable, de même que des relations précises étaient essentielles pour le développement du droit international des transports entre la Convention générale et les conventions particulières d’application, que des relations semblables soient instituées entre ces offices et l’organisation même de la Société des Nations, relations extrêmement souples correspondant à une unité d’inspiration et un contact dans le travail. De tels offices seraient considérés comme placés sous les auspices de la Société des Nations, échangeraient directement avec les organes compétents de la Société tous renseignements utiles pour l’accomplissement de leur mission et adresseraient à la Société un rapport annuel.
«Au cours de la discussion, un membre de la Commission ayant fait remarquer que la question n’avait pas seulement un aspect technique, la Commission a décidé de porter ce projet d’article à la connaissance du Conseil de la Société des Nations et de lui adresser un rapport spécial à ce sujet.»
Nous n’avons pas connaissance du rapport spécial auquel le dernier alinéa cidessus fait allusion.3
Nous croyons, néanmoins, qu’il est de notre devoir de vous exposer notre appréciation de l’aspect juridique de la question soulevée par cet article 42; en ce faisant, nous prendrons soin de ne pas pénétrer sur le terrain politique, domaine étranger aux attributions de notre Office.
Au point de vue juridique, la situation est, à notre avis, la suivante:
L’Office central a été institué par les Etats fondateurs de la Convention internationale du 14 octobre 1890 (dite Convention de Berne) sur le transport des marchandises par chemins de fer, savoir l’Allemagne, l’Autriche et la Hongrie, la Belgique, le Danemark, la France, l’Italie, le Luxembourg, les Pays-Bas, la Roumanie, la Russie, la Suède et la Suisse, pays auxquels sont venues s’ajouter: la Serbie, la Bulgarie, la Norvège, la Pologne et la Tchécoslovaquie. Le Règlement de l’Office central fait partie intégrante de la Convention de Berne précitée; il confère à l’Office des pouvoirs strictement limités et lui impose des obligations nettement déterminées. En d’autres termes, dans le cadre de ce Règlement, l’Office central est en quelque sorte le Comité exécutif, ou, si l’on préfère, le mandataire à titre particulier, des Etats signataires de la Convention de Berne. Il en résulte que seuls ces Etats signataires (qui sont, au point de vue juridique, les mandants de l’Office et qui du reste ne font pas tous partie de la Société des Nations) ont qualité pour modifier valablement le mandat qu’ils ont conféré à l’Office central.
Or, il n’est pas douteux que l’article 42 du projet de Statut précité comporte une modification de ce mandat. En quoi consiste cette modification? Aux termes de l’article I du Règlement de l’Office central, «le Conseil Fédéral de la Confédération suisse est désigné pour organiser et surveiller l’Office central institué par l’art. 57 de la Convention». Au contraire, l’art.42 du projet de statut place les offices ou bureaux internationaux etc... sous les auspices de la Société des Nations, et prévoit que ces Offices, etc... échangeront directement avec les organes compétents de la Société tous renseignements utiles concernant l’exercice de leurs missions et adresseront à la Société un rapport annuel. Il est vrai que 1’«observation» figurant comme deuxième alinéa de cet art. 42 permet de constater que l’on n’a pas l’intention de dépouiller (p.ex. dans le cas qui nous occupe) le Conseil fédéral de la mission et des prérogatives à lui conférées par la Convention de Berne, puisque l’on considère simplement que des missions et prérogatives de ce genre sont exercées sous les auspices de la Société des Nations. Nous tenons néanmoins à attirer, à ce propos, votre attention sur la signification, très élastique, du terme «auspices», qui peut être pris dans le sens de «direction», d’«appui», de «protection» (en allemand «Leitung», «Beistand», «Schutz», «Einfluss», voir Sachs-Villate.
Le Rapport figurant sous lettre A dans le Document No 1 précité, p. 14, permet à vrai dire de constater que l’intention de la Commission consultative et technique est de donner au terme «Auspices» la signification la moins impérative. Quoi qu’il en soit, il n’en reste pas moins que le texte de l’article 42 précité imposerait à l’Office central, vis-à-vis de la Socité des Nations, certaines tâches d’un caractère spécial. Nous tenons à observer ici que, actuellement déjà, notre Office communique régulièrement à la Société des Nations un exemplaire de son rapport annuel ainsi que tous les documents qui présentent un intérêt général dans le domaine des transports internationaux par chemins de fer. En outre, il existe déjà un échange de relations entre l’Office central et le Secrétariat de la Société des Nations, qui a délégué, ad audiendum, des représentants à la 3mc Conférence de révision de la Convention de Berne du mois de mai 1923. Il est donc superflu d’insister ici sur le fait que, en vous soumettant les considérations qui précèdent, l’Office central n’est pas guidé par le désir d’éviter d’assumer des tâches nouvelles. Ce sont au contraire des motifs d’ordre strictement juridique qui nous amènent à attirer votre attention sur ces tâches qui dépassent le mandat conféré à l’Office par les Etats signataires de la Convention de Berne.
Au surplus, l’art. 42 du projet de Statut réserve les dispositions de l’article 24 du Pacte de la Société des Nations aux termes duquel «tous les bureaux internationaux antérieurement établis par traités collectifs seront, sous réserve de l’assentiment des parties, placés sous l’autorité de la Société. Il faut en conclure que l’art. 42 du projet de Statut – s’il est adopté tel quel par la Conférence – ne déploiera juridiquement ses effets vis-à-vis de l’Office central que de l’assentiment des Etats signataires de la Convention de Berne. Cependant, même sous cette réserve, les opinions échangées et les décisions prises par la Conférence pourraient prêter à critique de la part de tel ou tel Etat signataire de la Convention de Berne en ce sens qu’elles seraient de nature à préjuger en quelque sorte l’adhésion des intéressés.
Si nous avons tenu à vous exposer les considérations qui précèdent, c’est avant tout parce qu’il peut arriver, au cours de la Conférence du 15 novembre, que le Président de la Conférence, ou tel ou tel autre membre de celle-ci, s’adresse au représentant de l’Office central pour connaître son opinion au sujet du texte proposé pour l’art. 42 du Statut. Si tel était le cas, le représentant de l’Office n’aurait, à notre avis, pas qualité pour donner, comme tel, une opinion sur la question, puisqu’il n’est pas mandaté à cet effet par les Etats signataires de la Convention de Berne. Il devrait donc se borner à répondre qu’il n’a reçu ni mandat ni instructions et ne peut que s’abstenir d’exprimer un avis officiel quelconque. Il pourrait alors arriver que l’avis du soussigné fût demandé à titre officieux et privé, et il nous paraît indispensable, à ce sujet, de connaître l’opinion de l’Autorité de surveillance de l’Office central, et de savoir, notamment, dans quel sens doivent être orientées les déclarations éventuelles du représentant de l’Office central à la Conférence.4
- 1
- Lettre (Copie): E 2001 (B) 8/19.↩
- 2
- Non reproduite.↩
- 3
- Nous reproduisons en annexe un extrait du procès-verbal de la 23e séance de la 26e session du Conseil de la Société des Nations du 29 septembre 1923 qui traite de cette question.↩
- 4
- Sur les travaux de cette deuxième Conférence générale des communications et du transit, convoquée à Genève, le 15 novembre 1923, cf. FF, 1926, vol. 1, pp. 237 ss. La Convention sur le régime international des voies ferrées a été conclue à Genève, le 9 décembre 1923; elle a été approu vée par l’Assemblée fédérale le 28 septembre 1926 et est entrée en vigueur pour la Suisse le 21 janvier 1927.↩
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