Classement thématique série 1848–1945:
II. RELATIONS BILATÉRALES
A. AVEC LES ÉTATS LIMITROPHES
3. Italie
3.3. Transports, transit, douanes
Printed in
Diplomatic Documents of Switzerland, vol. 13, doc. 17
volume linkBern 1991
more… |▼▶Repository
Archive | Swiss Federal Archives, Bern | |
▼ ▶ Archival classification | CH-BAR#E7110#1967/32#28792* | |
Old classification | CH-BAR E 7110(-)1967/32 1225 | |
Dossier title | Verhandlungen, Verschiedenes (1939–1939) | |
File reference archive | 821 • Additional component: Italien |
dodis.ch/46774
Le Ministre de Suisse à Rome, P. Ruegger, au Directeur de la Division du Commerce du Département de l’Economie publique, J. Hotz1
Ainsi que nous vous l’avons fait savoir hier par téléphone, le Sénateur Giannini a fait demander, il y a trois jours, à la Légation, si j’avais reçu des instructions des Autorités fédérales au sujet des déclarations qu’il m’avait faites en ce qui concerne la «dénonciation des Accords»2.
Nous avons insisté pour savoir exactement quelles étaient les clauses contractuelles auxquelles le Ministère des Affaires Etrangères faisait allusion et on nous a dit qu’il s’agissait des dispositions visant le dédouanement à la frontière italo-suisse. Nous vous avons communiqué cette réponse et vous nous avez répondu3 qu’elle ne vous paraissait pas suffisamment claire pour vous prononcer d’une façon définitive sur la question. Avant-hier soir, M. Giannini ayant fait de nouveau demander si nous avions reçu vos instructions, nous vous avons téléphoné hier et vous nous avez dit que vous désiriez connaître d’une façon précise quelles étaient les dispositions que l’Italie aimerait modifier ou supprimer.
J’ai donc envoyé au Ministère des Affaires Etrangères mon collaborateur pour les Affaires Commerciales4, afin qu’il transmette votre réponse au remplaçant de M. Giannini qui, pour le moment, est M. Formichella. Ce dernier a essayé de mettre M. Fumasoli en contact direct avec le Sénateur Giannini, qui était en séance de négociation, mais M. Giannini a préféré envoyer M. Bagli. Ce dernier et M. Formichella ont donc précisé que l’Italie désirait supprimer purement et simplement l’échéance de notes du 27 janvier 19235 entre le Chef du Département de l’Economie publique et le Ministre d’Italie à Berne, concernant les opérations douanières relatives aux expéditions en service international, à la frontière italo-suisse.
Nous devons ajouter que M. Bagli a essayé d’être aussi objectif que possible en exposant les motifs qui poussaient le Gouvernement italien à demander à la Suisse la renonciation aux concessions renfermées dans l’échange de notes précité. Nous ne reviendrons pas sur son long discours, mais nous voulons encore une fois retenir les deux arguments qu’il avait déjà rappelés dans d’autres occasions et sur la base desquels la Commission interministérielle a enfin accepté de nous saisir de la question. Il s’agit des deux arguments suivants:
1° L’échange de notes italo-suisses du 27 janvier 1923 est, pour l’Italie, la source d’un dommage matériel grave, parce que - par une politique certainement très habile et sur laquelle les Autorités italiennes s’abstiennent de porter un jugement - la Suisse (chemins de fer et maisons d’expédition) a concentré à Chiasso un nombre énorme d’opérations douanières qui devraient normalement avoir lieu dans d’autres douanes. Ces opérations ont pris une telle importance et une telle envergure que l’Administration italienne ne voit plus comment y faire face, bien qu’elle ait, depuis 1923, triplé le personnel. Il est impossible pour l’Administration de créer un outillage technique suffisant pour que les opérations que l’on a concentrées à Chiasso puissent être effectuées d’une façon normale. Les maisons d’expédition ont fourni une preuve éclatante des irrégularités extrêmement graves qu’elles pouvaient commettre à cause justement de la désorganisation forcée de la gare internationale.
