biologie et la sociologie.
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Die Schweiz und die Konstruktion des Multilateralismus, Bd. 1. Diplomatische Dokumente der Schweiz zur Geschichte des Internationalismus 1863–1914, vol. 13, doc. 18
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Archive | Swiss Federal Archives, Bern | |
Archival classification | CH-BAR#E14#1000/39#936* | |
Dossier title | 3. Internationaler Kongress für Kriminalanthropologie, Brüssel 1892 (1892–1892) |
dodis.ch/59545Le Délégué suisse au Congrès de Bruxelles, Ladame, au Chef du Département de l’intérieur, le Conseiller fédéral Schenk1
IIIe Congrès d’anthropologie criminelle tenu à Bruxelles du 7 au 14 août 1892
En venant vous rendre compte de la mission que le Conseil fédéral m’a fait l’honneur de me confier je me sens pressé d’exprimer mes sentiments de vives gratitudes pour cette marque de confiance et je suis heureux de vous annoncer que j’ai reçu à Bruxelles le plus cordial accueil comme représentant officiel de la Confédération suisse.
Le Congrès d’anthropologie criminelle de Bruxelles, faisant suite aux sessions de Rome (1885) et de Paris (1889)2 avait pour objet l’étude scientifique de la criminalité chez l’homme, dans ses rapports avec la biologie et la sociologie. Son organisation avait été faite avec le plus grand soin. Ses statuts, son règlement et son programme préparés et adoptés après un travail consciencieux du Comité d’Organisation, ce qui facilita beaucoup la bonne tenue des discussions et de l’ordre du jour des séances.
Les thèses mises en discussion étaient divisées en deux séries, dont la première comportait celles dont les rapports préalables, admis par le comité, ont été imprimés et distribués à tous les membres adhérents pendant le mois de Juillet 1892, tandis que la seconde série comportait toutes les communications ne faisant pas l’objet de rapports préalables et qui étaient inscrites au programme pour être faites dans les séances du Congrès, suivant l’ordre du jour fixé.
Les questions préalables avaient fait l’objet de 24 rapports qui peuvent être groupés en quatre classes:
a) Existe-t-il un type criminel anatomiquement déterminé?
par M. M. les Docteurs E. Houzé professeur d’anthropologie à l’Université de Bruxelles, médecin à l’Hôpital St Jean et Léo Warnots, agrégé à l’Université de Bruxelles et chirurgien à l’hôpital St Jean.
Les rapporteurs concluent par la négative. Suivant eux et contrairement à l’opinion de Lombroso, il n’existe pas de type criminel anatomiquement déterminé. Personne n’a pris la parole dans le Congrès pour soutenir la thèse du criminel-né!
b) Étude critique des caractères du criminel-né par le Dr. Bronardel doyen de la faculté de médecine de Paris. Ce rapport n’a pas été fait et M. Bronardel a été empêché de venir à Bruxelles.
c) Pluralité des types de criminels-nés, par M. Van Deventer, médecin en chef à Amsterdam. En l’absence du rapporteur M. Goffin, conseiller communal à Bruxelles, a donné un résumé de sa communication qui n’a soulevé aucune discussion. M. Van Deventer repousse le type criminel de Lombroso, mais soutient qu’il y a plusieurs types différents.
d) Origine morbide des caractères, reconnus chez les criminels-nés par le Dr. Jelgersma, médecin aliéniste à Meerenberg (Hollande) et le Dr. Cuylits médecin en chef de l’asile d’Evère près Bruxelles.
La thèse de ces messieurs se formule ainsi: les caractères physiques, intellectuels et moraux reconnus chez le criminel-né sont d’origine pathologique.
e) Mesures craniométriques. Trois communications sur les méthodes de mensuration des crânes normaux et pathologiques par M. M. Benedikt (de Vienne) E. Houzé (de Bruxelles) et Gauderi (de Turin)
f) des organes des sens chez les femmes criminelles étude statistique par Mme Pauline Tarnowsky, directeur en médecine à St Petersbourg
Ces recherches prouvent que les anomalies des organes des sens se rencontrent dans une proportion sensiblement égale chez tous les groupes de femmes examinées par Mme Tarnowsky, un peu plus fréquemment peut-être, chez les criminelles. Chez la plupart des ces dernières les organes des sens étaient tout à fait normaux.
g) Les signes de dégénérescence chez les femmes normales, chez les aliénées et chez les criminelles devenues folles par le Dr. Naecke de Habertusbourg (près Leipzig). Le Dr. Naecke arrive à des conclusions analogues à celles de Mme Tarnowsky. Il insiste sur la fréquence des signes de dégénérescence chez les femmes criminelles. Du reste l’orateur n’a pas pu donner lecture de tout son travail, très complet, qui sera imprimé in-extenso dans les comptes-rendus.
h) Questions préalables dans l’étude comparative des criminels et des honnêtes gens par L. Manouvrier, professeur à l’école d’anthropologie de Paris. Ce rapport, très remarquable, explique pourquoi la Commission nommée à Paris en 1889 pour faire des études comparatives sur les honnêtes gens et les criminels n’a pu se livrer à ces recherches. La commission ne s’est pas même réunie. Je cite un passage du rapport qui en fera comprendre les raisons.
