dodis.ch/47083
Le Général
H. Guisan à tous les membres de l’Armée
1 ORDRE D’ARMÉE
Quartier Général de l’Armée, 2 juillet 1940
Au moment où une partie de nos effectifs vont être licenciés et mis de piquet, tandis que le gros de nos troupes demeurera sous les armes, je mets l’Armée en garde contre les dangers qui la guettent, à l’intérieur comme de l’extérieur.
Le premier danger, c’est un excès de confiance dans la situation internationale. L’armistice n’est pas la paix. La guerre continue entre l’Allemagne, l’Italie et l’Angleterre. D’un jour à l’autre, elle peut se rallumer en des pays nouveaux, se rapprocher de nous et menacer notre territoire.
Le second danger, c’est un manque de confiance en notre force de résistance. Sans doute, l’expérience des dernières batailles vient de révéler l’efficacité des nouvelles méthodes offensives: des armées bien plus puissantes que la nôtre ont été battues.
Mais ce n’est pas une raison pour nous abandonner au défaitisme et douter de notre mission.
Nous possédons un moyen de défense des plus efficaces: notre terrain. Il complète la force et le nombre de nos armes, et, si nous savons en tirer le meilleur parti, il constituera, lui aussi, entre nos mains, une défense redoutable.
La guerre a montré que les escarpements, les gorges qui abondent dans nos forêts et nos montagnes, sont des obstacles infranchissables aux chars. Ils nous offrent aussi une sérieuse protection contre les attaques aériennes.
Mais il ne suffit pas de compter sur cet avantage. Il faut garder un moral solide et un cœur fier.
Lors même que nous ne devions pas remporter une victoire immédiate, nous nous battrons. Nous disputerons notre terrain pied à pied, et nous sauverons l’honneur de l’Armée et du Pays.