Abgedruckt in
Diplomatische Dokumente der Schweiz, Bd. 4, Dok. 328
volume linkBern 1994
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Archiv | Schweizerisches Bundesarchiv, Bern | |
Signatur | CH-BAR#E2001A#1000/45#666* | |
Dossiertitel | Nr. 637. Allgemeines, insbesondere Berichte der schweizerischen Auslandvertretungen und Mitteilungen der Kriegsparteien (1899–1903) | |
Aktenzeichen Archiv | B.263 |
dodis.ch/42738 Le Ministre de Suisse à Londres, Ch. D. Bourcart, au Président de la Confédération et Chef du Département politique, E. Müller1
Au cours d’un entretien que j’ai eu hier avec Sir Thomas Sanderson, soussecrétaire d’Etat permanent aux Affaires étrangères, pour une affaire dont je vous rends compte dans une autre dépêche, mon interlocuteur n’a pas pu s’empêcher de me témoigner toute la satisfaction que lui procuraient les tentatives faites en Suisse (par MM. Naville, Angst et consorts) pour éclairer l’opinion publique sur les vraies causes de la guerre contre le Transvaal. Il se rend parfaitement compte que, d’une manière générale, la presse et l’opinion sont peu favorables chez nous à l’Angleterre mais, grâce à l’initiative prise par le groupe susmentionné, il veut bien nous accorder une place spéciale dans son estime parce que, à l’entendre, la Suisse serait le seul pays continental où une voix se serait élevée en faveur des Anglais. L’unanimité de l’opinion publique européenne à condamner l’Angleterre ne semble donc pas laisser le gouvernement britannique aussi froid qu’on pourrait être porté à le croire, si on en juge au moins par l’attitude de Sir Thomas Sanderson qui m’a paru assez ennuyé de cet état des esprits. «Je me suis demandé souvent» me dit-il «d’où provient cette haine générale de l’Anglais et je dois reconnaître que, en dehors des jalousies dues nécessairement à notre prospérité, nous devons en imputer la cause principalement à notre arrogance si souvent déplacée; la presse notamment manque de tact et contribue par son dédain de tout ce qui n’est pas anglais à nous créer des ennemis et à entretenir les haines existantes. Je disais l’autre jour à Lord Salisbury, qui me demandait pourquoi nous étions si cordialement détestés partout, que les «leaders»2 des journaux étaient en grande partie responsables de cette haine. Je m’étonne surtout» ajoutait Sir Thomas «que dans les petits pays qui nous doivent tant et que nous avons toujours soutenus contre leurs puissants voisins on ne nous soutienne pas davantage.» Je crus devoir assurer à ce moment le soussecrétaire d’Etat, qu’on se rendait parfaitement compte en Suisse des grands services que l’Angleterre nous avait rendus par le passé et l’assurai aussi que notre gratitude demeurait acquise à ce pays dont nous espérions pouvoir, à l’avenir aussi, invoquer l’appui si, pour notre malheur, un jour devait venir où nous aurions à craindre pour notre indépendance et notre liberté. Je n’ai pas pu lui dissimuler qu’en effet l’opinion publique et la presse sont plutôt favorables aux Boers qu’aux Anglais mais, sans entrer en discussion sur le bien ou le mal fondé de cette manière de voir, je lui fis remarquer que les journaux anglais étaient peu lus chez nous et que nous étions nécessairement tributaires, dans une certaine mesure, de la presse allemande et française. «A ce propos» me dit alors Sir Thomas «je ne vous étonnerai pas en vous disant que cette presse a été fortement travaillée par les agents du Président Krüger et qu’une partie des fameux millions dont on ne trouve pas la justification de dépense dans les comptes de la République Sud-africaine ont passé dans la poche de messieurs les journalistes européens. Ici aussi d’ailleurs, à ce que me disait l’autre jour lui-même un journaliste anglais, on aurait eu des facilités pour gagner de l’argent transvaalien.»
J’ai cru devoir vous rapporter cette conversation parce qu’elle vous prouve que, malgré ce qu’en ont dit certains journaux suisses, on suit ici, dans les cercles gouvernementaux au moins, l’opinion publique même dans les petits pays; il serait désirable, me semble-t-il, que, malgré toute la sympathie que peuvent nous inspirer les Boers, notre presse ne se laissât pas entraîner à des attaques immodérées contre l’Angleterre ou des abus de langage contre tel ou tel membre du gouvernement plus ou moins responsable de la situation actuelle. En dehors de la question de sentiment et de droit il y a le fait que nous devons beaucoup à l’Angleterre, que nous avons absolument besoin d’elle commercialement et qu’un moment peut venir où son amitié nous sera plus précieuse que celle d’une République du sud de l’Afrique; il faut donc éviter de la froisser inutilement et j’espère beaucoup que notre presse, tout en maintenant son indépendance de jugement, évitera autant que possible de donner à ses commentaires une forme inutilement acerbe.
Mon collègue des Pays-Bas m’a confirmé qu’il avait été chargé par son Gouvernement, au moment où la guerre était déjà déclarée, de faire une tentative de médiation auprès du Gouvernement britannique, mais qu’il avait essuyé un refus péremptoire de la part de ce dernier d’entrer en matière.
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