«... L’histoire sacrée parle d’un personnage qui ne parvient pas à trouver dix justes et même moins dans une ville qui s’était attirée, particulièrement, il est vrai, la colère du Seigneur. La Commission, obligée d’en trouver plusieurs centaines à Paris ou ailleurs, et eût facilement trouvé des centaines de mille au besoin, si elle eût voulu considérer comme criterium d’honnêteté l’extrait du casier judiciaire ou le certificat de bonne vie en mœurs. Mais il s’agit de science et non d’administration. Il eût fallu trouver quelques centaines d’hommes d’âge mûr, n’ayant jamais commis aucun crime, non seulement au point de vue de la loi, mais encore au point de vue de la morale évidente. Chacun aurait été prié de faire son examen de conscience et la commission aurait pu faciliter un examen en dressant une liste (combien longue!) de tous les crimes non défendus, c’est-à-dire permis ou tolérés par le code et d’une gravité au moins égale à celle du crime minimum selon la loi...
...Admettons que la Commission, plus heureuse que le personnage biblique, eut réussi à trouver dans la grande ville où elle se serait réunie quelques hommes exempts du péché mortel contre la morale et sincèrement honnêtes, qui eussent bien voulu garantir l’honnêteté de quelques uns de leurs amis, au risque de froisser les autres, et que chaque nouvelle recrue eût fait de même jusqu’à ce que la série fût devenue suffisante...
...Il eût fallu s’enquérir auprès de chaque examiné, criminel ou honnête, au sujet des conditions du milieu dans lesquelles il avait passé son enfance, son adolescence, sa jeunesse, et au sujet de toutes les circonstances extérieures qui avaient pu le préparer, puis le pousser au crime, ou bien, au contraire, faire de lui un honnête homme...
...de plus, la commission eût été à même ainsi d’observer que si, parmi les criminels, il y en avait qui eussent été dignes de figurer, au point de vue des caractères biologiques, dans la série des honnêtes gens, cela ne les avait pas empêchés d’être criminels, et que, vice versa, les honnêtes gens, criminellement conformés n’en étaient pas moins honnêtes...
On eût demandé à chaque honnête homme «honnêtement conformé» s’il croyait pouvoir affirmer que jamais, en aucune circonstance, ses passions, ses besoins, ses sentiments quelconques étant contrariés, il ne commettrait de propos délibéré, quelque crime contre la loi ou la morale reconnue par lui-même. Si téméraire qu’elle puisse paraître, il est bien possible que la réponse affirmative eût été obtenue quelquefois. Je dirai pourtant qu’ayant posé cette question à diverses personnes très honnêtes de ma connaissance, je n’ai obtenu que des réponses négatives ou très fortement dubitatives.
...Mais la question précédente n’eût pas suffi. Il eût fallu faire un autre appel au sens intime de chaque honnête homme. Après avoir attiré son attention sur les conditions de milieu de toute sorte, susceptibles d’engager un enfant ou un homme dans la mauvaise voie et de le faire dévier de la bonne, on lui eût demandé s’il pensait que, placé dès sa jeunesse au milieu de ses conditions qui sont le lot de la plupart des criminels, il fût devenu et resté quand même un honnête homme. J’ai eu l’occasion de soumettre ce point à un autre membre de la commission, mon collègue et ami Alphonse Bertillon. Lui ayant demandé s’il croyait possible de trouver à Paris une centaine d’hommes honnêtes capables de répondre affirmativement: «On les trouverait tout de même répondit-il, mais ce serait cent imbéciles»...»
M. Manouvrier conclut que la valeur des actes n’est pas une matière physiologique anatomiquement explicable, mais bien une matière sociologique et morale.
i) Les principes fondamentaux de l’école d’anthropologie criminelle par M. Dimitri Drill, avocat et publiciste à Moscou. Ce rapport devient l’occasion au Congrès d’un tournoi scientifique du plus vif intérêt entre les partisans de l’école classique et ceux de la nouvelle école scientifique ou anthropologique. Cette discussion a marqué la journée la plus importante qui a donné au Congrès de Bruxelles son caractère particulier d’union et de conciliation des deux tendances.
Plusieurs communications qui avaient été annoncées n’eurent pas lieu, entre autres un rapport de M. Enrico Ferri, député au parlement italien et professeur de droit criminel à l’Université de Pise, sur «L’homicide dans ses rapports avec la race en Europe», et un travail de Dr. Cesare Lombroso, professeur à l’Université de Turin, le chef incontesté de l’école italienne d’anthropologie criminelle, sur «les caractères de la criminalité chez la femme.»
L’absence complète des représentants italiens a du reste été très commentée et l’on en a donné diverses raisons que je ne puis reproduire ici.
Les obsessions criminelles morbides ont fait l’objet de deux rapports:
a) L’obsession criminelle morbide par Dr. Magnan, médecin en chef de l’asile de Sainte-Anne à Paris. Dans ce rapport l’éminent aliéniste étudie tour à tour au point de vue clinique, l’obsession et l’impulsion à l’homicide; la kleptomanie, impulsion au vol, la pyromanie et les obsessions et impulsions sexuelles morbides.
b) L’obsession du meurtre par le soussigné, dont je joins ici un exemplaire du tirage à part du rapport.3
c) Le Dr. Semal, président du Congrès, avait annoncé un travail sur la préméditation obsessive comme circonstance atténuante qui n’a pu malheureusement être communiqué au Congrès.
d) M. le Dr. Lacassagne, professeur à la faculté de médecine de Lyon a fait une intéressante communication sur les sentiments primordiaux des criminels. M. Lacassagne, qui a fondé les archives d’anthropologie criminelle, est un des premiers adversaires des théories de l’école italienne, qu’il a déjà combattues à Rome.
e) Le mobile du crime chez l’enfant ou chez l’adolescent, par M. le Dr. Motet, médecin-expert à Paris.
