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Diplomatic Documents of Switzerland, vol. 27, doc. 195
volume linkZürich/Locarno/Genève 2022
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Archive | Swiss Federal Archives, Bern | |
▼ ▶ Archival classification | CH-BAR#E2001E-01#1991/17#953* | |
Old classification | CH-BAR E 2001(E)-01/1991/17 107 | |
Dossier title | Voyage en Afrique. Généralites, volume I (1978–1979) | |
File reference archive | B.15.22.3 |
dodis.ch/49312Notice du Secrétaire du Chef du Département politique, F. Nordmann1
Note sur l'entretien à Berne, chez le Chef du Département2, avec MM. Georg Sulzer, Sulzer Frères SA, Erwin Bielinski, BBC, Waldvogel, Ciba-Geigy, Daniel, Nestlé, le 19 décembre 1978, à 10.00 h.
M. Sulzer, qui conduit la délégation, lit un texte dans lequel il commence par remercier le Chef du Département de l'avoir reçue. Il s'agit d'un groupe qui s'est constitué uniquement en vue de cet entretien3. Le Président du Vorort, M. von Planta, a été informé, ainsi que M. Borgeaud, de la Société suisse des constructeurs de machines (VSM). L'objet de cet entretien est de rappeler l'intérêt de notre industrie à de bonnes relations avec tous les pays africains, en premier lieu avec l'Afrique du Sud.
L'industrie déplore l'influence croissante de la politique sur l'économie, qui pèse sur les excellentes relations qu'elle a réussi à nouer sur le marché sud-africain. Elle redoute les sanctions qui pourraient être décidées et qui mettraient en cause nos relations économiques avec l'Union sud-africaine à propos de la Namibie, bien que la Suisse ne soit pas formellement tenue de les appliquer4. Le précédent de l'embargo sur les armes5 fait craindre à la délégation que la Suisse ne se sente obligée d'appliquer elle aussi des sanctions. Or, dans ce cas, elle le ferait certainement avec plus de rigueur que les parties plus directement intéressées et cela ne manquerait pas d'avoir évidemment des répercussions défavorables sur nos relations6.
M. Waldvogel explique pourquoi Ciba-Geigy continue d'investir en Afrique du Sud, comme partout ailleurs dans le monde. Il s'agit d'un transfert de technologie et de produits directement utiles aux populations. Tout en déplorant l'apartheid, Ciba-Geigy estime que ce problème ne peut pas interférer avec les relations commerciales. En revanche, la maison fait tout ce qui est possible sur le plan humain7.
M. Bielinski fait valoir que BBC a des activités importantes en Afrique du Sud et au Nigéria; que ses activités en Afrique occidentale rayonnent à partir de trois centres, qui sont la Côte d'Ivoire, le Sénégal et le Cameroun, qu'elle s'efforce d'assurer la promotion des Noirs bien au-delà de ce qu'exigerait la loi. Les sanctions mettraient BBC dans une situation difficile, mais la maison rappelle qu'il ne faut pas se laisser influencer par une situation politique éphémère, comme le montre l'affaire de Cabora Bassa8.
M. Daniel, de Nestlé, déclare qu'il en va de même pour sa maison qui, depuis 1925, possède 10 usines en Afrique du Sud, employant 3000 hommes, dont 500 Blancs seulement, et il estime que la production serait utile à la population quelle que soit l'évolution du régime, mais il ne saurait être question de fermer sous l'effet d'éventuelles sanctions et rappelle qu'au Chili Nestlé a continué de fonctionner avant, pendant et après Allende9.
En Rhodésie, Ciba-Geigy n'a qu'un dépôt, Bulawayo, et seulement commercial, et Sulzer, des mines exploitées par l'Afrique du Sud. En Namibie, rien.
Le Chef du Département remercie la délégation, déclare à titre personnel combien il est attaché aux entreprises représentées, et comme Suisse, combien il en est fier.
Il ne s'est jamais identifié aux critiques qui lui ont été adressées.
Il ne peut pas dire ce qui arriverait si l'ONU décidait des sanctions, mais les quatre piliers de notre politique étrangère, dont l'universalité nous entraîne à reconnaître tous les États du monde, s'appuient sur la Constitution qui proclame la liberté du commerce et de l'industrie. Dans ce domaine, le Conseiller fédéral n'a pas de compétences et c'est le Conseil fédéral comme tel, et non le Département, qui décidera. À titre personnel, le Chef du Département ajoute que si on lui demande en Afrique si la Suisse va suivre des sanctions éventuelles, il ne serait pas en mesure de répondre, mais, en tout cas, il peut assurer la délégation qu'il ne tiendra pas de propos qui soient défavorables à ses intérêts en Afrique du Sud. Il promet de recevoir la délégation à nouveau à son retour.
M. Zwahlen prend alors la parole. Il souligne certains éléments préoccupants pour nous dans la situation actuelle, où le Nigéria est devenu notre principal client en Afrique10. D'autre part, la situation économique en Afrique du Sud se dégrade du fait de l'économie de guerre qui est en train de s'installer11. On restreint la demande et l'excédent commercial augmente, si bien qu'on assiste à des sorties massives de capitaux, près de 700 mio de rands au cours des sept premiers mois de cette année, au lieu d'un afflux qu'on avait constaté jusqu'alors. Or, l'Afrique du Sud aurait besoin d'une croissance très forte pour faire face au chômage. Sa politique actuelle, qui va à l'encontre des nécessités, suscite une augmentation des pressions sociales. D'autre part, les importations de pétrole augmentent (9/10 proviennent de l'Iran).
