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Diplomatic Documents of Switzerland, vol. 23, doc. 117
volume linkZürich/Locarno/Genève 2011
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Archive | Swiss Federal Archives, Bern | |
▼ ▶ Archival classification | CH-BAR#E2806#1971/57#58* | |
Old classification | CH-BAR E 2806(-)1971/57 5 | |
Dossier title | Présence de la Suisse dans le monde (1965–1970) | |
File reference archive | 13 |
dodis.ch/31341 Rapport du Département politique1 Considérations sur le problème de la «présence de la Suisse» dans le monde2
[…] 3
II. Coordination de la diffusion et de la propagande
La diversité des organismes chargés du rayonnement de la Suisse à l’étranger pose le problème de leur coordination à un niveau élevé. Cette question qui est fréquemment évoquée par la presse de notre pays nécessite, si l’on veut aboutir à une solution efficace, des études élaborées sur des données exemptes de toute idée préconçue.
Le problème de la coordination des organismes chargés du rayonnement de la Suisse à l’étranger avait déjà été abordé en 1946 sur le plan de l’information4. Reconnaissant que notre publicité était assurée à l’étranger du point de vue économique, touristique et culturel et afin de parer à l’absence inévitable de ministère de l’information, on avait alors établi le projet d’un Office suisse de l’information qui visait à informer l’opinion publique étrangère et à répondre aux campagnes de presse dont nous étions l’objet.
Cet Office suisse d’information, qui aurait dû être une centrale de coordination, aurait été chargé des tâches suivantes: – faciliter les relations avec la presse étrangère établie en Suisse; – maintenir une étroite liaison entre la presse suisse, l’ONST et le DPF; – réunir les organisations intéressées à notre publicité à l’étranger pour étudier
la réalisation de projets communs; – étudier la situation particulière de chaque pays et adapter nos moyens
d’information en conséquence; – créer dans la presse mondiale des points d’appui en renforçant et en
complétant ceux qui existent déjà; – procéder pour chaque pays à une enquête, en collaboration avec le DPF,
afin de déterminer les possibilités offertes et constituer, à l’intention de la
presse suisse, une documentation sur la presse étrangère; – réunir tous les articles parus à l’étranger sur la Suisse.
La création d’un Comité de patronage avait été envisagée. Etant donné l’importance de ce Comité, un Bureau restreint, composé de cinq personnes (les représentants de la presse suisse – des milieux patronaux et syndicaux – des CFF, de l’OSEC et de l’ONST) était prévu. Un administrateur délégué, journaliste professionnel, aurait été chargé d’établir la liaison entre la presse suisse et l’organisme prévu.
Si ce projet n’a pas été réalisé tel qu’on le prévoyait en 1946, un certain nombre de ses suggestions ont été prises en considération. C’est ainsi que le Foyer de la Presse étrangère a été créé à Berne et que l’élément de coordination a été réalisé dans une certaine mesure, tout au moins, par les différentes organisations intéressées. Il n’en reste pas moins que si, en 20 ans, d’importants progrès ont été réalisés, les idées évoquées en 1946, de même que celles qui furent discutées par la suite, mériteraient un nouvel examen. La Suisse doit faire face, en effet, à une concurrence accrue de la part de ses concurrents industriels d’une part, et à une très forte augmentation des frais de publicité, d’autre part. Sans vouloir suggérer un projet définitif et concret, on pourrait néanmoins envisager la création d’un Conseil de l’information (ce nom est purement indicatif) qui travaillerait en étroite collaboration avec les orga nisations existantes, dont le travail accompli jusqu’à ce jour est fort appréciable.
Afin de pouvoir fournir un travail efficace, ce conseil devrait pouvoir se réunir fréquemment et travailler selon des méthodes adéquates. C’est ainsi que des groupes de travail pourraient être constitués et que l’on pourrait charger les institutions participant aux travaux de ce conseil d’études spécialisées et de recherches déterminées. On pourrait ainsi mettre un accent particulier sur la continuité du travail, travail qu’il serait nécessaire de prévoir non seulement à long terme, mais également à moyen et à court terme, selon des plans préalablement établis.