À ce travail se rapportent plusieurs communications de Mme Th. Roussel de Paris, Dr. Vassitch, de Belgrade et Dr. Legrain de Paris, médecin à l’asile de Ville-Evrard. Ce dernier apporte en particulier ses nombreuses observations sur les enfants arriérés et idiots de la Colonie de Vaucluse.
Les suggestions criminelles et la responsabilité pénale ont été traitées dans trois rapports:
f) Suggestions criminelles ou délictueuses et responsabilité pénale par M. le Dr. Aug. Voisin, médecin en chef à la Salpêtrière à Paris.
g) Les suggestions criminelles et la responsabilité pénale par M. le Dr. Berillon, directeur de la Revue de l’Hypnotisme.
Ces deux rapports concluent à la réalité des suggestions criminelles et en montrent le danger.
h) Les suggestions criminelles et la responsabilité pénale par M. le professeur Benedikt (de Vienne). Ce rapport conclut d’une façon diamétralement opposée aux précédents. M. Benedikt n’ajoute pas la moindre foi au crime par suggestion. Il considère ce genre de crime comme le produit d’une fantaisie scientifique malheureuse.
Une vive discussion s’est élevée dans le Congrès entre les partisans et les adversaires de ces deux opinions.
a) Étiologie fonctionnelle du crime par M. le Dr. J. Dallemagne chef du service des autopsies des hôpitaux, agrégé de l’Université de Bruxelles. Pour étudier le problème du crime, dit l’auteur, il faut envisager l’évolution individuelle ou l’évolution sociale comme subordonnées à trois ordres de facteurs que, faute de dénominations mieux appropriées, nous appelons nutritifs, génétiques et intellectuels. Tous les actes individuels ou sociaux, normaux ou pathologiques, peuvent se ramener à l’action plus ou moins directe de l’un de ces trois facteurs ou de la résultante de plusieurs d’entre eux.
b) Les crimes des foules par M. Tarder, juge d’instruction à Sarlat (France) Ce rapport qui, sous l’esprit de beaucoup de personnes, devait produire un grand effet, avait été réservé pour la séance royale de l’après-midi du jeudi. La thèse du rapporteur est que la foule, même parmi les populations les plus civilisées est toujours une bête sauvage, répulsive et maniaque, toujours prête aux excès sanguinaires et se laissant mener par la lie de la populace, les ivrognes et les malfaiteurs les plus violents.
c) La criminalité et la crise économique par M. Hector Denis, recteur de l’Université de Bruxelles. Ce rapport avait ainsi été réservé pour la séance royale. Le rapporteur a montré par la statistique que la fréquence de certains crimes est en raison directe de l’intensité des crimes économiques. On voit décroître certains délits avec l’augmentation des salaires. Ces constatations prouvent clairement les responsabilités sociales dans les questions de la criminalité.
d) De l’importance respective des éléments sociaux et des éléments anthropologiques dans la détermination de la pénalité par M. E. Ganckler professeur à la faculté de droit de Caen. Selon le rapporteur le droit pénal est celui qui organise les réactions sociales d’ordre utilitaire et d’ordre moral qui sont provoquées dans la société par les délits et les crimes.
e) De l’influence des professions sur la criminalité par M. le Dr. Henry Contagne, médecin-expert à Lyon. Ce rapport pose plutôt la question et en montre les difficultés sans prétendre la résoudre. L’auteur demande des recherches ultérieures pour cela.
f) Les grands crimes politiques devant l’anthropologie par M. le Dr. Alvarez Taladriz de Valladolid (Espagne). Ce rapport n’a pas été présenté, son auteur n’étant pas venu au Congrès.
a) Le signalement anthropométrique par M. de Ryckère, substitut au tribunal de première instance, à Bruges. Exposé du système d’identification inventé par M. Alphonse Bertillon, de Paris, et appliqué déjà avec succès dans plusieurs pays. L’auteur en montre les avantages et recommande sa généralisation.
b) Aperçu des applications de l’anthropologie criminelle par M. Franz von Liszt professeur à l’Université de Halle (Allemagne). Le rapporteur recommande la prudence dans l’adoption des vœux. C’est la valeur scientifique réelle des travaux individuels ou collectifs qui a quelque valeur aux yeux des législateurs et non pas les vœux votés dans les Congrès.
c) le même sujet traite M. Benedikt, de Vienne, qui préconise l’alliance des juristes, des biologistes, des sociologues et des anthropologues.
d) De la nécessité de considérer l’examen psycho-moral de certains délinquants comme un devoir de l’instruction à leur charge par M. le docteur Paul Garnier, médecin en chef de la Préfecture de Paris. Le rapporteur cite un grand nombre d’erreurs judiciaires déplorables (il en a constaté 255 en cinq ans chez les malades soumis à son examen), qui auraient pu être évitées par un examen psycho-moral préalable, fait pendant l’instruction.
e) Des mesures applicables aux incorrigibles et de l’autorité apte à en fixer le choix.
Cette importante question donna lieu à 4 rapports de M. M. Van Hamel, professeur à l’Université d’Amsterdam qui préconise pour les incorrigibles la détention indéterminée avec examen périodique et une grande latitude laissée à l’autorité compétente pour l’appréciation du cas. Cette autorité ne doit pas être administrative mais toujours d’ordre judiciaire.
