dodis.ch/43719
L'Adjoint à la Division des Affaires étrangères du Département politique, O.Pinôsch, au Chargé d’affaires de Suisse à
Washington, F.
Öderlin1
Confidentielle
Berne, 4 septembre 1918
Pour faire suite à notre télégramme no 87 de ce jour, nous avons l'honneur de vous exposer que, depuis plusieurs mois déjà, le Conseil fédéral se préoccupait de la situation difficile que faisaient au commerce suisse les mesures d'interdiction de commerce édictées par les Alliés.
Sur le rapport dont nous vous communiquions à titre confidentiel, et pour votre orientation personnelle, la copie (Annexe l)2, le Conseil fédéral avait envisagé l’adoption d’une attitude de protestation et avait fini par se résoudre à laisser les négociations officieusement engagées entre la S.S.S. et les Délégués de l’Entente se poursuivre.
Ces négociations ont malheureusement abouti non pas à une détente, mais à de nouvelles exigences.
Ainsi que vous le verrez par le rapport que la S.S.S.3a adressé au Conseil fédéral et dont nous vous envoyons la copie à titre strictement confidentiel, les Délégués de l’Entente ont, en effet, exigé de la façon la plus comminatoire et en impartissant un délai pour la réponse, l’adoption d’une liste noire commune qui aurait pour but d’effectuer le boycott absolu de certaines maisons établies en Suisse, et de permettre aux lois étrangères sur le commerce avec l’ennemi de déployer leurs effets en Suisse.
Nous avons répondu le 31 août à cette demande par une note4 qui a été adressée, vu l’urgence, aux missions alliées à Berne, et qui marque bien notre point de vue, mais fait d’autre part des propositions conciliantes et tend à l’ouverture de négociations officielles au cours desquelles il serait possible de chercher, dans des dispositions compatibles avec notre indépendance, un terrain d’entente.
Vous voudrez bien trouver sous ce pli une copie de cette réponse.
Il ne paraît pas absolument nécessaire que cette note soit confirmée par une démarche officielle de votre Légation, mais nous vous serions infiniment obligés de l’appuyer officieusement de votre autorité personnelle et de tenter le possible pour amener l’ouverture des négociations offertes.
Nous désirerions beaucoup que ces négociations ne tendent pas seulement à la recherche d’un «modus vivendi» réglant la question spéciale de la liste noire commune, mais à la révision complète du régime des listes noires et des certificats de nationalité, qui pèse lourdement sur notre commerce.
Il serait pour nous d’un grand prix que vous voulussiez bien nous faire connaître le plus rapidement possible comment cette question est envisagée par les cercles dirigéants du gouvernement auprès duquel vous êtes accrédité et quelles sont les concessions qu’il serait opportun de consentir et celles qu’il est possible de demander.