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Diplomatische Dokumente der Schweiz, Bd. 6, Dok. 355
volume linkBern 1981
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Archiv | Schweizerisches Bundesarchiv, Bern | |
▼ ▶ Signatur | CH-BAR#E2300#1000/716#820* | |
Alte Signatur | CH-BAR E 2300(-)1000/716 363 | |
Dossiertitel | Petersburg, Politische Berichte und Briefe, Militärberichte, Band 3 (1914–1917) | |
Aktenzeichen Archiv | 131 |
dodis.ch/43630
Je suis bien arrivé à Pétrograd dans la nuit du 23 au 24 octobre (5 au 6 novembre), juste à temps pour assister à la nouvelle convulsion révolutionnaire qui vise à renverser le Gouvernement provisoire dont Kerenski est le Président. La journée du 24 s’est passée assez tranquillement, sauf une lutte à main armée à l'imprimerie du journal Kapieika, qui imprimait des proclamations au nom du Comité maximaliste révolutionnaire. Vers minuit des automobiles blindées commencèrent à circuler dans les rues; un peu plus tard l’agence télégraphique fut occupée par des soldats et des matelots bolcheviks; à 1 h. 1/2 ce fut le tour de la poste. Vers 7 h. du matin, le 25, l’imprimerie de la Rousskaïa Volia fut occupée par un détachement de soldats et de gardes rouges révolutionnaires; à 8 h. l’imprimerie Birjarya Vedomosti (Journal de la Bourse) fut également envahie. Vers 9 h. l’hôtel Astoria fut séquestré par les matelots et gardes rouges. A 9 h. 30 la Banque d’Etat fut occupée par un détachement de 70 matelots. D’autre part, à 9 h.1/2, un groupe de soldats du G.P. (Gouvernement Provisoire) se présenta à la Rousskaïa Volia et confisqua les feuilles socialistes qui s’y imprimaient.
De son côté, le Gouvernement Provisoire ne restait pas inactif. Il lança une proclamation, soit un appel au front, signé Konovalov, pour signaler les graves événements qui venaient d’avoir lieu à Pétrograd, faire appel au patriotisme des troupes du front et soutenir le Gouvernement Provisoire. Cet appel se terminait ainsi: «Groupez-vous autour du Gouvernement Provisoire et des organes centraux de la démocratie révolutionnaire. Répondez avec décision à l’agitation traîtresse et faites cesser les désordres de l’arrière.»
Par ukase du Gouvernement Provisoire, Kichkine, membre du Gouvernement Provisoire, fut investi de pouvoirs exceptionnels pour le rétablissement de Tordre dans la capitale et la défense de Pétrograd contre toute démonstration anarchiste d’où qu’elle vienne. Les autorités militaires et civiles lui doivent soumission.
Kichkine procéda aussitôt à des nominations et remplacements dans le commandement de la région militaire de Pétrograd.
A son tour, le Comité maximaliste révolutionnaire a publié trois appels. Le premier est adressé aux citoyens de la Russie: «Le Gouvernement Provisoire est destitué. Le pouvoir gouvernemental est passé aux mains du Comité maximaliste révolutionnaire, organe du Conseil Pétrogradois du D.O.S. qui se trouve à la tête du prolétariat et de la garnison de Pétrograd. La cause pour laquelle le peuple lutte: la propriété de la terre, le contrôle des ouvriers sur la production, la création d‘un pouvoir des Soviets; tout cela est garanti. Vive la république des ouvriers, des soldats et des paysans!»
Le second appel, intitulé: «La Révolution a triomphé» est ainsi conçu:
«Toutes les gares, le télégraphe, la station du téléphone, la poste sont occupés. Le Palais d’Hiver, siège du Gouvernement Provisoire, et l’Etat-Major sont coupés du réseau téléphonique. Les bataillons d’attaque sont dispersés; les élèves des Ecoles militaires paralysés. Les automobiles blindées sont passées au Comité maximaliste révolutionnaire. Les Cosaques ont refusé de se soumettre au Gouvernement Provisoire.
«A Pétrograd, le pouvoir est entre les mains du Comité maximaliste révolutionnaire du Conseil Pétrogradois. Les soldats et les ouvriers qui se sont unanimement soulevés ont triomphé sans verser de sang. Le Gouvernement de Kerenski est renversé. Le Comité invite le front et l’arrière à ne pas se laisser prendre à la provocation et à soutenir le Conseil Pétrogradois et le nouveau pouvoir révolutionnaire qui immédiatement proposera une paix équitable, remettra la terre aux paysans et convoquera la Constituante. Partout le pouvoir passe aux conseils locaux des D.O.S. et paysans.»
