Imprimé dans
Documents Diplomatiques Suisses, vol. 6, doc. 237
volume linkBern 1981
Plus… |▼▶Emplacement
Archives | Archives fédérales suisses, Berne | |
▼ ▶ Cote d'archives | CH-BAR#E2001B#1000/1501#3055* | |
Ancienne cote | CH-BAR E 2001(B)1000/1501 81 | |
Titre du dossier | Allgemeines (1914–1917) | |
Référence archives | B.56.1.1 |
dodis.ch/43512
En vous confirmant mes trois télégrammes2 d’hier à midi, 16 heures 30 et 19 heures 30 relatifs à la note américaine, j’ai l’honneur de vous accuser réception de vos deux télégrammes3 d’hier à 5 heures 30 et 6 heures 30 du soir concernant la note suisse. Ils me sont parvenus, le premier à 9 heures et le second à 10 h. 30 du soir. Je les ai immédiatement transcrits et ai remis la note ce matin à 10 h. 30, avec la date d’hier, à M. Jules Cambon.
Il a déclaré qu’il ne pouvait rien me répondre attendu que les Gouvernements alliés devaient délibérer sur la note américaine.
Si M. Cambon ne m’a rien dit officiellement, j’ai l’impression, d’après ce qu’il a donné à entendre à M. Lardy, à condition que M. Lardy ne le répétât pas au Ministre de Suisse, que M. Cambon manquait entièrement de chaleur à l’égard de notre démarche. La lecture du mot «amitié» ne lui a pas chatouillé agréablement l’œil; il a fait aussi une allusion très vague, très lointaine, presque imperceptible à la fable de la grenouille qui veut se faire aussi grosse que le bœuf4. Je n’ai pas manqué d’attirer l’attention de M. Jules Cambon sur le passage de la note constatant que, depuis cinq semaines, la Suisse est en rapport avec les Etats-Unis en vue de cette démarche qui a donc ainsi été discutée longtemps avant la note austro-allemande.
Je dois dire que j’aurais, pour ma part, supprimé ce mot «amitié» si j’avais pu correspondre avec vous, mais, puisque notre note a été envoyée partout, elle ne pouvait, par conséquent, plus être modifiée. Dans l’état d’exaspération des esprits en France, on risque de dire à nos milliers de compatriotes que leur amitié ne vaut pas cher puisqu’elle existe au même degré envers les adversaires des Alliés.
Comme l’Ambassadeur américain Sharp avait été aimable hier en me tenant au courant, avant le public, de sa démarche, j’ai passé chez lui en sortant de chez M. Cambon et lui ai montré notre note. Sharp a paru vivement ému et nettement ravi. Il m’a dit: «C’est splendide! Je vais immédiatement télégraphier au Président Wilson pour le mettre au courant, bien que probablement votre Légation à Washington ait déjà fait cette communication.» M. Sharp passe pour être entièrement l’homme de Wilson.
A l’Ambassade d’Espagne, l’Ambassadeur Del Muni est toujours obligé de garder le lit. Son ad latus, M. Quinones de Léon, m’a dit qu’il était inondé, depuis huit jours, de télégrammes commerciaux de toutes espèces, mais n’avait pas reçu de Madrid un seul télégramme politique, ce qui est singulier. Il n’est, en particulier, parvenu à l’Ambassade aucun télégramme se rapportant à la remise de la note austro-allemande par des représentants de l’Espagne.
Quinones de Léon m’a promis de venir me voir s’il apprenait quoique ce fût au sujet de l’attitude de l’Espagne, tant à l’égard de la transmission de la note austroallemande, qu’à l’égard de la note des Etats-Unis d’hier.
Le Comité secret du Sénat paraissait devoir se terminer hier. Il continue aujourd’hui. Il paraît que le sénateur Humbert a attaqué personnellement avec trop de vivacité l’ancien Sous-Secrétaire d’Etat, aujourd’hui Ministre des Munitions, M. Albert Thomas, qui, dans sa riposte, aurait assez mal arrangé M. Humbert contre lequel il n’est peut-être pas très difficile de formuler des insinuations personnelles. On persiste à penser que M. Briand ne sera pas renversé par le Sénat. La question de savoir s’il est très solide en selle, demeure ouverte.
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Maintien de la paix (1890–1918)