Alimena professeur à l’Université de Naples, qui n’est pas venu au Congrès. Voici les conclusions de son rapport:
«On peut ramener à trois les mesures à prendre contre les incorrigibles;
1: Emprisonnement prolongé et augmenté en proportion du nombre des récidives;
2: Pour les délinquants qui se rendent coupables de petits délits, surtout s’ils sont récidivistes, abolition des courtes peines d’emprisonnement et leur remplacement par le travail obligatoire: dans des établissements spéciaux; dans des compagnies de travail ou dans des œuvres de colonisation intérieure.
3: Relégation ou déportation perpétuelle pour les criminels qui ont surpassé un maximum de récidives.
L’autorité apte à faire choix entre ces mesures est, en général, l’autorité judiciaire pénale.»
Thiry, professeur à l’Université de Liège, est d’accord avec M. van Hamel sur la détention non pas perpétuelle (car il croit à l’amendement des récidivistes dits incorrigibles) mais indéterminée, indéfinie. D’autre part il n’est pas pour l’intervention judiciaire dans la fixation et le prolongement de la détention. Il pense que la responsabilité administrative, la surveillance exercée par les comités de patronage et le barreau suffisent pour écarter tout danger d’arbitraire. M. Thiry qui est philanthrope, insiste tout particulièrement sur l’efficacité morale de la charité.
J. Maus, docteur en droit et en philosophie, de Bruxelles, dont voici les conclusions:
«Les mesures à prendre à l’égard des récidivistes endurcis doivent tendre d’abord à les mieux connaître; à renvoyer dans les prisons-asiles ceux dont la récidive relève, pour une part sérieuse, d’une cause pathologique; à augmenter considérablement et progressivement la durée de la peine jusqu’à la perpétuité pour les crimes et les délits assez graves; enfin à rendre la répression plus subjective, en l’appropriant, dans un but d’amendement, à l’état du sujet et à la nature de la délinquance.
Cette œuvre difficile demande non seulement des spécialistes, joignant à l’expérience des connaissances en psychiatrie; elle ne peut être accomplie sans le concours de sincères dévouements.»
f) Des caractères de l’incorrigibilité par M. le Dr. Morel, médecin en chef de l’asile Guislain à Gand. Savante étude de médecine mentale sur les incorrigibles qui relèvent plus ou moins de la psychiatrie.
g) De la suggestion hypnotique dans ses applications à l’éducation des enfants vicieux et incorrigibles par M. le Dr. Berillon qui cite des observations de son expérience personnelle.
h) Influence de l’hérédité alcoolique sur la folie et la criminalité par M. le docteur de Vaucleroy, professeur d’hygiène à l’école militaire. L’auteur étudie la descendance des alcooliques au point de vue de la fréquence des aliénés et des criminels chez les enfants des ivrognes.
i) L’inversion génitale et la législation a fait l’objet de deux rapports
1) par M. le Dr. L. de Rode, vice-président de la Société de médecine mentale, de Belgique, qui [est] partisan du système pénal franco-belge qui subordonne à la publicité la peine de l’inversion.
2) par M. le Dr. Hubert, professeur à l’Université de Louvain, dans le comité d’accord avec le rapporteur, n’a publié que les conclusions dans un but facile à comprendre. Voici ces conclusions:
«Les invertis du sens génital, avant toute procédure, doivent être soumis à l’examen du médecin. Le médecin seul a compétence pour décider si le prévenu est un aliéné responsable, à colloquer dans un hospice où l’on peut essayer de le guérir, ou un vicieux et un criminel, à envoyer devant les juges. Pour le vicieux ou le vicié, je demande la sévérité: l’inverti doit être mis hors la société et placé au rang de la bête, dont il a pris le caractère, parce qu’il déshonore l’espèce et qu’il est devenu dangereux. Il ne peut, en effet, arriver à ses fins sans corrompre ou pervertir les autres.»
j) Les prisons-asiles et les réformes pénales qu’elles entraînent par M. le Dr. de Soeck, médecin-adjoint de la maison de santé d’Uccle (près Bruxelles) et M. Paul Otler, avocat à Bruxelles. Les rapporteurs préconisent la création d’asiles spéciaux pour certaines catégories d’aliénés criminels. Ces conclusions sont formulées en un avant-projet de loi inspirées des propositions dont sont saisies les chambres belges et italiennes. Les rapporteurs demandent que l’on interne dans ces établissements spéciaux:
«1: Tous ceux qui, soit dans un asile d’aliénés, soit en dehors d’un asile, étant en état de trouble mental et ayant des mœurs dépravées ou des habitudes perverses, ont commis ou tenté de commettre un des actes qualifiés de crimes ou délits par la loi;
2: Tous ceux qui, condamnés à des peines d’emprisonnement pour crimes ou délits, seront atteints de troubles mentaux au cours de leur détention;
3: Tous les prévenus de crime ou délit à charge desquels les faits matériels de l’infraction ont été prouvés, mais qui sont reconnus par expertise médicale en état de trouble mental.»
k) Dans quelle mesure est-il désirable et praticable d’entreprendre des études de psychologie et de psycho-pathologie criminelle dans les prisons? par M. le professeur Van Hamel d’Amsterdam.
l) Nécessité d’introduire l’étude de l’anthropologie criminelle dans les cliniques psycho-pathologiques et de la rendre obligatoire pour les étudiants en médecine et en droit par M. le Dr. Winkler, à Utrecht.
m) De la nécessité de remplacer, dans le programme universitaire, le cours de psychologie par un cours de psychologie expérimentale et de créer des laboratoires de psychologie, par M. J. J. van Biervliet, professeur à l’Université de Gand.
