Classement thématique série 1848–1945:
II. RELATIONS BILATÉRALES
13. France
13.1. Commerce
13.1.1. Traité de commerce et guerre douanière
Printed in
Diplomatic Documents of Switzerland, vol. 4, doc. 78
volume linkBern 1994
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Archive | Swiss Federal Archives, Bern | |
▼ ▶ Archival classification | CH-BAR#E13#1000/38#152* | |
Old classification | CH-BAR E 13(-)1000/38 33 | |
Dossier title | Korrespondenz des Departements des Auswärtigen mit der Schweizer Gesandtschaft in Paris, T. 2 (1892–1892) |
dodis.ch/42488 Le Ministre de Suisse à Paris, Ch. Lardy, au Chef du Département des Affaires étrangères, N. Droz1
Le Ministre des Affaires Etrangères m’a dit que d’après les nouvelles qu’il avait reçues, l’opinion publique en Suisse était de plus en plus excitée contre la France à raison du nouveau tarif douanier et m’a demandé si mes informations concordaient avec les siennes.
J’ai répondu à M. Ribot que j’étais sans nouvelles officielles, mais que d’après de nombreuses communications privées, il n’y avait pas d’illusions à se faire sur la violence du courant qui pousse le Conseil fédéral à la guerre de tarifs à brève échéance. J’ai exposé que des députés aux Chambres fédérales appartenant aux parties de la Suisse qui ont mis en mouvement l’été dernier le référendum contre le nouveau tarif fédéral des douanes m’avaient dépeint leurs électeurs comme résolus aujourd’hui à la guerre de tarifs; qu’un des représentants les plus notables de l’industrie des soieries, libre-échangiste par excellence, à Zurich, m’avait montré des lettres absolument belliqueuses de ses confrères. Quant aux manifestations de la presse, elles ont un caractère d’unanimité et de vivacité incontestable, et quelques-unes dépassent absolument les limites raisonnables, en donnant un caractère personnel à leurs polémiques. Dans ces conditions, les négociations seront difficiles non pas seulement à Paris, à cause du parlement français, mais en Suisse à cause de l’opinion publique surexcitée.
M. Ribot estime qu’en France, dans le public et dans le Parlement, les idées de modération ont incontestablement gagné du terrain; il croit que si l’on s’en tient aux industries spécialement suisses, il y a des chances d’aboutir ici; il serait bien regrettable qu’en allant au-delà et en exagérant ses demandes la Suisse compromît tout. M. Ribot estime aussi qu’il n’y a pas d’intérêt à aller trop vite et qu’en France tout au moins on gagne du terrain en gagnant un peu de temps. Le ministre a ajouté que l’ambassade de France à Berne avait reçu du Conseil fédéral l’avis qu’il avait l’intention de provoquer l’examen de divers articles du tarif minimum; il a chargé M. Arago, venu ici pour l’enterrement de son frère et qui regagne ce soir son poste, de répondre au Conseil fédéral qu’il attendrait les observations écrites de la Suisse, qu’il les ferait examiner et qu’ensuite il pourrait y avoir lieu à l’envoi à Paris de commissaires. M. Ribot m’a donné à entendre que l’Ambassadeur de France à Berne lui avait représenté l’état de l’opinion publique en Suisse sous les mêmes couleurs que moi.
Dans la visite qu’il m’a faite hier, M. Arago avait l’air fort impressionné et inquiet de l’état de l’opinion chez nous et inclinait même à le considérer comme dangereux pour une entente finale; je ne lui ai pas caché que j’avais personnellement les mêmes craintes, attendu que dans l’état actuel des esprits ce serait une erreur stratégique et tactique de demander trop et trop vite; j’ai insisté aussi sur l’opportunité de mener les pourparlers avec beaucoup de discrétion, pour ne pas provoquer l’organisation des résistances.
C’est avec une bien grande impatience que j’attends les résultats de vos laborieuses négociations avec l’Italie2; au point de vue des négociations francosuisses il serait bien désirable que Vous puissiez Vous entendre avec les Italiens, car si nous voulons nous accorder le luxe d’une guerre de tarifs, il vaut mieux n’en avoir que sur une seule frontière. Combien je Vous ai plaint tous ces tempsci au milieu de Vos multiples champs d’activité. Espérons que la fin des pourparlers de Zurich Vous permettra de nous donner aussi un peu plus souvent de Vos nouvelles, dont la force des choses nous a quelque peu privés dans les derniers temps.3
- 1
- E 13 (B)/ 180.↩
- 2
- Il s’agit des négociations avec l’Italie en vue de la conclusion d’un traité de commerce qui sera signé le 19 avril 1892 (Cf. RO, 1892, vol. 12, pp. 787–832).↩
- 3
- Note marginale de Lardy: M. Léon Say et d’autres députés que j’ai vus récemment m’ont donné des détails utiles et intéressants sur l’état des esprits ici dans le parlement et le public.↩