dodis.ch/44517
La Division des Affaires étrangères du Département politique au Ministre de Suisse à
Rome, G. Wagnière
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Personnelle
Berne, 19 avril 1920
Par notre lettre du 15 avril2, nous avons eu l’honneur de vous signaler la liste des affaires inscrites à l’ordre du jour de la prochaine session du Conseil de la Société des Nations à Rome, en attirant votre attention plus spécialement sur les questions qui ont un intérêt pratique considérable pour notre pays, telles avant tout la question de la convocation de l’assemblée de la Société des Nations et la question de la répartition des frais du Secrétariat général entre les Etats membres de la Ligue.
A cette occasion, nous ne voudrions pas manquer de vous informer, à titre personnel, que M. Tittoni a fait savoir à M. le Président de la Confédération par le Ministre d’Italie à Berne qu’il serait disposé à appuyer dans le Conseil les vœux que le Gouvernement fédéral pourrait formuler. Il est vrai qu’en faisant cette très courtoise offre, M.Tittoni a peut-être envisagé plutôt l’hypothèse – qui semble écartée jusqu’au 16 mai – que la situation particulière de la Suisse vis-à-vis de la Société des Nations devait à nouveau faire l’objet d’une discussion au sein du Conseil. Cependant, la grande importance des deux questions que nous vous signalons plus spécialement, semble justifier une démarche de notre part auprès du Ministère des Affaires étrangères italien.
Pour autant qu’une occasion devrait se présenter, nous vous serions en conséquence reconnaissants d’attirer l’attention de M.Tittoni:
1. Sur le fait que la proportion établie par la Convention postale universelle pour la répartition des frais entre les Etats contractants, proportion qui a été adoptée par le Pacte pour les frais du Secrétariat général de la Société des Nations, imposerait des charges beaucoup trop considérables aux pays avec une petite population, du moment qu’il s’agira de très grands budgets. En effet, la Suisse qui, en vertu de cette proportion, devrait contribuer 15 unités, aurait à supporter des charges beaucoup plus lourdes que celles acceptées par l’Italie par exemple, dont la contribution ne s’élèverait qu’à 25 unités. Dans ces circonstances, vous voudriez bien faire remarquer que toute décision de principe sur les futurs budgets de la Ligue devrait être laissée à l’Assemblée.
2. Ensuite il serait fort utile de faire comprendre à M.Tittoni qu’il pourrait présenter de graves désavantages de préjuger en quelque sorte, lors de la réunion du Conseil à Rome, la question très délicate de l’organisation de l’Assemblée. Sur ce point, nous nous permettons de nous référer à notre lettre du 15 de ce mois.
Il va sans dire que la situation exceptionnelle, dans laquelle nous nous trouvons vis-à-vis de la Société des Nations, avant le jour du vote populaire, nous oblige à observer une très prudente réserve en émettant des suggestions concernant l’activité générale de la Ligue. Dans ces circonstances, nous nous en remettons entièrement à vous pour apprécier si et dans quelle mesure vous voudrez bien faire part à M. Tittoni de nos impressions. Peut-être le jugerez-vous utile de donner à vos observations le caractère de suggestions plutôt personnelles.
Quant à la question de l’admission de nouveaux Etats dans la Société des Nations, que nous vous avons également signalée dans notre lettre du 15 avril3, il ne nous paraît pas indiqué de la soulever à cette occasion. D’après des renseignements que nous venons de recevoir, il semble, en effet, que les Etats dont l’admission sera discutée au cours de la prochaine réunion du Conseil à Rome, ne sont, pour le moment, que le Luxembourg, la République de St-Marin, la Géorgie et l’Islande.