Classement thématique série 1848–1945:
I. LA SUISSE ET LA SOCIÉTÉ DES NATIONS
I.11 FILMS ÉDUCATIFS
Pubblicato in
Documenti Diplomatici Svizzeri, vol. 12, doc. 178
volume linkBern 1994
Dettagli… |▼▶Collocazione
Archivio | Archivio federale svizzero, Berna | |
Segnatura | CH-BAR#E2001D#1000/1554#347* | |
Titolo dossier | Institut international du film éducatif à Rome (1928–1938) | |
Riferimento archivio | E.651.60 |
dodis.ch/46438 La Division des Affaires étrangères du Département politique, au Chef du Département de l’Intérieur, Ph. Etter1
Nous avons eu l’honneur de recevoir la lettre No VI. 14, du 8 janvier2, par laquelle vous appelez notre attention sur le prix qu’attacheraient certains milieux suisses, notamment à Zurich, à reprendre l’activité de l’Institut international du cinéma éducatif à Rome, activité à laquelle il a été mis fin à la suite de la sortie de l’Italie de la Société des Nations. Vous nous demandez si nous serions prêts à examiner ce qu’il y aurait lieu d’entreprendre à l’effet d’obtenir, le cas échéant, le siège de cette institution en Suisse, notre pays ayant des titres incontestables et incontestés pour prendre ou reprendre, en ce domaine, la place qu’occupait l’Italie.
Au moment où nous recevions votre lettre, M. Klôti, Président de la Ville de Zurich, nous demandait une audience - que nous lui avons volontiers accordée - pour insister, de son côté, sur l’intérêt qu’il y aurait à instituer à Zurich un nouvel institut international du film d’enseignement. Nous n’avons pu que lui faire savoir que nous examinerions la question avec votre Département, quitte à en saisir ultérieurement, s’il y avait lieu, le Conseil fédéral. Il nous a remis, à cette occasion, une lettre du «Verkehrsverein» de Zurich, dont vous trouverez la copie sous ce pli.
Le problème est important. Point n’est besoin d’insister sur les avantages, moraux et matériels, que nous vaudrait le fait de devenir en quelque sorte le centre du mouvement mondial en faveur du film éducatif. A l’heure où nous examinons les moyens de recouvrer définitivement notre neutralité intégrale dans le cadre de la Société des Nations, il ne serait pas sans importance que la Suisse marquât son souci de la collaboration internationale dans des domaines où notre statut politique ne risque pas d’être mis en jeu. Une institution comme la Croix-Rouge nous a valu et nous vaut encore d’indiscutables sympathies au dehors. Dans le domaine culturel, l’activité en Suisse d’une institution comme le Bureau international d’éducation - dont nous ne reconnaissons peut-être pas suffisamment la valeur - ajoute, si l’on peut dire, à la figure morale de notre pays. Il en serait certainement de même d’une institution comme celle du cinéma éducatif. Neutralité ne doit pas signifier isolement, et la Suisse, qui vit d’ailleurs de ses échanges avec l’étranger, a tout à gagner en apportant sa contribution directe à l’œuvre de la civilisation en général.
Si le problème est du plus haut intérêt pour nous, il est cependant extrêmement délicat. Nous savons qu’officiellement, l’Institut de Rome n’existe plus, et il ne pouvait plus subsister en raison des liens étroits qui le rattachaient à la Société des Nations. Mais nous ignorons encore tout des intentions de l’Italie; elle n’est peut-être pas résignée à s’effacer complètement d’une scène sur laquelle elle tenait, ces dernières années, un premier rôle. Il se peut qu’elle ait conçu certains projets à cet égard. Il serait, par conséquent, indiqué de ne pas nous engager sans une extrême prudence dans la voie d’une succession qui est à peine ouverte. On ne verrait peut-être pas d’un bon œil à Rome une hâte excessive de notre part à nous mettre sur le rang des compétiteurs.
