Printed in
Diplomatic Documents of Switzerland, vol. 6, doc. 15
volume linkBern 1981
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Archive | Swiss Federal Archives, Bern | |
▼ ▶ Archival classification | CH-BAR#E27#1000/721#13451* | |
Old classification | CH-BAR E 27(-)1000/721 2754 | |
Dossier title | Instruktion des BR vom 4.8.1914 an den General (1914–1914) | |
File reference archive | 06.H.3.a |
dodis.ch/43290 2
Instructions pour le général
L’Assemblée fédérale vous ayant confié le commandement suprême de l’armée suisse, il nous reste à vous donner, pour l’accomplissement de votre tâche, les instructions prévues à l’art. 204 de l’O.M.3
Vous prendrez le commandement des fractions de l’armée mises sur pied à partir du moment où elles entreront en service sur les places de rassemblement. Le commandement du service territorial et des troupes attribuées à ce service est exercé par le Département militaire suisse. Votre première tâche, à l’aide des forces placées sous vos ordres, est de préserver notre souveraineté et notre indépendance complète contre toute atteinte venant de l’intérieur ou de l’extérieur du pays et de protéger notre territoire contre toute violation de l’étranger. A cet effet, vous prendrez toutes les mesures militaires nécessaires ou utiles à teneur des articles 208 et suivants de l’O.M., en vous tenant toutefois dans les bornes suivantes:
Le Conseil fédéral a déclaré aux Puissances que, dans la guerre qui s’engageait, la Suisse observerait une neutralité complète. Ainsi, tant que nos frontières ou nos droits politiques et civils ne paraîtront pas menacés par une puissance étrangère, toutes vos mesures devront tendre à la sauvegarde de notre neutralité.
Le Conseil fédéral se réserve la faculté de prendre lui-même une décision au sujet de l’occupation éventuelle de la zone neutralisée de la Savoie. Le droit de déclarer la guerre et de conclure la paix, comme aussi de conclure des alliances, appartient aux autorités fédérales. Si les mesures militaires d’un Etat voisin vous faisaient craindre une menace, vous en informerez sans tarder le Conseil fédéral, afin qu’il exige, au besoin par un ultimatum, l’éloignement de cette menace. On s’opposera par la force à toute tentative de troupes étrangères de pénétrer de force sur notre territoire. Il y a lieu toutefois de discerner, dans les cas de ce genre, entre une invasion intentionnelle par des forces importantes ordonnée par les autorités, une violation involontaire de la frontière ou encore une violation de peu d’importance locale et momentanée, par de petits détachements. Dans le premier cas, vous userez immédiatement de représailles suivant les usages de la guerre et ferez en même temps des propositions au Conseil fédéral au sujet de la déclaration de guerre et, le cas échéant, de la conclusion d’alliances. Dans les autres cas, les droits devront être rétablis et le Conseil fédéral être mis à même de se plaindre et de demander réparation à l’Etat voisin qui a commis la violation. Tout militaire et toute troupe contraints de passer sur notre territoire seront désarmés et remis au service territorial pour être internés. Si la guerre vient réellement à éclater ou à être déclarée entre nous et un Etat voisin, toutes les dispositions prises en vue de sauvegarder notre neutralité tombent et la Suisse prend la position et les droits d’une puissance qui entreprend la guerre pour son propre compte. Vous recevez dans ce cas toute liberté d’action au sujet des mesures militaires à prendre à l’intérieur et à l’extérieur de nos frontières.
Vous seriez alors également autorisé à conclure des conventions avec les commandants de troupes des Etats voisins, sans aucune réserve, en tant qu’elles se rapporteraient au règlement provisoire de questions purement militaires ou de peu d’importance; dans tous les autres cas, l’approbation du Conseil fédéral devra, dans la mesure du possible, être préalablement demandée.
De toute façon, il y aura lieu de tenir encore compte de ce qui suit:
1) Dans la zone d’occupation militaire des frontières, le personnel des gardesfrontières est placé sous vos ordres. Vous ordonnerez néanmoins le nécessaire afin que, dans la mesure du possible, les exigences militaires imposées à ce personnel ne portent pas préjudice au service des douanes.
2) Vous ferez en sorte que les organes militaires observent les prescriptions officielles relatives au trafic sur la frontière et à la police de la frontière.
3) A l’intérieur du pays, l’armée devra, au besoin, prêter son concours pour protéger les autorités et les fonctionnaires dans l’exécution de leurs fonctions et obligations et pour maintenir l’ordre d’une manière générale.
