Classement thématique série 1848–1945:
V. CODIFICATION DU DROIT INTERNATIONAL
1. Conférence de La Haye sur le désarmement
Également: Invitation formelle du gouvernement impérial russe et proposition d’un programme pour la conférence. Annexe de 30.12.1898
Imprimé dans
Documents Diplomatiques Suisses, vol. 4, doc. 283
volume linkBern 1994
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Archives | Archives fédérales suisses, Berne | |
▼ ▶ Cote d'archives | CH-BAR#E2001A#1000/45#541* | |
Ancienne cote | CH-BAR E 2001(A)1000/45 41 | |
Titre du dossier | Nr. 461. Allgemeines, 1898 - Mai 1899 (1898–1899) | |
Référence archives | B.231-1 |
dodis.ch/42693
Le Directeur des Affaires politiques au Ministère des Affaires étrangères M. Nisard m’a dit hier qu’en ce qui concerne la conférence du désarmement, la question n’avait, depuis la fameuse circulaire de l’été dernier, pas fait un pas malgré la visite du Ministre des Affaires étrangères de Russie à Paris au mois d’octobre et malgré les nombreux entretiens, qualifiés de «particulièrement intimes» par M. Nisard, du Comte Mouravieff avec M. Delcassé. M. Nisard assure qu’aucun programme n’a été élaboré, que le lieu et la date de la réunion ne sont pas encore arrêtés et qu’en particulier on attribue à quelque aubergiste suisse, désireux de remplir son hôtel en hiver, la nouvelle lancée dans la presse de la réunion de la conférence à Genève.
Les difficultés qui s’opposent à ce qu’il sorte quelque chose de pratique de cette conférence paraissent énormes à M. Nisard. 11 faudrait non seulement des délégués diplomatiques et même une conférence ou plutôt une entente diplomatique préalable pour convenir de tout ce qu’il sera interdit d’aborder au sein de la conférence proprement dite; il faudrait ensuite des délégués militaires pour savoir si telle ou telle transformation du matériel d’artillerie ou d’infanterie peut ou non être mise en discussion; il faudrait ensuite des délégués navals; il faudrait aussi des délégués financiers pour pouvoir apprécier la répercussion sur les budgets des divers Etats des propositions faites par les militaires ou les marins; si la conférence devait aborder les questions d’arbitrage, on toucherait à l’indépendance des Etats, à la majorisation possible dans une sorte d’aréopage européen des gros par les petits, des républiques par les monarchies; déjà en 1874 une initiative partie du même pays avait abouti à Bruxelles à la signature d’un simple protocole qui n’a jamais reçu de sanction diplomatique, et il s’agissait d’un terrain beaucoup plus circonscrit, la codification des lois de la guerre.2 Comment trouver des sanctions si par hasard on se mettait d’accord sur certaines solutions? M. Nisard a rappelé que comme jeune homme, lorsqu’il travaillait à la direction du contentieux, il avait fait de sa propre initiative un travail sur la garantie des neutralités, et avait proposé qu’en cas de violation de la neutralité de la Suisse ou de la Belgique par une Puissance, toutes les autres fussent tenues de déclarer la guerre au perturbateur; le vieux directeur Villefort lui rendit quelques jours après son travail avec cette note marginale «Très bien écrit, mais tout cela c’est de la théorie; bouillie pour les chats.» – M. Nisard n’a pas dit que la proposition russe du désarmement fût de la bouillie pour les chats, mais il est évident que c’est bien là le fond de sa pensée, et qu’à Paris, après ce qu’il vient de se passer entre la France et l’Angleterre à propos de la mission Marchand3, et après l’absence du concours du Cabinet de St-Pétersbourg, on ne pousse pas à la roue.
Mon collègue de Suède et Norvège prétend savoir que le programme de la conférence comprendrait les points suivants: pas d’augmentation de l’artillerie de campagne, pas de nouvelles transformations des armes portatives, pas d’augmentation du budget militaire et naval des différents Etats, et enfin vœu de l’appel à l’arbitrage en cas de conflits et tentative d’organisation de tribunaux arbitraux permanents; ce programme aurait été communiqué à la Suède parce qu’elle aurait sondé le terrain à l’occasion d’une demande de la Norvège tendant à obtenir, à l’occasion de la conférence, la neutralisation des trois royaumes scandinaves sous la garantie de l’Europe. M. Nisard m’a assuré que la France n’avait pas la moindre connaissance d’un programme de ce genre.
Il me paraît en tout cas résulter de ma conversation avec M. Nisard que la conférence du désarmement n’est pas encore prête à se réunir.4
- 1
- Lettre: E 2001(A). Remarque manuscrite de Ruffy à la tête du document: en circulation et aux légations, 10 novembre 1898.↩
- 2
- Cf. DDS vol. 3, chap. VIII.↩
- 3
- Cf. RPs nos 280, 282, 287, 290.↩
- 4
- En réalité l’invitation du gouvernement russe à la conférence allait être envoyée aux Etats accrédités à la Cour impériale le 30 décembre 1898/11 janvier 1899, cf. l’annexe.↩
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Questions de droit international
Désarmement Conférences de la paix à La Haye (1899 et 1907)