Le troisième appel est adressé au front et à l’arrière. Il est rédigé dans les mêmes termes que le second. A 10 h. le Palais d’Hiver, siège du Gouvernement Provisoire, fut isolé. Le Président Kerenski et le Gouvernement tentèrent de mettre de leur côté les forces nécessaires pour écraser l’insurrection bolchevique. Toutes les tentatives restèrent sans résultat, sauf auprès des élèves des Ecoles militaires (Junker) et un bataillon de femmes qui occupèrent le Palais.
A 4 h. du matin, Kerenski était venu à l’Etat-Major où se tint une conférence qui décida de demander du secours aux Cosaques. L’ordre fut envoyé au 1er, 4ème et 14ème régiments de Cosaques du Don de se présenter. Les Cosaques répondirent qu’ils consentaient à agir, mais sous condition d’une action simultanée de l’infanterie (par crainte des mitrailleuses); mais l’infanterie n’était pas du côté du Gouvernement Provisoire. Dans la matinée du 25 arrivèrent les matelots de Cronstadt sur quelques transports convoyés par le croiseur «Aurora», le «Zirda Hobodi» et deux torpilleurs. Ils accostèrent au Quai Nicolas. Dès que cette nouvelle fut connue, les troupes fidèles au Gouvernement Provisoire passèrent aux bolcheviks. A 11 h. du matin, Kerenski se rendit en automobile privée américaine à l’une des gares et partit pour une destination inconnue. Sa présence a été signalée depuis à Gatchina et à Tsarkoïé-Selo. A 18 h. des automobiles blindées du Comité maximaliste révolutionnaire sont arrivées sur la place du Palais, se placèrent à toutes les issues de la place et entrèrent en pourparlers avec les élèves des Ecoles militaires gardant le Palais.
A 18 h. le Prince Toumanov, adjoint du Ministre de la Guerre, fut arrêté sur la place du Palais. Au même moment deux cyclistes militaires se présentèrent à l'Etat-Major et proposèrent aux membres présents de leur «remettre» TEtat-Major: en cas de refus, la forteresse et le croiseur «Aurora» ouvriraient le feu. Après quelques pourparlers, l’Etat-Major fut occupé par les matelots et la Garde rouge (ouvriers armés des usines).
Les banques avaient fermé dès 1 h. de l’après-midi, après avoir affiché que la fermeture était provoquée par la suspension des opérations à la Banque d’Etat.
Le Conseil des Cosaques a décidé de soutenir le Gouvernement Provisoire qui, jusqu’à la convocation de la Constituante, personnifie l’autorité légale. Certaines «sotnias» déclarèrent qu’au premier appel elles marcheraient sans condition pour le rétablissement de l’ordre; d’autres mettaient comme condition que l’infanterie prenne part aussi à la lutte.
A l’Etat-Major, la plus grande confusion a régné pendant la journée du 25. Une députation des Junkers (élèves des Ecoles militaires) s’étant rendue auprès de Kerenski pour demander des directions, le Chef du Gouvernement Provisoire leur répondit: «Comme Chef du Gouvernement Provisoire et comme Commandant suprême je ne sais rien de précis, je ne sais ce que sera demain, je ne puis donner aucune indication qui puisse vous aider dans votre décision. Mais comme vieux révolutionnaire, je m’adresse à vous, jeunes révolutionnaires, et vous demande de rester à vos postes et de défendre les conquêtes de la Révolution.»
Ce discours peu encourageant amena une certaine hésitation parmi les Junkers, qui ont cependant conservé les postes qu’on leur avait confiés.
Le Gouvernement Provisoire resta au Palais d’Hiver toute la journée du 25, déclarant que, quoi qu’il arrivât, il n’en sortirait pas. Vers 7 h. du soir, le Palais d’Hiver fut coupé du monde extérieur et un siège en règle commença. Il fut attaqué par des troupes occupant la Place du Palais, et du côté du quai par le croiseur «Aurora». Comme défense il y avait quelques centaines de Junkers et un bataillon de femmes. A 1 h. de la nuit, on commença à bombarder le Palais du côté des bâtiments de l’Etat-Major, qui se trouvent sur la place.
