Classement thématique série 1848–1945:
V. ÉMIGRATION
Printed in
Diplomatic Documents of Switzerland, vol. 1, doc. 437
volume linkBern 1990
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Archive | Swiss Federal Archives, Bern | |
Archival classification | CH-BAR#E2200.67-02#1000/675#79* | |
Dossier title | Korrespondenzen (1861–1861) | |
File reference archive | 79 |
dodis.ch/41436
Des citoyens suisses résidant à Rio de Janeiro, au Conseil fédéral1
Les Soussignés, citoyens Suisses résidents à Rio de Janeiro, prennent la liberté de soumettre à l’appréciation du Haut Conseil Fédéral quelques réflexions au sujet d’une question de la plus haute importance pour tous les Suisses qui habitent le Brésil ainsi que pour une grande partie de leurs compatriotes en Suisse qui sont en relations d’affaires avec le Brésil.
Cette question est celle de la Convention Consulaire, conclue le 20 Janvier dernier par l’Envoyé Extraordinaire de la Suisse, Monsieur J. J. de Tschudiau nom du Haut Conseil Fédéral Suisse avec le Gouvernement du Brésil, sous réserve de ratification.2
Les Suisses au Brésil se sont félicités de cette convention et ils attendaient avec anxiété d’un mois à l’autre que, ratifiée par leur Gouvernement, elle devienne un traité définitif. Leurs espérances étaient d’autant plus fondées que par l’Empereur du Brésil la ratification était déjà effectuée et que la célébration de ce traité avait été mentionnée dans le discours de la Couronne, à l’occasion de l’Ouverture des sessions du Corps Législatif de cette année.
Quand par les journaux suisses ils ont vu qu’il n’était fait nulle mention de cette Convention à l’Assemblée Fédérale; quand par des lettres particulières venues de la patrie, ils apprirent que l’opinion du Conseil fédéral n’était pas favorable à la ratification de ce traité, auquel se rattachaient tant d’espérances, ils furent péniblement surpris. – Qu’il leur soit donc permis d’exposer leur crainte que la plus belle occasion de sauvegarder les intérêts suisses au Brésil n’échappe pour peut-être ne plus jamais revenir. Ils doivent à leurs familles et aux intérêts étrangers, qui leur sont confiés d’employer tous leurs efforts pour mettre leur situation présente et future à l’abri d’une pareille éventualité.
Et avant toute chose que le Conseil fédéral leur accorde la satisfaction de résumer la position qu’ils occupent à son égard et les droits qu’ils croient avoir à sa constante bienveillance.
Les Suisses à l’étranger sont tous pénétrés de l’amour le plus vif pour leur patrie; c’est un sentiment que ni le temps ni les lieux, ni aucun changement ne peuvent altérer ou affaiblir. S’ils ne sont pas restés sur le sol natal, la part ou l’intérêt qu’ils prennent à tout ce qui s’y passe, à tout ce qui s’y rattache, augmente en proportion de la distance qui les en sépare. Dans les pays étrangers ce sont eux qui ouvrent à l’industrie Suisse de nouveaux débouchés, qui la développent et la font prospérer. Et lorsqu’ils n’ont pas succombé à une vie de peines, de luttes et d’abnégation, lorsque leur travail a enfin porté quelques fruits, c’est dans la patrie qu’ils se retirent, pour la servir encore par leur expérience et leurs capitaux.
De leur côté aussi, ils sont persuadés que les Autorités Fédérales traitent avec la même sollicitude tous les membres de la grande famille Suisse, soit qu’ils habitent la patrie, soit l’étranger.
Les Suisses au Brésil en particulier en ont eu des preuves en maintes occasions; la plus récente est la mission même confiée à Monsieur de Tschudi. Le choix que le Haut Conseil Fédéral dans sa sagacité a fait dans la personne de Monsieur J. J. de Tschudipour son Envoyé Extraordinaire a été des plus heureux. Monsieur de Tschudia approfondi la situation et les besoins des Suisses au Brésil. Par son mérite personnel il s’est acquis une influence supérieure à celle à laquelle il pouvait prétendre comme représentant d’un petit pays auprès du gouvernement d’une nation, qui sait combien son avenir dépend de l’opinion publique en Europe.
Outre le but général de sauvegarder les intérêts suisses au Brésil, la Mission avait encore celui plus spécial d’améliorer le sort des colons malheureux. Cette partie de la tâche confiée à Monsieur de Tschudi, n’a par sa nature qu’une signification assez relative, et qui disparaît devant l’importance du but général, dans lequel elle est nécessairement comprise.
Le but général est positif; il peut être atteint avec certitude et il a été atteint par la Convention Consulaire.
Aussi les soussignés pourraient-ils se borner à prier instamment le Haut Conseil fédéral de faire approuver et ratifier au moins l’acte le plus important de son représentant au Brésil: – La Convention Consulaire, – d’autant plus que Monsieur de Tschudis’étant trouvé sur les lieux et ayant agi avec circonspection a été certes le mieux placé pour apprécier toutes les circonstances, qui se rattachent à cet acte d’une si grande valeur.
