Classement thématique série 1848–1945:
II. LES RELATION BILATÉRALES ET LA VIE DES ÉTATS
II.14. ITALIE
II.14.1 QUESTIONS DE POLITIQUE GÉNÉRALE ET BILATÉRALE
Printed in
Diplomatic Documents of Switzerland, vol. 12, doc. 117
volume linkBern 1994
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Archive | Swiss Federal Archives, Bern | |
▼ ▶ Archival classification | CH-BAR#E2300#1000/716#913* | |
Old classification | CH-BAR E 2300(-)1000/716 398 | |
Dossier title | Rom, Politische Berichte und Briefe, Militärberichte, Band 37 (1937–1937) |
dodis.ch/46377
La détente qui s’est esquissée depuis plusieurs semaines dans la situation européenne, et qui a été favorablement influencée par la trêve estivale, devrait raisonnablement s’accentuer encore après le discours prononcé hier par le Duce dans la capitale de la Sicile. Plus que dans d’autres grandes Puissances, les discours du Chef du Gouvernement ont l’habitude, en Italie, soit de marquer des tournants décisifs de la politique internationale, soit de faire de manière complète le point de la situation, en soulignant les possibilités d’avenir. Le discours de Palerme, sobre dans ses termes, souligne en tous cas que l’Italie est prête à rentrer effectivement, au moment où deux guerres ensanglantent le monde, dans le champ de la collaboration avec toutes les Puissances européennes et, en particulier, avec les pays de la Méditerranée. Le ton de tout le discours de Palerme était calculé pour atteindre, dans sa deuxième partie ayant trait aux relations internationales, les pays étrangers. Si d’habitude le Duce parle librement en apportant parfois à la dernière minute, dans ses colloques avec la foule, des modifications à ses notes, il n’en a pas été de même à Palerme, d’où les traductions dans de nombreuses langues, préparées à l’avance, ont été lancées sans délai, d’après les arrangements pris par le Ministère de la culture populaire. Aussi cet «appel à la paix» est-il rédigé dans un esprit bien plus conciliant et constructif que les articles encore récents du Duce dans le «Popolo d’Italia», qui eurent cet été un si vaste retentissement. On ne se trompe guère en admettant que la partie internationale du discours a été pesée, terme par terme, en collaboration avec le Ministre des Affaires Etrangères et en tenant compte du désir, exprimé à Rome comme à Londres, de faciliter les pourparlers anglo-italiens du mois prochain.
Nous pouvons enregistrer avec une réelle satisfaction les paroles brèves et cordiales que M. Mussolini consacre à notre pays. Vous vous souvenez que le Chef du Gouvernement italien réservait en général ses déclarations sur les rapports italo-suisses à ses discours de Milan, en proximité de notre frontière. Il faut donc apprécier qu’il soit revenu sur ce sujet dans l’appel qu’il vient de lancer de la Sicile. A vrai dire, ayant rencontré, il y a quelques jours, le Comte Ciano, j’avais eu l’impression qu’à la suite de vos récentes déclarations devant les Chambres Fédérales, M. Mussolini tiendrait, de son côté, à confirmer à nouveau l’amitié italo-suisse (si je ne vous ai pas fait part de cette impression, c’est parce qu’en cette matière il vaut mieux relater des faits que des hypothèses). Mais ce qui a frappé les fonctionnaires italiens qui écoutaient le discours au Ministère des Affaires Etrangères, c’est le ton particulièrement cordial employé par M. Mussolini et le fait que le mot «amitié» (relazioni più ehe amichevoli) est employé seulement vis-à-vis de notre pays. Déjà à propos du discours de Milan de novembre dernier, je vous avais signalé l’importance psychologique des paroles du Duce, qui ont le caractère de directives, sur l’administration, sur les syndicats et sur tous les organes avec lesquels notre grande colonie en Italie est en rapport.
C’est aujourd’hui que nous pouvons mesurer le chemin parcouru, grâce à l’attitude sage, prudente et bienveillante de la Suisse, depuis une année. Je ne parle pas du fait, peut-être fortuit, mais tout de même significatif, que pour la première fois, selon mes souvenirs des dernières années, nous avons presque fini à traverser l’été sans un de ces incidents qui étaient jadis à l’ordre du jour. Au moment où les grands adversaires d’hier vont, comme il le faut espérer, se réconcilier, on se souvient ici, il fallait le prévoir, de l’attitude doctrinaire des Etats du Nord, des Pays-Bas, de la Belgique et d’autres. D’un autre côté, notre politique rigide de neutralité a forcé le respect. Il faut évidemment tout essayer pour maintenir cette atmosphère, qui constitue en elle-même une garantie morale importante pour notre pays, tout en continuant à défendre avec fermeté les intérêts légitimes du pays et de nos compatriotes, sans toutefois «user» notre crédit pour des prétendus avantages aléatoires et de courte durée.
A propos de nos relations futures avec l’Italie, des observateurs sérieux en Suisse et dans notre colonie en Italie ont exprimé la crainte qu’après le rétablissement éventuel de l’entente entre les grandes Puissances, notre prestige pourrait à nouveau diminuer ici, et que les polémiques et incidents d’autrefois pourraient renaître. Je garde l’espoir que tel ne sera pas le cas. Tourné vers l’Impero et actuellement saturé au point de vue colonial, le Gouvernement italien peut plus facilement mettre en œuvre les bonnes dispositions du Ministère des Affaires Etrangères dans la lutte contre l’irrédentisme, pour ne parler que d’une question qui appelle notre vigilance. Nous trouvons d’ailleurs une indication de cette volonté dans la phrase suivante prononcée hier par M. Mussolini à Palerme: «È su queste direttive ehe noi tendiamo a migliorare le relazioni sopratutto con gli Stati confinanti».
Epaulée aux Alpes et désireuse de raffermir les rapports de bon voisinage dans le Nord, l’Italie nouvelle tourne ses regards vers la Méditerranée.
- 1
- E 2300 Rom, Archiv-Nr. 37. Le discours de Palerme de M. et la Suisse.↩