Le Congrès était placé sous le haut patronage du gouvernement belge. Son comité d’organisation avait nommé M. Jules Lejeune ministre de la Justice comme président d’honneur.
De nombreux délégués officiels avaient été envoyés soit par les gouvernements, soit par les académies et d’autres corps scientifiques. Outre la plupart des États européens il y avait des délégués des États-Unis, du Brésil, du Mexique, du Paraguay, de la Perse, de la Chine, du Japon.
Une séance solennelle d’ouverture eut lieu le dimanche 7 août, à 9 heures, au palais des Académies.
Avant la séance M. Semal, président du Congrès, présenta les délégués étrangers à M. le ministre Lejeune.
M. Lejeune ouvre la séance en souhaitant la bienvenue aux membres du Congrès au nom du gouvernement belge et de la Belgique. Il remercie le Congrès d’avoir choisi Bruxelles pour sa troisième session. Il parle des appréhensions et des méfiances qu’avaient soulevées les premières recherches de l’anthropologie criminelle; mais il ajoute que l’époque actuelle est glorieuse pour cette science nouvelle.
L’organisation de la lutte contre le crime, les procédés à mettre en œuvre pour améliorer le système pénal, la discussion des principes et de l’efficacité des moyens de répression dont les lois arment la justice sociale, les mesures à prendre pour la défense sociale contre la contagion du vice et contre les attentats inconscients de la démence, tout cela est devenu le domaine de l’anthropologie criminelle. À mesure que sa zone d’exploration se dessine plus nettement, les préventions s’apaisent, les méfiances se dissipent et la conciliation se fait entre les réalités physiques et les réalités morales qu’elle étudie.
Répartir les responsabilités, fonder l’œuvre de la législation pénale, telle est l’œuvre que le Congrès poursuit pour le triomphe de la vérité et de la justice, et pour le bien de l’humanité.
Ces paroles sont couvertes d’applaudissements puis le Congrès confirme par acclamation le bureau provisoire du comité d’organisation dans son mandat.
M. le Dr. Semal, président du Congrès, directeur de l’asile des aliénées de l’État, à Mons, après avoir remercié, selon l’usage ses collègues, définit à son tour le but de l’anthropologie criminelle.
Cette science, dit-il, est dominée par un principal souci, celui d’épargner le plus possible à la Société le regret d’avoir frappé des irresponsables, tout en lui donnant des moyens plus sûrs d’assurer son repos.
Ce sera une gloire contemporaine d’avoir imprimé aux sciences pénales ce mouvement réformateur qui adjure la société d’exercer, dans la répression, la protection éclairée qu’elle doit, même au plus humble et au plus incommode de ses membres, d’avoir affirmé que l’intérêt de la société est lié à l’accomplissement de ce devoir, puisque ainsi se découvriront et les sources de la criminalité et les moyens de la combattre.
La Belgique a le droit de s’enorgueillir des progrès déjà accomplis dans cette voie. M. Semal en cite pour preuve la loi sur la condamnation conditionnelle, celles de la protection de l’enfance, l’organisation des patronages des détenus libérés, etc.
Le président garantit à toutes les opinions une liberté pleine et entière. Je ferai observer à cette occasion combien en effet les discussions du Congrès de Bruxelles ont été plus dignes et plus courtoises que celles du Congrès d’Anvers de 1890 sur le patronage des détenus libérés et la protection de l’enfance4 où les orateurs étaient fréquemment interrompus et où les clameurs de l’assemblée empêchaient même les membres de faire leurs propositions (voir les Comptes-rendus du Congrès d’Anvers p. 382, entre autres).
M. Semal dit que l’anthropologie criminelle a vu le jour sous un climat brûlant qui en a hâté la maturité. Le Congrès de Paris l’a assise sur des bases solides. L’idée directrice du congrès de Bruxelles est la recherche des causes qui font fléchir la volonté et les moyens de protection de la Société qu’elle implique contre les délinquants.
Les études pathologiques sont nécessaires pour le criminaliste et M. Semal insiste sur la large part qui est faite à ces études dans le programme du congrès, notamment celles sur les observations morbides, les suggestions criminelles, etc. Le président dit que les questions intéressant plus spécialement la sécurité publique sont aussi très largement représentées au programme et il termine par des paroles de félicitations à tous ceux qui auront assuré l’œuvre de la justice par la recherche de la vérité.
Après la nomination des présidents d’honneur étrangers la séance est levée avant 4 heures.
Pendant la semaine suivante, du Lundi 8 Août au Samedi 19, inclusivement, le Congrès a tenu chaque jour deux séances, abondamment remplies, le matin de 9 heures à midi, et l’après-midi de 2 heures à 5 heures et même plus tard. Le mercredi après-midi a seul été consacré à une visite à l’asile des aliénées de Mons, dont nous reparlerons plus tard, ainsi que des réceptions officielles, des concerts et banquets auxquels les membres du Congrès étaient conviés tous les soirs.
Voici l’ordre du jour des séances tel qu’il a dû être modifié suivant les circonstances:
Lundi 8 Août
Séance à 9 heures du matin. L’absence de M. M. Bronardet et Manouvrier, rapporteurs principaux des questions du 1er groupe (anthropologie criminelle) ayant empêché de suivre au programme projeté, on traite dans cette séance la question de l’obsession criminelle morbide et spécialement de l’obsession du meurtre. (Rapports de M. M. Magnau et Ladame5).
