Londres, 4 septembre 1916
Je viens d’avoir la visite de Sir Horace Rumbold, le nouveau Ministre de Grande-Bretagne à Berne. Il compte partir pour la Suisse dans une huitaine de jours.
Sir Horace a été naturellement fort aimable puisqu’il s’agissait d’une visite de courtoisie. J’ai eu de lui une impression plus favorable qu’aux précédentes occasions où je l’avais vu. Il me semble que vous n’aurez pas de difficultés avec lui. Il paraît animé de l’intention de se rendre à Berne «persona grata». Il m’a rappelé qu’il y avait été comme enfant alors que son père dirigeait, en Suisse, la Légation de Grande-Bretagne. Il m’a fait remarquer aussi que sa femme, Lady Rumbold née Fane, était née à Berne alors que son père, qui est mort comme Ministre de Grande-Bretagne au Danemark, était Secrétaire à la Légation Britannique près la Confédération. J’ai pu constater également que Sir Horace Rumbold parlait français et allemand, ce qui contribuera certainement à lui faciliter sa mission. Il n’est pas extrême dans ses vues et a conservé un jugement assez impartial même à l’égard de l’Allemagne.
Lady Rumbold s’est engagée à poursuivre l’œuvre entreprise par Lady Grant Duff pour le ravitaillement des prisonniers anglais en Allemagne. Ils ont trois enfants dont l’aîné a dix ans.
J’ajoute, qu’aux dires d’un personnage qui tient de près au Foreign Office, c’est précisément pour nous être agréable qu’on a rappelé M. Grant Duff, auquel on a donné, comme fiche de consolation, l’ordre du «K.C.M.G», c’est à dire «Knight Commander of St. Michael and St. George», qui lui confère le droit de porter le titre de Sir, de sorte qu’il s’appelle maintenant Sir Evelyn Grant Duff et sa femme Lady Grant Duff. On se réserve, du reste, de lui donner plus tard un nouveau poste, quoique mon interlocuteur, qui connaît beaucoup M. Grant Duff, ait fait remarquer qu’il avait su, plus ou moins partout, se rendre désagréable par des remarques désobligeantes sur les pays où il résidait comme diplomate.