Classement thématique série 1848–1945:
II. RELATIONS BILATÉRALES
13. France
13.1. Commerce
13.1.2. Zones franches et Pays de Gex
Abgedruckt in
Diplomatische Dokumente der Schweiz, Bd. 4, Dok. 133
volume linkBern 1994
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Archiv | Schweizerisches Bundesarchiv, Bern | |
Signatur | CH-BAR#E2#1000/44#1661* | |
Dossiertitel | BRB vom 23.2.1895 betr. die Einfuhr aus der zollfreien Zone von Hochsavoyen und der Landschaft Gex (1893–1895) | |
Aktenzeichen Archiv | B.137.2 |
dodis.ch/42543 Le Ministre de Suisse à Paris, Ch. Lardy, au Chef du Département des Affaires étrangères, A. Lachenal1
«Le Siècle» de ce matin annonçait que M. Bizot, député de Gex, avait obtenu du Président du Conseil, Ministre des Affaires étrangères une audience pour l’entretenir de la situation faite au Pays de Gex par la Suisse et que la date de cette interpellation avait été fixée d’un commun accord au 19 mars.
Cet après-midi, jour de réception ordinaire du Ministre des Affaires étrangères, j’avais été introduit une première fois chez M. Perier pendant qu’il conférait avec M. Ressmann de la question monétaire afin de pouvoir discuter en commun la question d’une nouvelle prorogation de l’échange des ratifications de l’arrangement du 15 novembre (voir mon télégramme de ce soir)2. Je suis ressorti pour laisser l’Ambassadeur d’Italie continuer sa conférence avec M. Perier et passer avant moi les Ambassadeurs d’Allemagne et d’Autriche.
Lorsque j’ai été réintroduit, M. Perier m’a interpelé en disant qu’il allait avoir des ennuis à cause de nous; que M. Bizot était venu le voir et qu’après s’être fait donner par M. Hanotaux une note sur la question, il trouvait que nous étions bien raides et que nous n’avions pas tout à fait raison dans notre attitude envers les Gessiens.
Comme j’avais relu aujourd’hui, mis en éveil par l’entrefilet du Siècle, mon rapport du 18 janvier 1893 sur nos relations avec le Pays de Gex3, j’ai pu faire rapidement mais d’une manière très complète à M. Perier, qui m’a écouté avec une grande attention, l’exposé de la question en lui montrant qu’au point de vue historique la France avait obtenu des alliés que le Pays de Gex restât français en reportant la ligne des douanes au Jura; que la Suisse n’avait jamais pris sous aucune forme l’engagement de ne pas avoir de douanes le long de cette frontière; qu’en fait il en avait toujours existé une et qu’ainsi ni historiquement ni juridiquement nous ne lui devions rien. J’ai ajouté dans l’esprit de mon rapport du 18 janvier de l’année dernière qu’en équité la Suisse avait dans ses 3 derniers arrangements commerciaux avec la France en 1864, 82, et 924 accordé des facilités au Pays de Gex facilités encore augmentées par le fait de la suppression des octrois de Genève et de Carouge; que ce n’était pas notre faute si la Chambre française avait rejeté notre dernier arrangement, que malgré ce rejet nous avions unilatéralement accordé le 14 mai dernier des facilités au Pays de Gex5 que dans l’état actuel de l’opinion dans le reste de la Suisse, où l’on trouve que Genève jouit déjà pour son approvisionnement de facilités dont sont privées Bâle, la Chaux-de-Fonds ou autres villes de la frontière, il n’était guère possible de songer actuellement à accorder aux Genevois de nouvelles facilités; qu’en première ligne on devait s’appliquer à trouver en France un meilleur système de répartition des bons alloués par la Suisse aux zones afin de supprimer leur revente et à en assurer le bénéfice aux véritables producteurs et exportateurs; qu’il était pénible pour la Suisse de voir des sacrifices financiers importants et des marques sonnantes de sympathie paralysées si ce n’est annihilées par l’agiotage sur les bons; que l’année dernière, à pareille époque, la Suisse avait non seulement accordé de nouveaux crédits douaniers aux zones mais supprimé le traitement différentiel au préjudice des commis voyageurs français en se contentant d’une compensation de sentiments sous la forme [de] l’assimilation des Suisses aux nationaux dans les zones. Or aujourd’hui cette contre-prestation n’est fournie que partiellement, alors que nous avons exécuté de la façon la plus complète et la plus loyale nos arrêtés de l’année dernière. Il semble donc que l’allégement de la situation actuelle des Gessiens doit être recherché pour commencer dans une amélioration du mode de distribution des bons et dans l’exécution des engagements français du 14 mai, avant de faire appel à la Suisse, pour modifier une situation qu’elle avait tout fait pour éviter lors des négociations commerciales de 1892.
M. Casimir-Perier a répondu qu’il lui paraissait politiquement bien difficile d’enlever aux maires la distribution des bons; qu’après mes explications historiques et juridiques, il allait étudier la question à nouveau et qu’il me prierait de venir en conférer encore une fois avec lui. «Cette affaire est très ennuyeuse et la discussion peut devenir désagréable. Les députés de la région sont très montés, les Savoisiens ont même voulu, vous le savez, aborder la question de la neutralité militaire de leur région. Cela m’a étonné car César Duval est un brave homme, le Ministre de la guerre est venu conférer avec moi de leur proposition et leur a très bien répondu. Vous comprenez que nous n’entendons pas menacer Votre neutralité. Nous apprécions au contraire tous les efforts que Vous faites pour en assurer la défense efficace si elle est menacée par les autres. Mais cette tentative Vous montre combien ces gens sont vibrés et je ne sais quel effet ils feront sur le Parlement lorsqu’ils établiront que Vous entrez chez eux et qu’ils ne peuvent pas entrer chez Vous. L’ordre du jour est extraordinairement chargé; la Chambre paraît vouloir se séparer le 17 et ne revenir qu’au 1er mai, alors qu’à cause du budget, je voudrais qu’elle fixât la rentrée au 15 avril. Comme j’ai accepté l’interpellation pour le 19 mars, il est possible qu’elle doive être renvoyée après les vacances ce qui me donnera du temps. En tous cas je Vous reparlerai de l’affaire.»
Il faut courir à la gare et je dois me borner à cette photographie de notre conversation sans que j’aie le temps de me relire.
- 1
- Lettre: E 2 661.↩
- 2
- Cf. Message du Conseil fédéral concernant l’arrangement international du 15 novembre 1893 relatif à la révision partielle et temporaire de quelques dispositions de la convention monétaire du 6 novembre 1885 (FF, 1893, V, pp.178–184).↩
- 3
- Cf. E 2 1659.↩
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