Classement thématique série 1848–1945:
VIII. LA LÉGISLATION INTERNATIONALE DU TRAVAIL
Abgedruckt in
Diplomatische Dokumente der Schweiz, Bd. 7-II, Dok. 403
volume linkBern 1984
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Archiv | Schweizerisches Bundesarchiv, Bern | |
Signatur | CH-BAR#J1.6#1000/1355#260* | |
Dossiertitel | Thomas A., Direktor des BIT, Genf (1920–1927) | |
Aktenzeichen Archiv | 2 |
dodis.ch/44614
Le Directeur du Bureau International du Travail, A. Thomas, au Chef du Département de l’Economie publique, E. Schulthess1
Cher Monsieur Schulthess,
Vous m’avez témoigné dans nos diverses rencontres une sympathie si cordiale, que je me permets de vous écrire cette lettre confidentielle, en vous exprimant, sans réserve, les sentiments que j’ai éprouvés ces jours-ci à la lecture de la note publiée par les journaux suisses, sur les Conventions de Washington, et sur la conversation que vous avez eue avec M. Millerand.2
Je connaissais cette conversation; je n’en avais pas fait état; je n’en avais même pas parlé à mes collaborateurs immédiats.
J’ai été, on ne peut plus surpris de voir cette note, d’allure à demi officielle, parlant publiquement des difficultés que la Suisse pouvait avoir à ratifier les Conventions de Washington, et plus particulièrement la Convention des 8 heures.
Déjà, dans nos conversations antérieures, je vous ai dit à quel point je comprenais vos difficultés; déjà, je vous ai dit à bien des reprises, ma volonté de vous aider à les surmonter, mais j’ai toujours pensé que c’était à un homme soucieux du progrès de législation internationale de travail que je parlais, et à un homme qui se passionnait, comme moi-même, pour l’institution dans le monde de conditions uniformes de travail, où la classe ouvrière trouverait l’amélioration de son sort et où les Etats industriels, soucieux de progrès social, trouveraient également une garantie contre les concurrences illicites.
Je ne crois pas me tromper, je crois que voulez cela comme moi-même; mais je suis obligé, dès lors, de vous marquer le danger que peuvent présenter des notes comme celles qui ont été communiquées aux journaux.
Nous ne pouvons nous dissimuler qu’à l’heure actuelle, si la propagande bolcheviste se développe avec succès dans beaucoup de pays, si en particulier en France, les éléments ouvriers les plus modérés et les plus soucieux d’action positive, sont débordés par les éléments violents, cela tient, en grande partie, à l’effort de réaction universel que l’on pousse contre la législation sociale existante.
Non seulement aucun progrès nouveau ne s’annonce dans les différents pays, mais on a le sentiment que les conquêtes obtenues sont remises en question.
Or, je disais publiquement à M. Motta, l’intérêt que j’attache aux institutions démocratiques et à la vie des pays démocratiques.
Elles ont le gros intérêt de mettre en pleine lumière tous les problèmes qui se posent, et d’en rendre conscients tous les citoyens d’un Etat.
Mais c’est aussi, pour les périodes difficiles, un inconvénient ou un danger. Le référendum sur les 8 heures dans les chemins de fer aura un retentissement international que vous ne pouvez pas vous dissimuler. Il peut constituer un coup grave pour la journée de 8 h. à laquelle, peut-être officiellement un jour, des Conférences internationales peuvent introduire des modifications, mais que les adversaires du progrès social condamnent en bloc et sur laquelle ils se proposent, à n’en pas douter, de revenir.
Or, lorsqu’on voit un Gouvernement, comme le Gouvernement démocratique de Suisse, saisir l’occasion du passage d’un autre Chef de Gouvernement pour dire publiquement ses réserves, lorsqu’on le voit solliciter en quelque manière l’appui moral du Chef d’un Gouvernement voisin, on peut avoir quelque doute et quelque appréhension sur ses véritables intentions en ce qui concerne la législation internationale du travail.
Je vous le répète, je vous parle d’homme à homme, en toute franchise, comme vous le ferez vous-même. Cette lettre n’est en aucune manière destinée à la publicité, bien que le jeu même des institutions démocratiques doive, semble-t-il, contraindre le Bureau à répondre par d’autres notes ou d’autres exposés, à ceux que vous pouvez faire.
Je n’ai, en aucune manière, cette intention, mais j’estime que nous nous devons l’un à l’autre des explications loyales, et j’estime surtout, étant donné l’identité de nos sentiments profonds, que nous devons chercher à nous aider pour surmonter toutes les difficultés.
Je compte vous voir très prochainement et vous demander en toute cordialité, d’examiner comment, dans la pratique quotidienne, nous pouvons ainsi nous aider.3
A vous très cordialement. P.S.– Est-ce que l’on doit publier un compte-rendu des réunions des 13 et 14 septembre? Si oui, vous comprenez combien je souhaiterais l’avoir, puisque ce compte-rendu doit me permettre de mieux comprendre encore les sentiments et les intérêts dont vous avez à tenir compte.
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Internationaler Arbeiterschutz