Les méthodes de ce conseil devraient être empruntées à celles des études de marché et des relations publiques utilisées par l’industrie privée. C’est ainsi que les programmes de travail devraient être établis en toute connaissance de cause, selon une analyse scientifique du problème en question. Il convient, en effet, de savoir ce qui peut éveiller le plus d’intérêt dans tel ou tel pays et de baser notre propagande, non sur ce qui nous intéresse, mais sur ce qu’attendent les autres de nous. On ne peut, de plus, présenter à tout le monde tous les problèmes de la même façon. C’est ainsi qu’en ce qui concerne l’explication de certains principes de notre politique étrangère, neutralité, non-adhésion à l’ONU5, des plans d’information doivent être envisagés selon les pays auxquels ils s’adressent.
Le travail de ce conseil devrait s’effectuer en étroite collaboration avec certains services du DPF auquel il appartient de procéder à une politique d’information plus active. C’est ainsi qu’afin de faciliter le travail du conseil de l’information, le Service d’information et presse du DPF devrait pouvoir être à même de remplir certaines tâches et bénéficier d’un personnel plus nombreux.
Nos missions diplomatiques pourraient être chargées d’étudier et d’analyser le «marché de l’information» et de suggérer à la Centrale les mesures adéquates. Les procédés auxquels il serait nécessaire d’avoir recours pour réaliser ces analyses devraient, cela est évident, tenir compte du droit international.
On pourrait, d’autre part, envisager de donner, dans certaines de nos ambassades importantes, plus de poids aux relations avec la presse. Un diplomate pourrait être chargé de cette tâche.
La constitution d’un conseil de l’information tel que nous l’avons décrit nécessite une augmentation du budget et du personnel. C’est un inconvénient, mais, et l’alternative est impitoyable, ou l’on arrive, après examen du problème, à la conclusion que la publicité et l’information politique jouent un rôle décisif et l’on s’efforce d’adopter des méthodes modernes et efficaces; ou l’on se contente du système actuel, jugeant que les désagréments qu’il comprend sont supportables.
Cependant, à l’heure actuelle, répétons qu’une analyse scientifique des problèmes et de la façon de les absorber est indispensable.
B. Questions concrètes
I. Politique de solidarité internationale
Ainsi que nous l’avons vu, notre neutralité et notre non-appartenance à l’ONU ne peuvent se justifier aux yeux de l’étranger que par les efforts de col laboration et de solidarité que nous accomplissons. Jusqu’à maintenant, la Suisse a surtout considéré sa responsabilité internationale sur le plan humanitaire et s’est efforcée de compenser sa neutralité sous forme d’actions d’entraide6. Il serait souhaitable d’examiner s’il ne conviendrait pas de dépasser ces limites et de mieux affirmer notre volonté de participer à la vie internationale en collaborant plus étroitement aux travaux des organisations internationales. Mais ces efforts accrus devraient être accompagnés d’une information scientifiquement utilisée pour renseigner l’opinion étrangère sur notre attitude. Et les moyens que nous choisirions pour intensifier notre collaboration internationale devraient, à leur tour, faire l’objet d’une analyse du «marché». Le résultat de cette analyse ne serait pas le seul critère nous permettant de faire le choix; mais il ne saurait être négligé.
II. Les Suisses à l’étranger
a) Les relations entre nos compatriotes résidants à l’étranger et le pays doivent être intensifiées. D’une manière générale, on peut dire que tout ce qui rend, sans nécessité absolue, ces relations plus difficiles et plus compliquées doit être supprimé sans retard. Dans cet ordre d’idées, certaines questions à caractère administratif (règlement consulaire, immatriculation, taxe et contrôles militaires, etc.) mériteraient d’être revues dans un esprit de large compréhension et en dehors de toute réglementation bureaucratique.
b) Nos compatriotes doivent être tenus au courant des problèmes du pays et renseignés régulièrement sur l’attitude de nos autorités. Nous disposons, chez les Suisses à l’étranger, d’un instrument peu onéreux qui permet de faire connaître notre politique dans les milieux les plus divers. Ici, cependant, se pose également une question d’analyse. Il faut procéder avec beaucoup de doigté et savoir choisir les moyens les plus efficaces. Les Suisses à l’étranger sont composés d’éléments trop hétéroclites pour qu’il soit recommandable d’adopter, en l’occurrence, des procédés valables pour tous.