A 2 h.Vi de la nuit, la Palais fut pris, les Junkers furent désarmés et le bataillon des femmes se rendit également. Aucun des ministres, de même qu'aucun représentant des diverses fractions socialistes antibolcheviks ne s’y trouvaient plus.
Le 25 octobre a eu lieu la première séance du Comité de salut public, institué la veille par la Douma municipale. Etaient présents des Conseillers municipaux, des membres des Comités centraux exécutifs des Députés Ouvriers, Soldats, Paysans. Il a été rédigé une proclamation disant que le pouvoir démocratique réside dans le Comité de salut public créé par la Douma.
Le même jour, 25 octobre, le Préparlement fut dissout à la suite d'une irruption de soldats bolcheviks. Il fut en outre enjoint aux membres du Conseil de la République et aux journalistes d’avoir à quitter le Palais Marie (siège du Préparlement).
En somme, dans la journée et la soirée du 25 octobre, la situation était celle-ci: les bolcheviks étaient maîtres de la capitale, occupant le Palais d’Hiver, le Palais Marie, les postes, télégraphes et téléphones. Kerenski était hors de Pétrograd, s'efforçant de réunir des forces pour reprendre la ville aux bolcheviks; les autres membres du Gouvernement Provisoire étaient arrêtés.
Le 26, la situation ne s’est pas sensiblement modifiée. Vers le soir eut lieu à l’Ambassade d’Angleterre une conférence des chefs de mission, afin de discuter l’opportunité de mesures collectives, en vue de la protection des divers nationaux. Après des discours du Ministre belge Destrée, de l’Ambassadeur de France, du Ministre de Suède, Doyen des ministres, il fut décidé de ne rien faire, de laisser chaque chef de mission libre de s’adresser pour protection à l’endroit qu’il croirait préférable.
La première liste de membres du Pouvoir exécutif portée à la connaissance du public donnait les noms de neuf commissaires: M. Uritzki, aux Affaires Etrangères; M. Ritkov, Justice et Intérieur; M. Kliapnikov, Travail; Mme. Kollontaï, Bien Public; M. Riazanov, Commerce, communications et contrôles d'Etat; M. Kovrine, Marine; M. Muranov, Théâtres; M. Verbatov, Presse; M. Groman, Subsistances.
Ce premier groupement ne comprenait aucun des chefs du mouvement.
Dès le lendemain on publia la liste d’un Gouvernement maximaliste dans lequel figurent comme Président M. Oulianov dit Lénine et M. Trotski aux Affaires Etrangères. Lorsque ce dernier voulut prendre possession de son Ministère, il fit appeler M. Neratov, adjoint des précédents ministres et lui dit que le personnel était libre de rester ou de se retirer. M. Neratov alla rapporter cette proposition aux fonctionnaires du Ministère, assemblés dans une salle de réunion. Il revint rendre compte de sa mission et déclara que tous les fonctionnaires refusaient de continuer leur service. Dès lors et jusqu’à cette heure le Ministère est sans fonctionnaires. Il en est de même pour les autres ministères. Il s’en suit que tous les dicastéres du Gouvernement ne fonctionnent plus et que les affaires sont complètement arrêtées.
Le premier décret du Président du Conseil des Commissaires, signé Vlad, Oulianov, Lénine, est daté du 27 octobre 1917. Il est ainsi conçu: «Au nom du Gouvernement de la République, le Conseil des Commissaires du Peuple élu par le Congrès des D.O.S. (députés ouvriers, soldats) en participation avec les D.P. (députés paysans) décrète:
1. les élections à l’Assemblée constituante demeurent fixées au 12 novembre;
2. les Commissions préposées aux élections, les institutions locales indépendantes, les Soviets D.O.S. et P., les organisations des soldats sur le front doivent déployer toutes leurs forces pour assurer le libre et parfait fonctionnement des élections à l’Assemblée constituante pour l’époque fixée.»
Durant les journées de vendredi et samedi, les bruits les plus contradictoires circulaient au sujet du Généralissime Kerenski: tantôt on le disait à Tsarkoïé-Selo, à la tête de troupes appelées du front; on disait même que l’avant-garde était aux portes de Pétrograd, c’est-à-dire tout près de la gare de Tsarkoïé-Selo. Selon d’autres nouvelles, il avait dû rétrograder à Gatchina, n’étant pas sûr de l’esprit des troupes sous ses ordres.