Ces instructions sont accompagnées:
1. de l’arrêté de mise sur pied du Conseil fédéral4;
2. de la notification de la neutralité adressée aux Puissances5;
3. des prescriptions concernant le maintien de la neutralité6. Nous recommandons notre armée, notre pays et notre peuple à la protection divine.
- 1
- Ce document est signé par le Président de la Confédération, A. Hoffmann et par le Chancelier de la Confédération, H. Schatzmann.↩
- 2
- (Copie): E 27, Archiv-Nr. 13451. Etat de guerre I. II. III. entre Puissances voisines. Variante A.↩
- 3
- En N.B. figure l’indication suivante: D’après l’art.204 de l’O.M.[Organisation Militaire], le Général est nommé dès qu’une levée de troupes importante est ordonnée ou prévue. Forme A. La mise sur pied est décrétée.↩
- 4
- Cf. R.O. vol. 30, p. 339.↩
- 5
- Cf. no 16.↩
- 6
- Il s’agit de l’ordonnance concernant le maintien de la neutralité de la Suisse du 4 août 1914, disant: Le Conseil fédéral suisse, Dans le but de prévenir tous actes ou omissions non compatibles avec la position neutre de la Suisse, Se basant sur l’article 102, chiffre 9, de la Constitution fédérale, sur les articles 39, 40 et 41 du Code pénal fédéral, du 4 février 1853, ainsi que sur les stipulations de la Convention internationale de La Haye, du 18 octobre 1907, concernant les droits et les devoirs des Puissances et des personnes neutres en cas de guerre sur terre, arrête les prescriptions suivantes, auxquelles chacun aura à se conformer: 1. L’impartialité la plus stricte sera observée à l’égard de tous les belligérants; on devra donc s’abstenir de tout acte favorisant l’un ou l’autre d’entre eux. 2. Aucun acte hostile contre l’un quelconque des belligérants ne devra être entrepris, appuyé ou favorisé d’une manière quelconque du territoire suisse, ni y être préparé. 3. Les relations pacifiques devront être, autant que possible, assurées, sous réserve des dispositions qui suivent et des prescriptions spéciales des autorités et des commandants de troupes. 4. Toute tentative de la part de troupes régulières ou de volontaires des Parties belligérantes de pénétrer sur territoire suisse ou de la traverser, en corps ou isolément, devra être immédiatement portée à la connaissance du commandant de troupes et de l’autorité de police les plus rapprochés. 5. Les militaires étrangers qui seraient rencontrés isolément sur le territoire neutre seront arrêtés par les troupes ou, le cas échéant, par la police; il en sera de même des civils soupçonnés d’abuser, sous d’évidents prétextes, du territoire neutre. 6. L’autorisation de faire passer sur notre territoire des blessés ou malades appartenant aux armées belligérantes devra être demandée au commandant en chef. Pour ce qui a trait au personel et au matériel de toute nature accompagnant ces convois, il est renvoyé aux prescriptions pour les commandants de troupes (décision du Conseil fédéral du 21 décembre 1912), concernant le maintien de la neutralité. 7. En cas de tentative de l’une des parties belligérantes de faire passer par notre territoire des transports de matériel de guerre de n’importe quelle espèce, notamment des transports d’armes, de munitions et d’approvisionnements, le commandant de troupes et l’autorité de police les plus rapprochés devront en être immédiatement informés. Les objets dont il s’agit seront saisis par les autorités. 8. Sont interdits et devront être empêchés: a) L’exportation d’armes, de munitions et de tout matériel de guerre dans les Etats belligérants limitrophes, ainsi que tout rassemblement d’objets de cette nature dans la région frontière avoisinante. En cas de faits de guerre à proximité de la frontière, le commandant d’armée pourra restreindre davantage ou supprimer entièrement le trafic frontière. b) L’achat et, d’une manière générale, l’acceptation d’armes, de matériel de guerre et d’objets d’équipement apportés sur territoire suisse par des déserteurs. Les objets indiqués sous a) et b) seront saisis, même s’ils se trouvent en possession de tierces personnes. 9. Si des militaires isolés des armées belligérantes ou des prisonniers de guerre évadés cherchent à se réfugier sur notre territoire, ils pourront y être admis jusqu’à nouvel avis. Ils seront désarmés et mis à la disposition de l’autorité militaire, de même que les prisonniers de guerre amenés par des troupes se réfugiant sur notre territoire. 10. Le passage sur territoire suisse sera permis, pour autant qu’il n’existe de soupçon d’aucune sorte, aux femmes, aux enfants et aux vieillards, ainsi qu’aux personnes qui, avant la guerre déjà, avaient un domicile en Suisse ou y possédaient un bien-fonds. 