2° Toutefois, le motif principal de la nouvelle attitude de l’Italie, en ce qui concerne la réglementation du dédouanement au point frontière italo-suisse, doit être recherché dans de graves difficultés d’ordre international. La France a exigé un régime analogue à la gare de Modane. L’Italie a affirmé qu’elle ne pouvait pas accéder à cette demande et la France a répondu en jetant sur le pavé 300 familles italiennes qui travaillaient à la gare de Modane, en disant qu’elles auraient pu reprendre leur travail lorsque la France aurait été traitée comme la Suisse (je me réserve d’éclaircir ce point aujourd’hui ou demain, à l’Ambassade de France)6. Ce que vient de faire la France - disent les Italiens - d’autres pays peuvent le faire dans un avenir rapproché, sur d’autres points de la frontière italienne. Il n’est donc plus possible pour l’Italie de maintenir à la frontière suisse les concessions contenues dans l’échange de notes dont il s’agit et elle doit nous demander de revenir au régime de la Convention internationale de Berne, aux termes de laquelle les opérations douanières doivent être accomplies par les agences en douane des chemins de fer de chaque pays.
Nous n’entrerons pas dans le détail de notre réponse à MM. Formichella et Bagli. Nous avons d’abord insisté sur le fait que l’échange de notes en question faisait partie intégrante du Traité de commerce de 1923. Vous nous aviez, en effet, confirmé hier encore dans cette opinion. Nos deux interlocuteurs ont essayé de nous démontrer que ce point de vue était très difficile à soutenir et que tout le Traité de commerce de 1923, y compris son article 15, pouvait très bien rester ferme, malgré la suppression de l’échange de notes dont nous parlons. Nous avons insisté de nouveau sur notre argumentation consistant à affirmer que le Traité de 1923, dans son ensemble, avait valu à l’Italie d’énormes avantages, qu’il avait amené notre pays à suivre vis-à-vis de l’Italie une politique commerciale dont le Royaume ne pouvait pas oublier les conséquences heureuses pour lui en toutes occasions et qu’on ne pouvait pas venir nous dire tout à coup que l’Italie désirait supprimer - dans le Traité lui-même - le seul point qui lui déplaisait, pour maintenir toutes les autres clauses. Nous avons particulièrement insisté sur l’importance de l’organisation de Chiasso, surtout du point de vue social, pour toute une région de la Suisse et sur les conséquences très graves d’une modification fondamentale apportée à l’improviste à ce régime.
Nos deux interlocuteurs nous ont répondu qu’ils comprenaient très bien nos difficultés, mais que l’Italie devait insister dans son attitude et que le Ministère des Affaires Etrangères désirait recevoir à brève échéance une réponse quant à sa demande de suppression de l’échange de notes du 27 janvier 1923.
J’ajoute encore que j’ai eu l’occasion d’entretenir, hier, personnellement M. D’Agostino, Chef de la Direction Générale des Devises, de notre surprise au sujet des difficultés que l’Italie paraissait vouloir nous faire en ce qui concerne les opérations de dédouanement et des conséquences qui découleraient de ces difficultés pour l’ensemble de nos relations commerciales. M. D’Agostino m’a répondu que cette question avait été discutée au sein de la Commission Interministérielle lorsqu’il était absent. Je ne doute pas qu’il pourra insister au sein de ladite Commission sur la nécessité pour l’Italie de ne pas compromettre l’ensemble de nos Accords pour le point particulier dont il s’agit. Evidemment, il est difficile de dire jusqu’à quel point on écouterait cette personnalité pourtant très influente. Je ne sais pas non plus si vous avez réellement l’intention de lier en quelque sorte la question de l’échange de notes du 27 janvier 1923 à celle du Traité de commerce et des Accords économiques en général. Pour le moment, nous l’avons fait dans un but de tactique, dans l’attente de vos instructions, après une étude approfondie de l’ensemble du problème.
Je relève encore que mon collaborateur pour les Affaires économiques a, de son côté, entretenu M. Masi, Directeur Général pour le Commerce Extérieur, des ouvertures qui nous ont été faites par le Ministère des Affaires Etrangères et de la pénible impression qu’elles nous avaient causée. M. Masi s’est borné à répondre que, quant à lui, «il avait conseillé de faire grand’attention».
Pour résumer, nous avons exposé hier aux fonctionnaires auxquels nous avons fait allusion au début de ce rapport, que l’Administration italienne devait se rendre compte qu’il s’agissait d’une question d’une importance très grande et qu’elle ne pouvait pas s’attendre à recevoir de nous une réponse prochainement7. Les dits fonctionnaires nous ont exposé qu’ils comprenaient fort bien cette objection, mais que l’Italie avait réellement besoin de connaître au plus tôt notre manière de voir, attendu qu’elle est constamment en négociation avec des pays étrangers vis-à-vis desquels elle doit pouvoir soutenir un point de vue précis à propos des opérations de dédouanement.
Tags