À cette occasion le Dr. Paul Aubry a demandé que le congrès étudiât dans sa prochaine session les moyens prophylactiques possibles qui empêcheraient la presse de publier avec détails la relation des crimes et les comptes-rendus des cours d’assises. Le président fit remarquer à M. Aubry qu’en Belgique cette proposition n’avait aucune raison d’être, car ce pays jouissait de la liberté de la presse. Nous pensons cependant que cette proposition mérite un examen sérieux et nous espérons que M. Aubry, auteur d’un ouvrage célèbre, «La contagion du meurtre», la développera au prochain congrès.
Dans cette même séance vint la discussion du rapport de M. Dallemagne sur l’étiologie fonctionnelle du crime. Ce rapport provoque un débat qui menace de se perdre dans la métaphysique, le rapporteur ayant affirmé que la conscience est une propriété de la matière.
Séance de l’après-midi à 2 heures. Communications de Mme Dr. Pauline Tarnowsky de St Petersburg sur les organes des sens chez les femmes criminelles; de M. le prof. Lacassagne, de Lyon, sur les sentiments primordiaux des criminels; de M. Cuylits, sur l’origine morbide des caractères reconnus chez les criminel-nés; de M. Motet sur l’enfance criminelle (le mobile du crime chez l’enfant et chez l’adolescent). À l’occasion de cette communication le délégué officiel du céleste empire, Ou-Tschong-Lien a raconté qu’en Chine les parents sont responsables des délits de leurs enfants et les autorités locales des crimes de leurs administrés. Le principe pénal des Chinois c’est que le délinquant n’est jamais le seul coupable, mais les personnes qui l’entourent doivent partager jusqu’à un certain point sa responsabilité. M. le prof. Prius, de Bruxelles, se rallie en partie à cette manière de voir, qui tient compte des influences du milieu où a vécu le délinquant, et propose comme remède, de multiplier les juges locaux de façon à ce que ceux-ci connaissent leurs justiciables. Cette dernière thèse, très contestable, n’a pas été discutée.
Mardi 9 Août
Séance à 9 heures du matin. C’est la grande journée. La lutte mémorable entre les écoles classiques et scientifique qui s’est terminée, au contentement général, par la conciliation. Avant le rapport de M. Dimitri Drill, de Moscou, qui devint l’occasion de ce débat, le Congrès entendit trois communications de M. M. Th. Roussel (de Paris) Vassitch (Belgrade) et Legrain (de Paris) se rattachant aux questions soulevées par M. Motet sur l’enfance délinquante.
Séance à 2 heures de l’après-midi. La conciliation qui s’est faite le matin entre les juristes et les anthropologistes, grâce à l’intervention de l’abbé de Baets, s’affermit dans les discussions de cette séance et tout le monde s’en félicite. On termine les discussions sur les signes de dégénérescence et les types criminels.
Mercredi 10 Août
Séance à 9 heures du matin. Discussions sur les suggestions criminelles. Toutes les opinions sont représentées au Congrès. Pour les uns (M. M. Benedikt, Mendel, de Berlin, etc.) ces suggestions n’existent pas. C’est le produit d’une «fantaisie scientifique». On en a fait des simulations dans les salons ou dans les laboratoires. Mais elles n’ont aucune réalité pratique. Pour les autres (M. M. Voisin, Bérillon, Masoin, Ladame, etc.) elles sont au contraire bien réelles et très dangereuses, quoique assurément beaucoup plus rares qu’on ne le croit peut-être dans certains milieux. Il n’y en a pas encore d’exemples officiellement reconnus devant les tribunaux, il est vrai, mais les observations qui ont été faites par un grand nombre d’observateurs sérieux ne laissent aucun doute sur la possibilité des suggestions criminelles.
Mercredi 10 Août, après-midi. Course à Mons pour visiter l’asile des aliénées.
Jeudi 11 Août
Séance à 9 heures du matin. Discussion sur le rapport de M. Gauckler, professeur à Caen «De l’importance respective des éléments sociaux et des éléments anthropologiques dans la détermination de la pénalité.» M. von Liszt, professeur à Halle, appuie les conclusions de M. Ganckler en insistant surtout sur le facteur social. L’orateur, un des fondateurs de l’union internationale du droit pénal, invite les médecins anthropologistes à suivre les réunions de cette société.
M. Manouvrier résume le rapport dont j’ai donné plus haut quelques extraits. M. Winkler traite de la nécessité d’introduire l’étude de l’anthropologie criminelle dans les cliniques psycho-pathologiques et de la rendre obligatoire pour les étudiants en médecine et en droit.
À la fin de la séance il est déposé la proposition suivante:
Le Congrès décide qu’outre l’examen des questions anthropologiques, l’étude détaillée des facteurs sociaux de la criminalité figurera à l’ordre du jour du prochain congrès, en même temps que l’examen pratique des réformes à apporter à ce point de vue au droit pénal positif.
Enfin le Dr. Paul Aubry fait une communication sur le «vitriolage» qu’on a le tort de considérer, dit-il, comme un crime passionnel.
