Abgedruckt in
Diplomatische Dokumente der Schweiz, Bd. 11, Dok. 198
volume linkBern 1989
Mehr… |▼▶Aufbewahrungsort
Archiv | Schweizerisches Bundesarchiv, Bern | |
▼ ▶ Signatur | CH-BAR#E2200.19-01#1000/1722#7* | |
Alte Signatur | CH-BAR E 2200.19-01(-)1000/1722 6 | |
Dossiertitel | Irrédentisme, volume 2 (1932–1937) | |
Aktenzeichen Archiv | 1.C.4 |
dodis.ch/46119
Pour faire suite à la correspondance échangée entre nous au sujet de l’affaire Colombi et consorts, nous avons l’honneur de vous faire connaître que le Juge d’instruction fédéral, M. Arturo Weissenbach, a terminé le 30 novembre son enquête au sujet des menées irrédentistes du groupe de l’Adula et a dressé à cette date son rapport final2 au Ministère public fédéral. Ce rapport est un document de cent trente-cinq pages dactylographiées, qui résume lui-même une documentation de plusieurs milliers de pages dont l’étude par le Procureur de la Confédération exigera quelque temps encore. Colombi et Teresa Bontempi, qui, ainsi que vous le savez, ont été détenus pendant plusieurs mois, sont actuellement en liberté sous caution, de sorte que l’affaire peut suivre son cours sans hâte exceptionnelle et que ce ne sera sans doute que dans quelques semaines que M. Stämpfli, à qui il appartient de décider si l’affaire doit être portée ou non devant la Chambre d’accusation du Tribunal fédéral, prendra une décision.
Il ne nous paraît pas possible, toutefois, de différer jusque-là la démarche qu’il est nécessaire de faire auprès des Autorités italiennes touchant les menées irrédentistes au Tessin, démarche que vous avez déjà annoncée à M. Mussolini et qui doit faire suite à l’entretien que vous avez eu avec le Chef du Gouvernement italien le 3 août dernier3. Nous voyons, au demeurant, certains avantages à ce que cette démarche soit faite dans l’état actuel de la procédure, c’est-à-dire à un moment où nous ne pouvons formuler aucune indication sur les mesures qui seront prises en Suisse contre Colombi et ses complices. Il nous semble, d’autre part, que les conjonctures présentes sont assez favorables pour faire entendre à Rome que les relations italo-suisses seraient gravement menacées par la poursuite des objectifs que s’était proposés le groupe de l’Adula et qu’il est nécessaire d’y mettre fin. Nous attacherions, au surplus, du prix à ce que cette démarche pût être faite par vous et non par votre successeur4, puisqu’il s’agit d’achever une conversation que vous avez vous-même abordée dans le courant de l’été.
L’enquête du Juge d’instruction fédéral a précisé maints aspects des agissements de Colombi et de ses complices, mais n’a rien apporté de substantiellement nouveau qui ne figurât pas déjà dans le dossier constitué par le Commandant de la Police tessinoise5 que vous avez bien voulu étudier au cours de votre séjour à Graechen. C’est du dossier que vous connaissez, et de lui seul, que ressortent les données que nous possédons au sujet des intelligences que Colombi avait nouées en Italie et des encouragements qu’il a trouvés auprès des pouvoirs publics italiens. Vous êtes donc déjà complètement orienté sur les faits sur lesquels il convient d’attirer l’attention de M. Mussolini et il est, par conséquent, inutile pour nous d’y revenir.
La démarche à effectuer par vous auprès de M. Mussolini pourrait, à notre avis, consister à lui remettre un aide-mémoire s’inspirant du projet ci-joint6, ainsi que les copies des lettres émanant de personnalités italiennes saisies chez Colombi, au cours d’une conversation dont les lignes générales ont déjà été tracées par notre lettre du 5 août dernier. Nous avons intérêt, vis-à-vis de M. Mussolini, à attribuer à Colombi lui-même l’initiative de toutes les intrigues dont nous avons eu à nous plaindre au cours de ces dernières années. Ceci correspond d’ailleurs à l’impression dont nous vous avons fait part à maintes reprises cet été. Nous persistons à ne pas croire à l’existence en Italie d’un foyer central de propagande irrédentiste, auquel le soi-disant «Comité de Varese» a pu faire penser un instant. Colombi n’est certainement pas l’inventeur de l’irrédentisme au Tessin, qui avait déjà été caressé par d’autres avant lui, en particulier par le père de Teresa Bontempi7, mais c’est incontestablement lui qui, apparemment dans un but de lucre, a poursuivi de ses sollicitations les personnalités italiennes les plus diverses et a ourdi le réseau d’intrigues dont la lecture du rapport Ferrario vous aura donné une idée assez nette. Nous ne pouvons donc faire grief au Gouvernement italien – et nous nous en félicitons – d’aucune initiative dans ces menées, que le discours prononcé en 1928 par M. Mussolini8 semblait avoir définitivement condamnées. Nous pouvons, en revanche, reprocher aux auteurs des lettres dont vous remettrez la copie au Chef du Gouvernement italien de s’être un peu trop aisément laissés duper par un agitateur. Nous pouvons, en particulier, nous étonner que deux Ambassadeurs d’Italie, MM. Pignatti et Marchi, aient pu écrire à Colombi sur le ton qu’ils ont adopté. C’est dans ce sens qu’est rédigé l’aide-mémoire qu’il vous sera sans doute facile de paraphraser.
Ce que nous n’avons pas jugé devoir mettre par écrit et qu’il conviendra tout de même de faire entendre à M. Mussolini, c’est qu’il s’est lui-même bien inconsidérément laissé aller à donner à Colombi des encouragements qu’il ne méritait pas en lui accordant à diverses reprises des audiences dont Colombi n’a pas manqué de se targuer.
Votre démarche aura pleinement atteint son but s’il vous est possible d’obtenir l’assurance du Chef du Gouvernement italien que lui-même sera plus circonspect à l’avenir et l’autorisation de faire publiquement état de sa désapprobation à l’égard des institutions officielles ou d’intérêt public en Italie qui n’ont pas su refuser leur appui moral et financier à un aventurier en réalité fort peu intéressant.
- 1
- Lettre: E 2200 Rom 22/6. Paraphe: JF.↩
- 2
- Cf. E 4320 (B) 1/23.↩
- 3
- Cf. no 141.↩
- 4
- P. Ruegger. Cf. no 194, n. 4.↩
- 5
- G. Ferrario.↩
- 6
- Non reproduit (E 2001 (C) 4/102).↩
- 8
- Cf. annexe au no 199.↩
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Irredentismus im Tessin (1876–1942)