dodis.ch/41399 L’Envoyé extraordinaire de Suisse à Turin, A. Tourte, au Chef du Département du Commerce et des Péages, J. M. Knüsel1
Ayant eu soin de relire le traité de commerce avant d’en parler à Monsieur de Cavour, la clause finale m’a frappé. Il y est dit qu’à moins d’être dénoncé une année d’avance, soit avant le 1er juillet prochain, ce traité continuera à être en vigueur pendant dix ans.
Il me semble que d’une manière générale la certitude de cette continuation vaut mieux pour la Suisse que les éventualités d’une nouvelle combinaison au travers de laquelle viendraient se jeter les intérêts et surtout les préjugés des contrées annexées à la monarchie et habituées jusqu’à ce jour à vivre sous un régime protecteur et prohibitif.
Une fois le 1er juillet passé, sans que le traité ait été dénoncé, nous serons bien placés pour offrir de conclure une convention supplémentaire dans laquelle nous accorderons des avantages nouveaux, en retour de ceux que nous demanderions.
Je crois qu’alors le moment serait heureusement choisi pour entamer ces négociations, que les principes libre-échangistes de MM. de Cavour et Vegezzi, et mes rapports d’amitié avec eux, seraient de nature à faciliter. Il se peut que Monsieur Vegezzi pense à cette date du 1er juillet et n’ait pas l’intention de dénoncer le traité. Mais, il se peut aussi, qu’au milieu de l’énorme complication d’affaires que l’annexion suscite, au milieu du gâchis presque inextricable des institutions provenant des anciennes administrations, des dispositions nouvelles dues aux décrets des dictateurs, et des exigences de la nouvelle administration sarde, on laisse par mégarde passer l’époque fatale.
J’ai donc cru plus prudent de ne rien dire, et d’attendre pour parler le quatre ou le cinq juillet, à moins d’un ordre contraire de votre part.