Ils désirent cependant ajouter quelques explications. Dès l’époque de l’indépendance du Brésil les représentants de la Suisse, qui ont eu à coeur le bien de leurs compatriotes, ainsi que des représentants d’autres pays étrangers se sont constamment efforcés à soustraire autant que possible les intérêts de leurs nationaux, les successions surtout, à la juridiction du Brésil, – juridiction assez bonne sans doute dans les lois écrites, mais déplorable dans l’application.
La France, quoique mieux placée à cet égard, par un traité antérieur, que toute autre nation a cependant jugé nécessaire de conclure un nouveau traité consulaire que le Gouvernement Français s’est empressé de ratifier.
Grâce aux circonstances du moment, grâce aux démarches de Monsieur de Tschudi, le Gouvernement du Brésil a accordé à la Suisse une convention identique à celle célébrée avec la France, tandis qu’il ne paraît pas disposé à accorder une concession de même nature à d’autres puissances qui l’ont recherchée.
Or, ne pas accepter les avantages qui ne pouvaient s’obtenir du Brésil que dans des circonstances aussi exceptionnelles, ce serait se livrer indéfiniment aux inconvénients de l’état précaire actuel.
Les avantages obtenus par cette Convention Consulaire sont bien réels, et aux yeux des soussignés leur valeur est incontestable. On ne saurait à juste titre objecter que par le droit de réciprocité, qui nécessairement a dû être stipulé, ces avantages soient compensés, – car la Suisse a des intérêts bien autrement importants au Brésil que le Brésil n’en a en Suisse, ainsi que ce sera aussi plus ou moins le cas avec tous les autres pays étrangers.
Par la convention si des Suisses viennent à mourir soit dans le pays, soit ailleurs en laissant des biens d’une nature quelconque au Brésil, il leur est garanti par l’administration confiée à des Consuls Suisses, d’un côté la stricte éxécution de leur dernière volonté et de l’autre la liquidation impartiale et rapide, ainsi que la remise à qui de droit de leurs fortunes si péniblement acquises; tandis qu’il n’est que trop notoire, que trop prouvé par une longue et navrante liste de successions étrangères recueillies par des autorités brésiliennes, que si elles ne disparaissent pas entièrement, elles ne sont livrées aux héritiers légitimes qu’après des formalités et des vexations incroyables, qu’après des efforts constamment renouvelés et qui absorbent non seulement des semaines, des mois, mais nombre d’années. Encore ce ne sont là que les solutions heureuses.
L’autorité préposée à ces liquidations se complaît dans des refus systématiques surtout dans les provinces de l’Intérieur, et comment en saurait-il être autrement dans un pays qui fait figurer parmi ses recettes annuelles une somme considérable provenant uniquement de successions d’étrangers, dont il s’est réservé l’administration?
De plus, les actes civils, même les testaments que des Suisses auraient à faire et qui jusqu’ici n’avaient de valeur que passés par-devant un notaire du pays, seraient dorénavant parfaitement valables dressés par-devant les Consuls suisses – point qui intéresse surtout les colons et autres Suisses qui ne connaissent suffisamment ni la langue ni les lois du pays.
Par ces dispositions tous les vœux équitables des Suisses au Brésil pour la protection de leurs intérêts se trouveront accomplis. Les autres stipulations, toutes d’après leur opinion faites à l’avantage de la Suisse, sont d’une moindre importance pour eux, et ils en laissent l’appréciation entièrement à la sagacité des Autorités Fédérales. Mais quant au but principal de la Convention, quant aux dispositions précitées, les Soussignés supplient le Haut Conseil Fédéral de les rendre effectifs et de ne pas faire échouer le traité entier par des hésitations sur des points secondaires.
Ils se bornent, pour présenter respectueusement cette demande, aux Signatures des Suisses domiciliés à Rio de Janeiro, sûrs d’avance que leurs compatriotes habitant l’Intérieur du pays s’y adjoindraient, si le temps et les distances le leur permettaient, avec un empressement d’autant plus grand que leurs intérêts sont encore moins bien sauvegardés que ceux des habitants de la Capitale.
Ils se réfèrent en outre pour de plus amples informations à tous leurs compatriotes qui ont déjà habité le Brésil et qui résident actuellement en Suisse et notamment à
[...]3
Les soussignés saisissent cette occasion pour prier Monsieur le Président et Messieurs les Membres du Conseil fédéral, d’agréer l’assurance de leur haute considération et de leur constant dévouement.
- 1
- Lettre: E 2200, Rio de Janeiro 79.↩
- 2
- Non reproduite. Cette convention ne fut pas ratifiée. Cf. RG 1864, p. 23.↩
- 3
- Für die Tabelle vgl. dodis.ch/41436. Pour le tableau, cf. dodis.ch/41436. For the table, cf. dodis.ch/41436. Per la tabella, cf. dodis.ch/41436.↩
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