11. Les personnes qui ne se comporteraient pas conformément aux règles de la neutralité pourront être transférées à l’intérieur du pays; s’il s’agit d’étrangers, ils s’exposent à l’expulsion. 12. Des corps de combattants ne pourront être formés, ni des bureaux d’enrôlement ouverts sur territoire suisse au profit des belligérants. L’existence de bureaux de renseignements ou de recrutement pour les militaires et volontaires des armées belligérantes devra être signalée au Conseil fédéral. 13. Les ressortissants d’Etats étrangers qui voudront se rendre isolément, sans armes ni uniforme et sans être organisés en groupes, dans le territoire des Etats belligérants, directement ou indirectement, de la Suisse ou par la Suisse, ne seront pas empêchés, jusqu’à nouvel avis, de passer au-delà de la frontière. 14. Il est absolument interdit aux parties belligérantes d’établir ou d’utiliser sur territoire suisse une station radio-télégraphique ou toute autre installation (téléphone, télégraphe, station pour signaux optiques ou autres, station de pigeons-voyageurs, station d’aviation, etc.) destinée à servir de moyen de communication avec des forces belligérantes sur terre ou sur mer ou de leur prêter appui d’une manière quelconque. 15. Les bureaux des télégraphes, des téléphones, des postes et des douanes recevront de leurs administrations les instructions voulues quant à l’attitude qu’ils ont à observer. L’usage de la poste, du télégraphe et du téléphone dans un but militaire primera tout autre emploi, à l’exception des communications urgentes du Conseil fédéral et des Départements politique et militaire. 16. Les chemins de fer se conformeront aux prescriptions relatives à l’exploitation en cas de guerre ainsi qu’à leurs autres instructions spéciales. 17. En ce qui concerne l’aviation, il y a lieu d’observer ce qui suit: a) Les aérostats et appareils d’aviation n’appartenant pas à l’armée suisse ne pourront s’élever et circuler dans l’espace aérien situé au-dessus de notre territoire que si les personnes montant ces appareils sont munies d’une autorisation spéciale, délivrée, dans le territoire occupé par l’armée, par le Commandant d’armée, dans le reste du pays, par le Département militaire fédéral. b) Le passage de tous aérostats et appareils d’aviation venant de l’étranger dans notre espace aérien est interdit; on s’y opposera, le cas échéant, par tous les moyens et signalera ces appareils partout où cela paraîtra utile. c) En cas d’atterrissage d’aérostats ou d’appareils d’aviation étrangers, leurs passagers seront conduits auprès du commandant militaire supérieur le plus rapproché, qui agira selon ses instructions. L’appareil et les objets qu’il renferme devront, en tous cas, être saisis par les autorités militaires ou de police. Le Département militaire fédéral ou le Commandant d’armée décidera ce qui doit advenir du personnel et du matériel d’un aérostat ou appareil d’aviation amené sur notre territoire par un effet de force majeure et alors que toute intention répréhensible ou négligence paraît exclue. 18. Le personnel des gardes-frontières et de police stationné à la frontière pourra être placé sous les ordres des chefs militaires commandant les troupes occupant la frontière. Au cas où ce personnel resterait indépendant, il aurait néanmoins le devoir d’assister les troupes dans leur tâche, de même que les troupes devront protéger et prêter assistance à la police et aux gardes-frontières en cas de besoin. Les troupes auront, d’ailleurs, le même devoir vis-à-vis de toute personne exerçant une fonction officielle dans le territoire occupé par l’armée, en particulier vis-à-vis du personnel des entreprises publiques de transports, des douanes, de la police sanitaire et vétérinaire. 19. Les trains de chemins de fer et les bateaux ne pourront être visités que par les militaires et fonctionnaires spécialement chargés de cette mission. 20. Il ne sera pas mis d’entraves aux communications habituelles avec les territoires au-delà de la frontière, sous réserve des restrictions commandées par le maintien de la neutralité et, notamment, des dispositions sus-énoncées. Cependant, les commandants de troupes pourront demander et, le cas échéant, prescrire que le trafic soit limité à certains chemins. 21. Les gouvernements cantonaux, notamment les gouvernements des cantons frontière, et les commandants militaires, selon leurs instructions spéciales, sont chargés de l’exécution de la présente ordonnance; en sont également chargés les départements des douanes et des postes et des chemins de fer pour ce qui concerne le concours et l’attitude de leurs administrations et de leurs personnels.↩