Séance à deux heures de l’après-midi. Séance royale dans la grande salle des audiences solennelles. Rapports de M. M. Tarde sur la criminalité des foules et Hector Denis sur la criminalité et la crise économique. Le roi fit son entrée à 4 heures. La discussion ne fut pas brillante. On entendit beaucoup de banalités sortir de la bouche des orateurs qui parlèrent sur les crimes des foules. M. le Dr. Garnier, de Paris, cependant, relevant cette phrase de M. Tarde, «la foule est une sauvagesse, une bête répulsive et maniaque», dit que la foule est capable aussi d’idées nobles et généreuses. Il faut savoir distinguer entre l’entraînement tumultueux et le salutaire besoin d’entente indispensable au progrès. Du reste la plupart des meneurs violents dans les foules criminelles sont des dégénérés, des alcooliques, des aliénés.
Vendredi 12 Août
Séance à 9 heures du matin. On aborde les applications de l’anthropologie criminelle par la discussion du rapport de M. Garnier sur la nécessité de considérer l’examen psycho-moral de certains prévenus ou accusés comme un devoir de l’instruction. Les conclusions du rapporteur sont vivement appuyées. Un médecin militaire belge annonce qu’il dirige un service d’observation médicale, organisé depuis 1885 par le Département de la guerre. Tous les dossiers doivent attester que les prévenus jouissent de l’intégrité de leurs facultés mentales. En cas de doute on les envoie, avant l’instruction, en observation à l’hôpital militaire de Malines.
Puis on passe aux rapports sur les incorrigibles
Séance à 2 heures de l’après-midi. Continuation de la discussion sur les incorrigibles et les mesures qui leur sont applicables. Ensuite rapport de M. M. Otler et de Boeck sur les prisons-asiles. À cette occasion M. Delatour, directeur au ministère de justice, communique quelques renseignements statistiques sur l’aliénation mentale dans les prisons belges, desquels il résulte que la proportion des détenus reconnus aliénés n’a pas augmenté, comme on aurait pu le craindre, avec la création des médecins aliénistes inspecteurs. En effet on comptait:
en 1837 une proportion moyenne de 1% aliénés sur le total des condamnés
en 1890 une proportion moyenne de 1,1% aliénés sur le total des condamnés
et depuis l’inspection médicale,
en 1891 une proportion moyenne de 1,8% aliénés sur le total des condamnés
en 1892 (les premiers 6 mois) une proportion moyenne de 1,8% aliénés sur le total des condamnés
Dans la vie civile on a compté les rapports suivants:
en 1877 – 0,14% d’aliénés par rapport à la population totale
en 1890 – 0,17% d’aliénés par rapport à la population totale
Samedi 13 Août
Séance à 9 heures du matin. On continue les applications de l’anthropologie criminelle. Discussion du rapport de M. de Rykère sur l’anthropométrie du docteur Bertillon. Ce système est déjà en usage en Roumanie en Angleterre. On va l’introduire en Belgique. Ses avantages sont appréciés de plus en plus partout où il a été expérimenté. Tous les orateurs sont d’accord pour demander que le système anthropométrique soit généralisé.
Dans cette séance viennent encore en discussion, la communication du prof. de Vaucleroy sur l’influence de l’hérédité alcoolique sur la folie et la criminalité, et la question de l’inversion génitale.
Séance à 2 heures de l’après-midi Séance de clôture.
M. le professeur Heger, vice-président, résume les travaux du congrès. Il passe en revue les diverses questions soumises au Congrès et les discussions qu’elles ont soulevées. Il constate que personne n’a entrepris de défendre le type criminel de Lombroso. Il rappelle la brillante discussion du Mardi, entre l’ancienne et la nouvelle école juridique et il célèbre l’alliance des médecins et des juristes anthropologistes.
De tels travaux, dit-il en terminant, nous donnent la conviction que l’intelligence humaine résoudra les problèmes complexes qui s’imposent et fera une société qui mérite d’être défendue.
M. le baron de Reuris, ministre d’Italie à Bruxelles, qui a suivi régulièrement les travaux du Congrès, a exprimé les sentiments de vive sympathie du gouvernement italien et a remercié tous ceux qui ont rendu hommage aux absents, tant en regrettant que ces absents ne soient pas venus défendre les principes de l’école italienne et démontrer que celle-ci n’est pas morte, car aujourd’hui elle est légion.
Le congrès adopte ensuite les vœux suivants:
1: La nécessité d’introduire dans les Universités l’étude de l’anthropologie criminelle et de la rendre obligatoire pour les étudiants en médecine et en droit.
2: L’établissement dans tous les pays des bureaux anthropométriques avec bureau central à Paris ou à Bruxelles.
3: Nécessité de compléter la feuille actuelle de renseignements par un signalement psychologique et physiologique des prévenus.
4: La création d’asiles spéciaux (prisons-asiles)
5: Nécessité d’un examen psycho-moral des détenus pour ce qui concerne la libération conditionnelle.
6: Un dernier vœu tendant à faire joindre aux statistiques criminelles les données économiques comparatives.
Plusieurs propositions sont faites pour le choix du lieu de réunion du IVe Congrès – Amsterdam – Chicago – Une ville d’Italie, d’Allemagne ou de Russie. Mais la Suisse rallie la presque unanimité du Congrès qui décide par acclamation que le IVe Congrès d’anthropologie criminelle aura lieu à Genève en 1896.6
Le soussigné prend alors la parole pour remercier les membres du Congrès et leur témoigner combien il est heureux et fier de voir ainsi acclamer la Suisse, sa patrie. Il donne lecture des dépêches du Conseil fédéral et du Conseil d’État de Genève qui souhaitent d’avance la bienvenue aux Congressistes. Ces dépêches sont vivement applaudies.
Des remerciements chaleureux sont notés au comité d’organisation et au bureau, à son activité, à son tact, à son dévouement.