Cela étant, nous devrions, avant de rien entreprendre, nous enquérir des sentiments des milieux italiens et, pour ce faire, nous hésiterions à recourir à une intervention, même discrète, de notre Légation. Une démarche quelconque pourrait nous donner la fâcheuse apparence d’un Etat avide de recueillir un peu prestement, à la faveur des circonstances, un héritage dont, de toutes façons, l’Italie ne se dépouillera pas sans quelque regret. Pour ne froisser aucune susceptibilité et agir avec autant de tact que de circonspection, nous serions assez disposés à charger un de nos collaborateurs de s’entretenir de la question, à titre tout personnel et quasi fortuitement, avec l’ancien Directeur de l’Institut, M. de Feo. Ce dernier serait sans doute sensible à cette attention et s’ouvrirait avec d’autant plus de bonne grâce sur la situation créée par la rupture de son gouvernement avec Genève.
D’un autre côté, il importe de souligner que la Suisse n’aurait pas un réel intérêt à remettre sur pied une institution dont la destinée serait intimement liée à celle de la Société des Nations. Nous ne voyons pas bien la Confédération patronner une institution qui, du chef de ses rapports avec la Société des Nations, s’aliénerait d’emblée la collaboration active de nos grands voisins, l’Allemagne et l’Italie. Ce ne serait guère conforme à notre politique de neutralité. Nous ne pourrions guère songer à créer chez nous un centre du film éducatif dont le caractère neutre ne serait pas internationalement reconnu et dont l’activité porterait ombrage à certains Etats dissidents. Dans les circonstances actuelles, un institut du cinéma éducatif avec siège en Suisse devrait être indépendant de tout contrôle de la Société des Nations. Or il n’obtiendrait sa pleine autonomie que s’il était organisé sur la base d’une convention internationale à laquelle pourrait participer tout Etat, qu’il soit membre ou non de la Société des Nations. Procéder autrement serait nous priver fatalement du concours et de la sympathie de grands Etats avec lesquels nous désirons entretenir les meilleurs rapports. Si l’Italie ne s’est pas vue en état de maintenir son Institut en raison de ses attaches avec la Société des Nations, on ne voit guère comment elle coopérerait avec une autre institution qui, à ses yeux, serait marquée, dès sa naissance, du même vice rédhibitoire.
Avant d’être fixés, d’une façon ou d’une autre, sur la manière de voir des autorités italiennes, nous croyons qu’il serait prématuré d’examiner d’ores et déjà quelles pourraient être, au point de vue financier, les prestations qu’entraînerait pour la Confédération la création, sur son territoire, d’un institut international du film éducatif.
Pour ce qui est du siège, Zurich se met nettement en avant. On ne parle d’ailleurs pas jusqu’ici d’une autre candidature. Cela ne laisse toutefois pas de nous surprendre, car nous avions toujours pensé que Bâle, qui avait créé une Chambre européenne du film d’enseignement et qui s’était assez amèrement plainte d’avoir été évincée par Rome d’un domaine où elle croyait avoir joué un rôle de pionnier, ne se laisserait pas distancer par nos compatriotes zurichois dans cette course à la succession romaine. Il n’est cependant pas impossible que, se rappelant ses mérites passés, Bâle émette bientôt des prétentions rivales. Un avenir prochain nous apprendra sans doute s’il convient d’interpréter son silence comme un désistement pur et simple en faveur de la cité de la Limmat.
Quant à la conférence qui se réunira à La Haye le 28 janvier et dont vous avez eu, comme nous, des échos par un entrefilet du «Bund», nous n’avons reçu aucune communication à ce sujet. Nous doutons qu’il s’agisse d’une conférence de gouvernements; il doit plutôt s’agir d’une réunion de caractère privé à laquelle auront été conviés des spécialistes du film d’enseignement. Nous demanderons des précisions à notre Légation à La Haye.
En nous réservant de vous faire prochainement une nouvelle communication à ce sujet, nous vous présentons [...]3.
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