Classement thématique série 1848–1945:
II. RELATIONS BILATÉRALES
A. AVEC LES ÉTATS LIMITROPHES
3. Italie
3.3. Transports, transit, douanes
Imprimé dans
Documents Diplomatiques Suisses, vol. 13, doc. 4
volume linkBern 1991
Plus… |▼▶Emplacement
Archives | Archives fédérales suisses, Berne | |
▼ ▶ Cote d'archives | CH-BAR#E2200.19-01#1000/1723#2* | |
Ancienne cote | CH-BAR E 2200.19-01(-)1000/1723 1 | |
Titre du dossier | Dénonciation de l'Accord italo-suisse et Statut de Chiasso (1935–1940) | |
Référence archives | A.b.l |
dodis.ch/46761
Le Ministre de Suisse à Rom e, P. Ruegger, au Chef du Département de l’Economie publique, H. Obrecht1
A la fin de la semaine dernière, le Sénateur Amedeo Giannini, Directeur Général des Affaires Commerciales au Ministère des Affaires Etrangères, m’avait convoqué pour m’entretenir d’une série d’affaires au sujet desquelles nous renseignerons séparément la Division du Commerce.
A la fin de l’entretien, il m’a toutefois fait une communication d’une certaine gravité touchant la base de nos Accords commerciaux avec l’Italie. Il m’a dit que jusqu’ici le Ministère des Affaires Etrangères avait réussi à «retarder» toute décision quant à une proposition de l’Administration italienne des douanes qui demande avec insistance la dénonciation de nos Accords (il s’agit évidemment du Traité de commerce de 1923 même)2, en raison des difficultés pour l’Italie d’appliquer dans le domaine du dédouanement la clause de la nation la plus favorisée et vu aussi la situation spéciale, à la douane internationale de Chiasso, qui s’était créée au cours des derniers mois.
[...]3
Il va de soi que j’ai très vivement réagi en demandant à l’Ambassadeur Giannini de reporter l’affaire devant le Comité interministériel en faisant valoir tous les arguments dont le Ministère des Affaires Etrangères peut se servir mieux que d’autres dicastères. En effet, lui ai-je expliqué, il faut bien réfléchir du côté italien, avant de vouloir ouvrir des négociations sans doute très longues et de dénoncer un Accord qui durant plus de 15 ans a été favorable à l’Italie. Je lui ai fait allusion aux efforts faits par l’Administration fédérale et par des groupements suisses intéressés pour augmenter les achats en Italie d’une manière qui permettrait d’alléger le clearing. Tout ce courant favorable d’achats risquerait évidemment d’être compromis si nous nous trouvions en face d’une décision brusque et difficilement soutenable des Autorités italiennes. Au surplus, j’ai fait appel aux souvenirs personnels de M. Giannini en lui demandant s’il n’était pas convaincu, comme je l’étais, des désavantages psychologiques résultant au point de vue des innombrables affaires en cours entre les deux pays, de négociations très longues et par la force des choses fort dures car, il est évident que la Suisse aussi en cas de dénonciation du Traité de commerce doit ouvrir complètement les dossiers renfermant ses griefs et ses exigences. Enfin j’ai pu me servir d’une dernière arme qui, en ce moment, est de nature à impressionner les Italien s: il s’agit des nombreux crédits suisses à des banques italiennes et même à l’Istcambi pour un montant qui a été autrefois couvert par la France, les Etats-Unis et la Grande-Bretagne. En effet, sur la base de critères qui nous échappent mais au sujet desquels la Banque Nationale pourra, sans doute, obtenir des précisions, nos banques suisses se sont substituées à la banque des trois puissances susmentionnées dans l’octroi de crédits à court et à moyen terme. M. Giannini savait que des représentants de nos grandes banques auront à la fin de ce mois même des contacts en très haut lieu, au sujet de la prolongation éventuelle d’une partie des crédits en question. Il était donc sans aucun doute très frappé par ma déclaration qu’à l’avenir l’on ne saurait guère scinder du côté suisse les affaires commerciales et financières et que des mesures peut-être défavorables pour nous au point de vue économique (ou qui apporteraient du moins un certain trouble durant la période des négociations) ne resteraient sûrement pas sans répercussion sur les dispositions de la finance suisse, désormais en contact étroit avec la Banque Nationale dans sa politique de crédit. En conclusion M. Giannini m’a promis de ne pas considérer la «décision» du Comité interministériel comme définitive, mais de reporter toute la question devant cet organisme. A cet effet, le Ministère des Affaires Etrangères souhaiterait, toutefois, pour faire valoir nos arguments à vrai dire assez convaincants, pouvoir se baser sur un exposé de notre point de vue qui lui serait remis par la Légation. Je vous demande donc de vouloir bien nous autoriser à remettre à M. Giannini, au cours d’un nouvel entretien que je devrai avoir, si possible, dans les 10 jours avec lui en présence de M. Fumasoli, un exposé qui, à mon sens, doit essentiellement résumer mes déclarations verbales provisoires auxquelles, bien entendu, je vous serais reconnaissant d’ajouter les éléments qui vous paraîtront indiqués. De toute manière, il me semble indispensable, dans l’état actuel de la situation, de pouvoir faire comprendre que selon le développement prochain et l’attitude du Comité interministériel italien, la Banque Nationale encouragera ou n’encouragera point la finance suisse dans la continuation sur la même échelle, de la politique de crédit envers l’Italie4.
- 1
- Lettre (Copie): E 2200 Rom 23/1.↩
- 2
- Cf. FF, 1923, I, pp. 253 ss.↩
- 3
- Suivent quelques exemples de maisons d’expédition de Chiasso qui ont essayé de frauder la douane italienne durant les années de validité du traité, notamment au cours du deuxième semestre de 1938.↩
- 4
- Le renouvellement de ces crédits accordés notamment par le Crédit Suisse et la Société de Banque Suisse fait l’objet d’un échange de correspondance entre la Légation de Suisse à Rom e, la Division du Commerce du Département de l’Economie publique et la Banque nationale au début de 1939, cf. E 2001 (D)2/268.Sur l’attitude des banques suisses, cf. E 2001 (D) 1/221 (notamment le procès-verbal de la séance du 7 juin 1939 du «Comité Italie» de l’Association suisse des banquiers).↩
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