M. le Dr. Semal prononce le discours de clôture et enregistre le bulletin de la victoire éclatante de l’anthropologie criminelle. Dans les précédents congrès, à Rome et à Paris on avait célébré les fiançailles de l’anthropologie et du droit; c’est à Bruxelles que leur union définitive s’est accomplie. L’absence des témoins légitimes assombrirait seule ce grand jour sans les applaudissements qui ont souligné déjà les paroles destinées à rendre justice aux absents. M. Semal conclut en remerciant le roi, le ministre de la justice et tous les savants étrangers et belges qui ont pris part au congrès. Il mentionne spécialement les délégués des gouvernements étrangers. «Votre mission, leur dit-il, a été fructueusement remplie. Vous pourrez dire à ceux qui vous ont délégués qu’ils peuvent compter sans scrupule avec l’anthropologie criminelle, puisqu’elle est toujours assurée de rester fidèle à sa devise: La justice par la science et la philanthropie.»
Les travaux du Congrès sont déclarés clos.
Dimanche 7 Août à 9 heures du soir. Réception officielle chez M. le ministre de la Justice, président d’honneur du Congrès.
Lundi 8 Août à 8½ du soir. Soirée et concert dans les salons de la Grande-Harmonie (rue de la Madeleine).
Mardi 9 Août Banquet offert aux délégués des gouvernements étrangers et aux présidents d’honneur du Congrès par le bureau à 8h. à l’Hôtel de Vienne.
Mercredi 10 Août à 1 h. après-midi, un train spécial emmenait à Mons les membres du Congrès pour visiter l’asile des aliénées. À la gare de Mons un tram attendait les excursionnistes pour les conduire à l’Hôtel de ville où la bienvenue leur a été souhaitée par le bourgmestre entouré de ses échevins et conseillers. M. Lejeune ministre de la Justice a répondu, en remerciant au nom des membres du Congrès. – Un livre d’or où s’inscrivent les membres est inauguré à cette occasion. – À 9h. le tram conduit les membres du congrès au bel asile dirigé par M. Semal. Cet établissement est admirablement organisé et tenu. Pendant le diner, servi dans la grande salle des fêtes de l’établissement, un orchestre et des chœurs formés par les malades ont fait entendre les plus beaux morceaux de leur répertoire. Une malade a récité un gracieux compliment à l’adresse des membres du Congrès. Cette visite laissa à tous une impression ineffaçable.
Jeudi 11 Août à 8 heures du soir Réception officielle des membres du Congrès par le roi, au palais de Bruxelles.
Vendredi 12 Août à 8h. Concert au Waux-hall.
Samedi 13 à 6 heures. Banquet d’adieu par souscription au restaurant Degraa, où l’on s’est donné rendez-vous à Genève, dans quatre ans, en 1896, au prochain Congrès d’anthropologie criminelle.7
- 1
- CH-BAR#E14#1000/39#936*. Ce rapport est présenté au Chef du Département de l’intérieur, le Conseiller fédéral Karl Schenk, par le médecin genevois Paul Ladame, Délégué suisse au IIIe Congrès d’anthropologie criminelle à Bruxelles. La note manuscrite en haut de la première page du document se lit Kanzleitisch 13 Sept. 92 - 16 Sept. 92. ans J[ustiz]. & Pol[izei]. Dep[artement] 20 Sept. 92. et correspond au contenu du PVCF No 4070 du 20 septembre 1892, CH-BAR#E1004.1#1000/9#8139*, qui précise que le rapport est déposé pour consultation sur le «Kanzleitisch» pour les membres du Conseil fédéral du 13 au 16 septembre 1892 et qu’il est transmis le 20 septembre 1892, à la demande du Conseiller fédéral Louis Ruchonnet, aux actes du Département de justice et police.↩
- 2
- Le Conseil fédéral décide de ne pas envoyer de délégué à ce congrès qui a lieu pendant l’Exposition universelle à Paris en 1889, cf. le PVCF No 3375 du 16 août 1889, cf. dodis.ch/63129.↩
- 3
- Cf. L’obsession du meurtre. Rapport présenté par M. le Dr. Ladame, ancien président d’honneur du Congrès de Paris. Extrait du compte rendu du 3e Congrès d’anthropologie criminelle, tenu à Bruxelles en 1892. Bruxelles 1892, CH-BAR#E14#1000/39#936*.↩
- 4
- À propos du Congrès d’Anvers de 1890 sur le patronage des détenus libérés et la protection de l’enfance, cf. le dossier CH-BAR#E14#1000/39#929*.↩
- 5
- Cf. L’obsession du meurtre. Rapport présenté par M. le Dr. Ladame, ancien président d’honneur du Congrès de Paris. Extrait du compte rendu du 3e Congrès d’anthropologie criminelle, tenu à Bruxelles en 1892. Bruxelles 1892, CH-BAR#E14#1000/39#936*.↩
- 6
- Le IVe Congrès d’anthropologie criminelle a lieu à Genève du 24 au 29 août 1896, cf. à ce propos le dossier CH-BAR#E14#1000/39#990*.↩
- 7
- Le IVe Congrès d’anthropologie criminelle a lieu à Genève du 24 au 29 août 1896, cf. à ce propos le dossier CH-BAR#E14#1000/39#990*. Note manuscrite à la fin du rapport: An den Bundesrath zur Kenntnisnahme Bern, 12. September 1892. Eidg. Departement des Innern Schenk.↩