Dans la journée d’hier, dimanche, des conflits sanglants eurent lieu sur différents points de la capitale. Les Junkers, derniers soutiens du Gouvernement Provisoire, s’étaient emparés de la station centrale du téléphone, à la Moiskaïa. Une poignée de ces jeunes élèves des Ecoles militaires s’étaient barricadés sur la rue, devant la station, avaient formé une barricade d’automobiles et de camions. Ils avaient accumulé des caisses sur le trottoir et de derrière cet établi ils échangeaient des coups de feu avec les marins d’Helsingfors qui apparaissaient à l’extrémité des rues avoisinantes, débouchant sur la Moiskaïa. Vers la fin de l’après-midi, les Junkers à bout de munitions et ayant en vain demandé du secours, trompés dans leur attente de l'entrée de Kerenski dans la capitale, ont cédé à la force. Les marins précipitèrent du toit plusieurs Junkers dans la cour et s’emparèrent des autres qu’ils emmenèrent prisonniers. On dit qu’ils ont été fusillés soit aux portes de la forteresse Pierre et Paul, soit à l’intérieur. Pendant ce temps, plusieurs écoles militaires se trouvant dans divers quartiers de la capitale et où se défendaient encore quelques compagnies de Junkers furent assaillies par les marins qui massacrèrent sans pitié ces jeunes défenseurs du Gouvernement Provisoire.
Le croiseur «Aurora» paraît avoir quitté les eaux de Pétrograd, mais d’autres bâtiments de guerre, venus de Finlande, ont pris sa place et sont ancrés près du pont Nicolas.
Cet après-midi, sous les fenêtres de la Légation, rue Gogol, une automobile qui circulait dans la rue fut arrêtée par des marins postés sous les portes des maisons voisines: trois Junkers qui se trouvaient dans l’automobile y furent assommés à coups de crosse par les marins et transportés dans la cour du Grand-Hôtel: deux d’entre eux qui respiraient encore furent achevés à coups de fusil. D'assez nombreux curieux assistaient impassibles à ce massacre.
Les journaux qui ont paru hier donnaient les nouvelles les plus contradictoires au sujet de Kerenski. Le journal Russian Daily News, qui se publie en anglais depuis quelques temps, reproduisait des nouvelles données par le journal Volia Naroda (journal de Gorki) fournissant les détails les plus circonstanciés sur la bataille de Pulkovo, avec indication des villages et localités occupés par les troupes de Kerenski, qui seraient arrivées à un village distant de six verstes de Pétrograd. Les Bolcheviks en retraite auraient subi des pertes importantes. Le journal bolchevik Isvestia déclarait au même moment que les troupes de Kerenski étaient en pleine retraite sur Gatchina.
M. Lardy a eu le courage d’aller hier soir s’assurer sur place de l'état des choses; utilisant une ligne de tramways qui s’avance assez loin dans la banlieue et cheminant ensuite sur la chaussée qui mène à Tsarkoïé-Selo. Il est parvenu jusqu’à l’emplacement indiqué par la Volia Naroda comme limite de l’avance des troupes de Kerenski. Il a interrogé des soldats isolés, cheminant sur la route, et a acquis la conviction qu’aucun combat n’avait eu lieu dans cette localité et que le récit de la Volia Naroda était inventé de toutes pièces. Ce matin, les journaux annoncent que les Bolcheviks ont pris Tsarkoïé-Selo et même Gatchina, et que le Comité militaire révolutionnaire a ordonné l’arrestation de Kerenski. Depuis avant-hier des protestations s’élèvent contre une plus longue effusion de sang et des pourparlers interminables sont engagés entre les partis socialistes non bolcheviks et ces derniers pour la formation d’un cabinet représentant tous les groupes socialistes, y compris les Bolcheviks. D’après les nouvelles de ce matin, l’accord serait imminent et on ne discuterait plus que sur l’attribution des portefeuilles. Le programme commun serait la répartition des terres aux paysans et les négociations de paix immédiates(!). La convocation des électeurs pour le 12 novembre paraît impossible en raison de la crise actuelle, du chômage des institutions qui a retardé les mesures préparatoires.
A Moscou, la situation est également très troublée. Si l’on en croit les nouvelles des journaux, le Kremlin, siège des Autorités, aurait été pris, repris plusieurs fois successivement par les troupes du Gouvernement Provisoire et par les Bolcheviks. A Kiev, il en est de même. Le Général Aledine aurait été promu dictateur dans les régions des Cosaques du Sud.