III. Les «maisons suisses»
Dans plusieurs villes existent déjà des centres suisses7. Ils ont donné des résultats tangibles et appréciables. Il conviendrait d’établir un plan (qui s’inscrirait dans le programme à établir par le conseil de l’information) en vue de la création de centres suisses dans d’autres villes. Le choix de celles-ci devrait être le résultat d’une analyse soigneusement préparée. D’une façon générale, il convient de créer des centres suisses qui poursuivent à la fois un but politique, culturel, économique et social. En principe, aucun de ces éléments ne doit avoir la priorité.
IV. Visites officielles8
De nombreux Etats, particulièrement les pays en voie de développement, sont très sensibles à l’attention que les gouvernements étrangers leur portent. Un pays comme le Japon, par exemple, attache beaucoup de prix à la visite d’hommes d’Etats. Le Danemark et la Hollande l’ont compris et y on déjà organisé des visites de ce genre. Notre organisation gouvernementale rend difficile l’exécution d’un tel programme. Avant de chercher des moyens qui correspondent à nos possibilités, il faudrait procéder, ici également, à des analyses en vue d’établir dans quelle mesure ces visites officielles peuvent être rentables.
V. Elargissement des moyens dont disposent les organismes chargés
du rayonnement de la Suisse à l’étranger
a) Ambassades et consulats
Il ne suffit pas d’exiger plus de personnel ou plus d’argent pour nos représentations officielles à l’étranger. Il faut d’abord analyser méthodique - ment et avec une vue d’ensemble le fonctionnement de ces postes et examiner si la répartition des tâches qu’on leur impose se justifie. Cet examen est en cours.
b) ONST, OSEC, Pro Helvetia
En vertu des nouvelles mesures prises par la Confédération, des moyens dépassant de beaucoup ceux dont ces organismes disposaient auparavant leur ont été accordés. Aussi la critique selon laquelle ils disposent de moyens insuffisants est-elle dépassée. En ce qui concerne l’ONST, en effet, un crédit de 9,1 millions lui a été accordé pour la construction et la rénovation des centres suisses de Londres9 et de New York10. Pour les autres agences suisses à l’étran ger, le message du Conseil fédéral11 a prévu une solution dans le cadre du budget annuel que le Parlement sera amené à débattre. Il est, en effet, indispensable de doter l’ONST de moyens suffisants, car la Suisse est obligée de faire face à une concurrence accrue de la part des pays hautement industrialisés qui sou tiennent leur tourisme par l’octroi d’importants crédits. En France, en Belgique, en Italie et en Espagne, par exemple, l’Etat prend à sa charge la totalité des frais de propagande touristique, alors qu’en Autriche et en Allemagne, la participation de l’Etat s’élève à 95% et en Angleterre à 85%. L’ONST doit donc posséder les moyens de lutter contre cette concurrence étrangère si le tourisme suisse veut pouvoir continuer à jour son rôle dans notre vie économique.
En ce qui concerne Pro Helvetia, un plan de quatre ans a été élaboré au terme duquel cette fondation disposera de 2,7 millions pour l’entretien de ses rapports culturels avec l’étranger12 en 1969. Ici, à nouveau, il convient de prendre en considération ce qui se fait à l’étranger. (La Province canadienne du Qué bec, par exemple, consacre 7 millions de dollars par année à sa propagande culturelle). Aussi faut-il, si l’on veut faire admettre par l’étranger une autre image du peuple suisse que celle que nous pouvons constater actuellement dans le domaine culturel, permettre à Pro Helvetia de faire face à la concurrence étrangère et accepter de poursuivre, à cet effet, l’action entreprise en faveur de cette institution.
Selon le plan financier de 10 ans de la Confédération, une augmentation des subventions accordées à ces institutions est envisagée. Mais sera-t-elle suffisante face aux exigences de 1975? Une planification à long terme devrait, avant tout, établir une répartition des crédits envisagés entre la propagande politique, culturelle et économique.
