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Le Gérant du Consulat de Suisse à Paris, R. Navilie, à la Division des Affaires étrangères du Département politique1

En me référant à mon rapport du 25 août 19422 concernant le statut des Israélites suisses en zone occupée J’ai l’honneur de vous faire savoir que j’ai de nouveau approché les autorités allemandes en vue d’examiner, notamment, avec elles, s’il ne serait pas possible de procéder à la libération de quelques israélites suisses actuellement internés à Drancy pour avoir contrevenu à certaines prescriptions allemandes ou françaises.

Les autorités allemandes ont déclaré, à cette occasion, qu’il leur était difficile de donner suite actuellement à notre désir. Tout au plus, seraient-elles disposées à examiner un ou deux cas exceptionnels. Mon collaborateur a, par ailleurs, insisté auprès desdites autorités pour savoir si elles seraient disposées à envisager une mesure de clémence pour la fin de l’année, la plupart des intéressés ayant, à ce moment-là, 4 mois d’internement à leur actif. Les services allemands compétents, sans pouvoir se prononcer définitivement à ce sujet, m’ont fait savoir qu’ils seraient disposés à examiner une requête dans ce sens vers le milieu du mois de décembre.

En ce qui concerne la situation générale des israélites, il m’a été confirmé que cette question devenait de plus en plus actuelle, les autorités occupantes envisageant la déportation en masse des juifs de la zone occupée. La situation des israélites étrangers, de son côté, n’a toutefois pas reçu de solution définitive. Je vous signale, toutefois, que le Consulat de Turquie procède au rapatriement par convoi de plusieurs de ses ressortissants israélites. Les services allemands m’ont demandé, à ce sujet, si nous serions disposés à procéder, de notre côté, à un rapatriement général des israélites suisses. Ils m’ont confirmé que si vous étiez d’accord avec ce rapatriement, un convoi pourrait immédiatement être organisé et que, notamment, les internés et les épouses françaises israélites de ressortissants suisses pourraient également en faire partie.

Vu l’urgence que présente cette question, il me serait très précieux de connaître votre point de vue au sujet de ce problème3. Vous n’ignorez pas, en effet, que la communauté juive suisse à Paris comprend environ 150 personnes. Si vous étiez disposé à donner votre accord à un rapatriement massif, je vous serais obligé de vouloir bien m’en aviser, afin que je puisse prendre toutes dispositions utiles à cet effet.

Ainsi que je vous l’ai fait savoir dans mon dernier rapport, il n’est pas impossible que les autorités allemandes soient amenées à reconsidérer la situation des étrangers qui, jusqu’à présent, n’étaient pas soumis au port de l’étoile. Il m’a été confirmé dernièrement que cette mesure serait susceptible d’être appliquée à tous les membres de la communauté israélite, quelle que soit leur nationalité. C’est ainsi que, récemment, les israélites hongrois qui avaient tout d’abord été dispensés du port de l’étoile, ont été tout dernièrement astreints à cette mesure. J’ajoute, pour votre information personnelle, qu’à l’heure actuelle 40 000 juifs étrangers plus quelques français ont été déportés dans l’Est; le dernier convoi prévu pour cette année est parti la semaine dernière.