Mercredi 2/15 novembre
D’après les nouvelles données par les journaux parus ce matin, l'accord se serait fait entre les diverses fractions socialistes pour la formation d’un Ministère présidé par Tchernov et dans lequel le poste de Ministre de l’Intérieur serait confié au maximaliste Rykov. Le titulaire du Ministère des Affaires Etrangères ne serait pas encore désigné; d’après certains bruits, la Direction des Affaires Etrangères serait confiée à M. Martov. M. Trotski ne resterait pas à son poste de Ministre des Affaires Etrangères. M. Lounatcharski, maximaliste, fera probablement partie du nouveau cabinet comme Ministre de l’Instruction Publique. Mercredi 6 h. du soir. Voici les dernières nouvelles publiées par le Journal L’Entente de ce soir.
Kerenski aurait été arrêté près de Gatchina. Un groupe d’hommes politiques en contact étroit avec l’Attaman des Cosaques, Kalédine, se serait formé à Moscou. Ce dernier aurait l’intention de combattre les Bolcheviks jusqu’au bout. L’imprimerie du Bulletin du Conseil des Députés Paysans aurait été mise à sac par la Garde rouge, qui aurait brûlé dans la rue tous les numéros trouvés à l'imprimerie.
Après le vote de la résolution des Bolcheviks portant que le Gouvernement doit être formé par le Conseil D.O.S., complété par les représentants du Conseil des Députés Paysans, de l’Union des Cheminots et de toutes les unions professionnelles, un amendement des socialistes révolutionnaires de gauche, disant que la convocation de l’Assemblée constituante à la date fixée est indispensable, a été rejeté par une grosse majorité. Par ordre du Comité de Guerre révolutionnaire, la Garde rouge de Pétrograd devait partir comme renfort à Moscou, où la lutte continue; mais l’Union des Cheminots a refusé d’opérer le transport de la Garde rouge à Moscou.
Par ordre du Comité de la guerre révolutionnaire, ce matin auraient été arrêtés les Comités des Cheminots de la Ligne Nicolas et de la Ligne Moscou-Windaw-Rybinsk.
Le Journal Pravda (Bolcheviks) publie le communiqué suivant du Comité de la Guerre révolutionnaire: ((Défaite définitive de Kerenski. Les troupes de Kerenski sont battues; tout son Etat-Major, avec le Général Krasnov et Voïlinski est arrêté. Kerenski, après s’être déguisé en matelot, aurait pris la fuite. Les Cosaques ont passé du côté des troupes révolutionnaires et ont l’ordre d’arrêter Kerenski pour le remettre aux mains du Comité Révolutionnaire de Guerre. La Révolution triomphe.»
Dans la journée d’hier, la majorité des banques étaient fermées pour cause de grève. Cette mesure avait été prise par le Syndicat de l’Union professionnelle des Employés de Banque en réponse à la menace du Gouvernement Bolchevik qui avait ordonné l’arrestation du Directeur des Banques, et des membres de la Direction, s’ils n’ouvraient pas les établissements aux heures habituelles de 10 h. à 2 h. x h. Hier soir, le Syndicat de l’Union professionnelle des Employés de Banque s’est réuni à nouveau. L’Assemblée fait remarquer que quelques banques ont ouvert leurs portes malgré la décision. La discussion ayant été ouverte sur la question de la continuation de la grève ou de la reprise du travail, la majorité des représentants des banques se prononce pour la réouverture. En conséquence, la Banque de l’Etat et les banques privées ont ouvert leurs services de 11 h. à 1 h. Toutefois si la menace du Gouvernement devenait une réalité et si un commissaire se présentait dans une banque quelconque, soit pour le contrôle des opérations, soit pour l’arrestation de la Direction, immédiatement et en parfait accord, tous les employés des banques de la place se mettront en grève.
Les réserves de l’Intendance, grâce auxquelles on a pu fournir ces jours derniers du pain à la population, sont sur le point d’être épuisées.
Le ravitaillement de la capitale, menacée par l’épuisement des réserves et par une grève imminente des cheminots, paraît donc très compromis.
Je termine ici ce lamentable exposé, afin que cette lettre puisse partir par le courrier de demain.P.S. L’exode de la colonie suisse continue. Nous recevons tous les jours des demandes pour obtenir l’autorisation de passage par l’Allemagne.
- 1
- Rapport politique: E 2300 Petersburg, Archiv-Nr. 3.↩
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