Lingua: francese
2007
Hélène Legrais, Les enfants d'Elisabeth, Paris, 2007, Ed. Presses de la Cité (Terres de France).
Referenza bibliografica (Bib)
Compte rendu dans Le Nouvel Observateur du 16.5.2007:
"Les enfants d'Elisabeth"

Hélène Legrais

Février 1939. Talonné par les troupes nationalistes de Franco, appuyées par l'Allemagne de Hitler et l'Italie de Mussolini, un demi-million de Républicains espagnols passe les Pyrénées en plusieurs endroits de la frontière des Pyrénées-Orientales. Ils pensent trouver un refuge dans la patrie des droits de l'Homme, mais se retrouvent parqués dans des camps. Certaines femmes sont enceintes, mais les conditions de vie sont telles que leurs chances et celles des bébés à venir sont bien minces. Une jeune volontaire suisse, Elisabeth Eidenbenz, oeuvrant pour l'Aide suisse aux enfants, puis pour la Croix-Rouge, va leur tendre une main fraternelle et les sortir de cet enfer. Hélène Legrais, journaliste dans l'audiovisuel qui s'est tournée avec succès vers l'écriture, raconte ici cette bouleversante histoire vraie jusqu'alors totalement méconnue, d'après les souvenirs qu'elle a recueillis auprès de l'intéressée elle-même, -qui préface l'ouvrage- mais aussi de mères qui ont accouché dans cette "maternité" de fortune, et des enfants qui y sont nés. Il y a des vies et il y a des destins: Elisabeth Eidenbenz, héroïne authentique, s'est forgé un destin d'exception en permettant à 600 enfants de voir le jour dans un havre de paix, près d'Elne, dans la plaine du Roussillon. Le portrait inoubliable d'une femme de courage et de générosité rares.

Ed. Presses de la Cité -Terres de France.

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Compte rendu dans Le Courrier Paru le Jeudi 31.5.2007

MARC-OLIVIER PARLATANO
ROMAN HISTORIQUE - Hélène Legrais raconte l'action humanitaire d'une infirmière suisse à la tête d'une maternité à Elne (France) de 1939 à 1944.
L'histoire comme un roman: c'est le choix d'Hélène Legrais. Un an après sa fiction Les Herbes de la Saint-Jean, la journaliste et romancière française signe Les Enfants d'Elisabeth, un livre généreux et poignant sur l'action d'une «Juste» de 1939 à 1941. En ce temps-là, l'infirmière suisse Elisabeth Eidenbenz (qui vit toujours; nonagénaire, elle réside en Autriche)1 a dirigé une maternité en France, à Elne. Elle s'est battue pour sauver des enfants d'une mort certaine. L'ouvrage éveille la conscience à l'engagement et à la solidarité.
L'action démarre début 1939. La guerre civile espagnole finit. Vaincus, les républicains fuient en France... où ils sont très mal accueillis par les autorités. Ils se voient parqués dans des camps sur «les plages du silence» à Argelès-sur-Mer, Saint-Cyprien, ou dans l'arrière-pays, à Rivesaltes, Gurs... Pour les femmes enceintes, la peur de perdre leur enfant s'ajoute à l'humiliation et au déracinement.
C'est dans ce contexte qu'intervient Elisabeth, jeune volontaire du Secours suisse aux enfants. Elle arpente sans relâche ces «prisons à ciel ouvert» pour accueillir à Elne des femmes exténuées dans une maternité de fortune qu'elle a créée. Là, à l'abri du chaos ambiant et de la barbarie (Occupation, Shoah), ses protégées peuvent accoucher décemment. Près de 600 enfants naîtront à Elne en cinq ans. Parmi eux, Guy Eckstein, israélite né le 10.10.1941, dont Hélène Legrais publie le témoignage en préambule.
En clair, les naufragées qui arrivent à la maternité roussillonnaise ne sont pas seulement Espagnoles, mais également juives ou tziganes. Elisabeth et ses aides tenteront l'impossible pour soustraire, parfois en vain, leurs protégées à la Shoah: une fillette juive est ainsi évacuée secrètement dans un camion chargé de cercueils! En outre, entre Perpignan et la chaîne pyrénéenne, des Français cachent des fugitifs chez eux, dans des granges à foin. D'autres maudissent les «rouges» et leur souhaitent tout le mal possible. Telle est l'époque, contrastée, entre haines faciles, générosité extrême et actes de résistance inouïs. En adoptant une narration romanesque, donc, l'auteure donne vie à tout un petit monde à contre-courant de la machinerie de l'horreur. Elle met en scène Teresa, rebelle espagnole qu'elle n'a pas inventée (en 2002, à 88 ans, Teresa est retournée voir l'ex-maternité restaurée par la municipalité)2. L'ouvrage a pour fil rouge l'amitié qui se noue entre Teresa et Elisabeth. Ce mode narratif permet une lecture fluide, aisée des événements, une approche de cette période historique sans la sécheresse qui pourrait accompagner un rapport scientifique «froid». Il en résulte un livre militant, épique, qui ne laissera personne de marbre. Tant qu'il restera au moins quarante justes sur la terre, rapporte la tradition hébraïque, le monde continuera à exister; de 1939 à 1944, en tout cas, la petite maternité suisse d'Elne aura sauvé bien des vies. I
Note : Hélène Legrais, Les Enfants d'Elisabeth, Presses de la Cité, 2007, 269 pp.
> Films: Journal de Rivesaltes 1941-1942 de Jacqueline Veuve (1997); La Maternité d'Elne de Frédéric Goldbronn,(2002); Las Madres de Elna, de Manuel Huerga, sortie 2008.
1 En 2002, elle a reçu la médaille des «Justes parmi les Nations».
2 L'ex-maternité est devenue une «auberge humanitaire» accueillant des femmes et des enfants victimes de guerres. www.elne.fr
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