Language: ns
1940-1943
BAR/AF;E 2001(E)1967/ 113/, 479;
B.52.31.2  "Nestlé & Anglo-Swiss Holding Co., Ltd, Vevey. Italien: Behandlung feindlichen Eigentums"
Information Independent Commission of Experts Switzerland-Second World War (ICE) (UEK)
Info UEK/CIE/ICE ( deutsch français italiano english):
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B.52.31.J.2.

1. Dès octobre 1940, Nestlé s'adresse au DPF et plus particulièrement à la SCIPE pour la défense de ses intérêts en Italie. Tout commence par le séquestre de 50 actions nominatives au nom de Maurice Paternot, Administrateur délégué de la Société Nestlé. La raison semble être que M. Paternot est de nationalité française.

2. Il s'avère également que les Italiens ont des doutes sur la nationalité de la Société Nestlé qu'ils considèrent comme une société ennemie (à cause de son nom jusqu'en 1940 : 'Nestlé and Anglo-Swiss Holding co Ltd'. Malgré les efforts du DPF, de la SCIPE, et particulièrement de la Légation de Suisse à Rome, le séquestre est maintenu. La seule chose à espérer est que les autorités italiennes ne procèdent pas à la liquidation des titres de sorte que, une fois la guerre terminée, ils puissent être récupérés.

3. Tout au long du printemps 1941, par l'entremise de la SCIPE et de la Légation de Suisse à Rome, Nestlé s'évertue à démontrer aux autorités italiennes le caractère purement suisse de son entreprise, afin qu'elle ne tombe pas sous la mise sous surveillance par un commissaire italien en tant que société ennemie. Les autorités suisses semblent assez préoccupées de la sauvegarde des intérêts de Nestlé qu'elles considèrent comme un maillon très important de l'économie helvétique. Convaincre les Italiens n'est pas aisé, car il faut fournir des preuves.

4. Le 3.6.1941 la mise sous surveillance de Nestlé Milan est publiée, conformément à la loi du 28.6.1940. Le contrôleur est M. Giulio ZINO. La Légation de Suisse à Rome va continuer ses efforts pour défendre les intérêts de Nestlé; celle-ci de son côté prépare dès lors un 'dossier de preuves' attestant le caractère purement suisse et surtout pas ennemi de la société. Perrochet et Kohli semble entretenir des relations assez étroites. [p.ex. PHOTOCOPIES : Notice d'entretien entre Perrochet et Kohli du 13.05.1941;notice d'entretien entre Perrochet et Kohli du 24.06.1941]

5. Le dossier de preuves que prépare Nestlé est terminé le 10.7.1941 : Le mémoire du 10.7.1941 et ses 27 annexes sont censés attester la nationalité purement suisse du groupe holding, voire même plus : le caractère indéniablement aryen de ses dirigeants !


6. Dans une que Nestlé envoie au DPF, on peut remarquer une fois de plus que chez Nestlé on se fonde sur la nationalité suisse des dirigeants, sur le fait que la société soit une société de droit suisse et que son siège se trouve en Suisse. Aucune mention des actionnaires. Un fait plus inquiétant est le suivant, cité en post-scriptum : «Nous nous permettrons de vous remettre dans peu de jours les quelques pièces, telles que certificats d'arianisme [sic], que nous n'avons pas encore eu le temps de faire légaliser.» Or, et celà Kohli l'a bien compris, il s'agit avant tout de prouver que le capital, et les bénéfices qu'il génère, est bien en mains suisses.  Kohli le 17.7.1941, lettre à la Légation de Suisse à Rome :
«... dass die wirklichen Kapitalinteressen an der Società Nestlé in Mailand die Aktionäre der Nestlé-Holdinggesellschaft in Vevey sind und zu diesem Zweck über die Struktur des Nestlé Konzerns soweit wie nötig Aufschluss  zu geben, und andererseits nachzuweisen, dass die Aktien der Holdinggesellschaft mehrheitlich in schweizerischen Händen liegen.»


Commentaire : Les relations qu'entretiennent Nestlé et la SCIPE, plus particulièrement Perrochet et Kohli sont relativement bonnes. Plusieurs notices d'entretien susmentionnées en attestent et l'on peut affirmer que Kohli attache une certaine importance à la sauvegarde des intérêts de Nestlé. Il est tout de même frappant de constater qu'il est question à plusieurs reprises de certificats d'aryanité ou de 'caractère purement aryen' dans les papiers du DPF sans que l'on semble offusqué. (p.ex. notice du 18.07.1941 de Schnyder). A plusieurs reprises d'ailleurs on remarque que Nestlé ne manque pas d'insérer dans ses courriers, dans ses divers projets de mémoires, dans ses justificatifs ou encore dans ses historiques de la société, que ses directeurs sont tous suisses et aryens. [cf. annexe à la lettre du 15.05.1941 au DPF ainsi que la lettre du 12.07.1941 au DPF; PHOTOCOPIES DES DEUX]. Il n'y a donc aucune gêne à en parler ouvertement, même dans un échange de courrier avec le DPF. Le plus étrange est que nulle part je n'ai trouvé des références à une demande expresse de la part des autorités italiennes concernant des certificats d'aryanité.

8. Le 25.7.1941, Nestlé transmet son mémoire du 10.7.1941 [PHOTOCOPIE] au DPF (SCIPE) et le jour suivant, les autorités italiennes en reçoivent également par l'intermédiaire de la Légation de Suisse à Rome.
Le 'fameux' mémoire du 10.7.1941 et ses 27 annexes préparé par Nestlé à l'attention des autorités du DPF à Berne. Dans les annexes sont mentionnés divers documents devant servir à prouver le caractère purement suisse de la société. On peut être surpris d'y trouver également des documents certifiant la race purement aryenne des administrateurs, des directeurs et des Commissaires-vérificateurs de la Nestlé Holdings. On remarquera en outre que, sur les différents certificats d'aryanité délivrés par les autorités communales du lieu d'origine ou de domicile de la personne, ceux en provenance des villes de Zürich et de Cham contiennent la phrase type certifiant l'aryanité en préimpression. Le certificat ethnique de Monsieur Paternot, délivré par le Consulat de France à Lausanne est lui le seul à mentionner que l'attestation d'aryanité n'est délivrée que sur demande des autorités italiennes.
[Voir également l'ouvrage de D. Bourgeois, "Business helvétique et troisième Reich", Lausanne 1998]

9. Le 21.11.1941 la Légation de Suisse à Rome peut faire savoir au DPF que la 'mise sous syndicat de la Società Nestlé à Milan' a été révoquée. La levée est officielle le 26.11.1941. L'affaire est classée.

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En 1943, Paternot et Kohli s'entretiennent des affaires de Nestlé au Japon, en Tchécoslovaquie, en Autriche, en France et en Espagne. [Notice d'entretien PHOTOCOPIE].

Août 1943, Nestlé s'adresse à nouveau au DPF pour, d'une part réitérer dans un mémoire le caractère suisse de l'entreprise à Milan et, d'autre part, parce que la firme a subi des dommages suite à des bombardements. La direction s'est d'ailleurs déplacée à Intra. La Légation offre ses services pour la transmission du courrier entre Vevey et la direction installée à Intra.


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Commentaire : Qu'en est-il vraiment au sujet de cette demande des autorités italiennes ? Dans toute la correspondance qui précède au sujet des intérêts de Nestlé à Milan et du caractère purement suisse de cette société, il n'est jamais fait mention d'une quelconque demande de certificat d'aryanité qui seraient à fournir comme preuve.

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