Or, les pays industrialisés accentuent leurs pressions dans les enceintes internationales sur des pays comme le nôtre et nous sommes obligés de nous défendre, notamment sur la question des multinationales12. En contrepartie, nous pourrions nous attendre à une certaine discrétion de la part de certaines entreprises, car nous sommes dans une situation difficile et nous nous efforçons de maintenir un équilibre fragile, par exemple face aux accusations du Comité des sanctions contre la Rhodésie13. Nous avons à cœur la défense des intérêts économiques, mais nous devons préserver un équilibre, or la perte de nos intérêts au Nigéria, pour le prix de défendre ceux en Afrique du Sud, n'est pas concevable.
M. Hegner fait une analyse de la probabilité de sanctions décrétées par le Conseil de sécurité. Les États-Unis pourraient y être plus favorables que le Royaume-Uni ou la France. La Suisse ne serait pas tenue par d'éventuelles sanctions, mais elles ne devraient pas permettre de les contourner. Il est vrai que les autres pays sont plus flexibles. L'entretien se termine alors, la délégation assurant tour à tour les participants que les entreprises maintiendront un profil bas et qu'elles ne feront pas de publicité sur leurs activités en Afrique du Sud, sauf quand elles ressentent le besoin de s'expliquer devant l'opinion. M. Bielinski relève que le nouveau Ministre14 dont BBC dépend (Mines et énergie) est plus pragmatique que son prédécesseur15.
Un nouveau contact est convenu pour février16.
- 1
- Notice: CH-BAR#E2001E-01#1991/17#953* (B.15.22.3).↩
- 2
- P. Aubert.↩
- 3
- Cf. la notice de H. Kaufmann du 5 décembre 1978, dodis.ch/50397.↩
- 4
- Sur la question d'une prise de sanctions de l'ONU contre l'Afrique du Sud et les conséquences pour la Suisse, cf. DDS, vol. 22, doc. 33, dodis.ch/30386; DDS, vol. 23, doc. 7, dodis.ch/31045 et DDS, vol. 23, doc. 156, dodis.ch/31047; DDS, vol. 24, doc. 60, dodis.ch/33642; DDS, vol. 25, doc. 86, dodis.ch/35680; DDS, vol. 26, doc. 100, dodis.ch/38893; DDS, vol. 27, doc. 106, dodis.ch/49365; la notice de J. Monnier à P. Graber du 28 november 1977, dodis.ch/53897 et le PVCF No 557 du 5 avril 1978, dodis.ch/52128.↩
- 5
- Cf. DDS, vol. 22, doc. 187, dodis.ch/30436.↩
- 6
- Sur les doutes de la Division du commerce du Département de l'économie publique concernant les livraisons de Sulzer SA vers l'Afrique du Sud, cf. la notice de P. R. Jolles à E. Brugger, A. Weitnauer, R. Bindschedler, F. Rothenbühler, B. von Tscharner et R. Madöry du 31 août 1978, dodis.ch/49398.↩
- 7
- Cf. aussi la notice de H. Strauch du 17 décembre 1976, dodis.ch/49458.↩
- 8
- Cf. la compilation dodis.ch/C1638.↩
- 9
- Sur la questions des nationalisations au Chili, cf. DDS, vol. 25, doc. 142, dodis.ch/35858, en particulier note 5. Sur la situation de Nestlé au Chili, cf. le télégramme No 51 de l'Ambassade de Suisse à Santiago de Chili au Département politique du 7 juillet 1973, dodis.ch/38281 et le rapport du Département politique du 18 septembre 1973, dodis.ch/38248.↩
- 10
- Sur l'état des relations commerciales avec le Nigéria, cf. DDS, vol. 27, doc. 181, dodis.ch/49890; la lettre de E. Moser à F. Andres du 21 janvier 1976, dodis.ch/52883; la lettre de E. Moser à F. Hamburger et T. S. Pataky du 30 août 1977, dodis.ch/52880; le PVCF No 2078 du 5 décembre 1977, dodis.ch/52881; la notice de W. Rieser du 5 décembre 1978, dodis.ch/50399 et le télégramme No 316 de W. Rieser à la Division du commerce du Département de l'économique publique du 28 décembre 1978, dodis.ch/49945. Sur les intérêts économiques suisses en Afrique en général, cf. le rapport de E. Hofer du 22 décembre 1978, dodis.ch/50346, en particulier pp. 9–22.↩
- 11
- Cf. la notice de J. Zwahlen à P. Graber du 8 novembre 1977, dodis.ch/54046 et la notice de E. Martin du 20 décembre 1978, dodis.ch/54047.↩
- 12
- Cf. la lettre de P. R. Jolles à S. Marcuard du 19 avril 1977, dodis.ch/49584.↩
- 13
- Sur l'attitude de la Suisse envers les sanctions de l'ONU contre la Rhodésie, cf. la compilation thématique dodis.ch/T1571.↩
- 14
- S. P. Botha.↩
- 15
- P. G. J. Koornhof.↩
- 16
- Cf. la notice de J. Iselin et R. Stauch du 19 mars 1979, dodis.ch/50393.↩
Relations to other documents
http://dodis.ch/49312 | see also | http://dodis.ch/50397 |
http://dodis.ch/50393 | see also | http://dodis.ch/49312 |
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South Africa (Economy) West Africa journey by Pierre Aubert (1979)