Confidentielle Paris, 30 avril 1872
Aux courses de Dimanche dernier, j’avais été invité à me joindre à Mme Thiers pour y assister du Pavillon réservé au Président de la République.
Deux ou trois autres de mes collègues se trouvaient également invités. Du nombre était M. de Olozaga, Ambassadeur d’Espagne.
A titre tout à fait personnel et confidentiel, M. Olozaga m’a dit que son Gouvernement regrettait vivement que le Ministre d’Espagne à Berne ne fut pas actuellement à son poste. Le fait que don Carlos a daté de Genève un manifeste révolutionnaire adressé au peuple espagnol, a péniblement impressionné le cabinet de Madrid. Le texte de ce manifeste a été publié par tous les journaux. Le Gouvernement espagnol se plaît à espérer, a ajouté M. Olozaga, que le Conseil fédéral considérera la conduite de don Carlos comme contraire au droit des gens et comme constituant un abus du droit d’asile, dont il a joui en Suisse jusqu’à ce jour. L’expulsion de ce prétendant paraîtrait à M. Olozaga légitimée par l’attitude de don Carlos et par les égards dus à un Gouvernement ami.
M. Olozaga, avec lequel j’entretiens depuis longtemps d’excellents rapports, m’a annoncé que le Conseil fédéral recevrait sous peu une communication directe du Gouvernement espagnol, au sujet de cette affaire. Je m’empresse de Vous informer de notre entretien, pour le cas où ce document ne Vous serait pas encore parvenu. Il me paraîtrait qu’avant tout, il y aurait lieu de savoir si don Carlos est encore à Genève et cela, aussitôt que possible.
[PS:]Le Tempsde ce soir publiera, sous forme de «correspondance suisse», une réfutation de l’article de la Liberté que je Vous ai envoyé hier. Je tâcherai de Vous l’envoyer, si possible, par le courrier d’aujourd’hui.