VI. Questions diverses
Les questions «suffrage féminin13 », «articles confessionnels14 », «secret bancaire15 », etc. devraient faire l’objet d’une analyse scientifique afin de déterminer leur importance effective dans nos relations avec l’étranger. Des résultats de cette analyse dépendraient, en partie, les mesures à prendre sur le plan intérieur. A l’heure actuelle, nous ignorons la portée effective des discussions qui se déroulent à l’étranger sur les problèmes précités. Aucune enquête réalisée avec des moyens modernes n’a véritablement été entreprise jusqu’ici.
- 1
- Rapport: E 2806(-) 1971/57 vol. 5 (13).↩
- 2
- Cf. aussi doc. 106, dodis.ch/31336.↩
- 3
- Table des matières: chapitre I: institutions chargées du rayonnement de la Suisse à l’étranger; chapitre II: inventaire des critiques adressées à la Suisse par l’étranger; chapitre III: com ment apprécier les critiques; chapitre IV: conclusions et suggestions. Pour la version com plète du document, cf. dodis.ch/31341.↩
- 4
- Cf. le rapport Vorschläge zur Lösung der Auslandschweizerfragen de E. Scheim du 15 décembre 1945, dodis.ch/5480. Cf. aussi doss. E 2001(E) 1968/82 vol. 76 (B.21.510.1).↩
- 5
- Cf. DDS, vol. 16–21, table méthodique: III.3. La Suisse et l’ONU; DDS, vol. 22, doc. 11, dodis.ch/30597; doc. 36, dodis.ch/30162; doc. 51, dodis.ch/30184; doc. 70, dodis.ch/30218; doc. 89, dodis.ch/30220 et doc. 149, dodis.ch/30242. Cf. aussi doc. 140, dodis.ch/31553.↩
- 6
- Cf. DDS, vol. 23, doc. 19, dodis.ch/31784; doc. 74, dodis.ch/30929; doc. 95, dodis.ch/31334; doc.112, dodis.ch/30931; doc.140; dodis.ch/31347.↩
- 7
- Sur la Maison suisse à Casablanca, cf. DDS, vol. 19, doc. 100, dodis.ch/9401. Sur la Maison suisse à Milan, cf. DDS, vol. 18, doc. 70, dodis.ch/7770, et doc. 123, dodis.ch/8821 et DDS, vol. 19, doc. 52, dodis.ch/8940. Sur la Maison suisse à Paris, cf. DDS, vol. 19, doc. 125, dodis.ch/10161.↩
- 8
- Pour plus d’informations, cf. DDS, vol. 23, doc. 108, dodis.ch/31397, en particulier note 6.↩
- 9
- Cf. dossier E 2001(E) 1976/17 vol. 459 (C.41.149.1).↩
- 10
- Sur l’ouverture du Swiss Center à New York, cf. DDS, vol. 23, doc. 157, dodis.ch/30940.↩
- 11
- Cf. le Message du Conseil fédéral à l’Assemblée fédérale concernant l’allocation d’une contribution fédérale extraordinaire à l’Office national suisse du tourisme pour la modernisation d’agences à l’étranger du 15 juin 1964, FF, 1964, II, pp. 78–95.↩
- 12
- Sur le rôle de Pro Helvetia, cf. DDS, vol. 23, doc. 63, dodis.ch/31092 et doc. 97, dodis.ch/31079. Cf. aussi la lettre de M. Stettler à F. T. Wahlen du 27 octobre 1965, dodis.ch/31236.↩
- 13
- Cf. DDS, vol. 23, doc. 118, dodis.ch/31459.↩
- 14
- Cf. DDS, vol. 23, doc. 141, dodis.ch/31820.↩
- 15
- Sur le secret bancaire et les relations avec les Etats-Unis, cf. DDS, vol. 23, doc. 1, dodis.ch/30938, note 10. De même sur les relations avec la France, cf. DDS, vol. 22, doc. 83, dodis.ch/30715, et doc. 91, dodis.ch/30740.↩
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Neutrality policy Swiss citizens from abroad Cultural relations Questions concerning the Accession to International Organizations Korean War (1950–1953)