Classement thématique série 1848–1945:
2. RELATIONS BILATÈRALES
2.6. ESPAGNE
2.6.1. ÉCONOMIE ET TRANSPORTS
Printed in
Diplomatic Documents of Switzerland, vol. 14, doc. 278
volume linkBern 1997
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Archive | Swiss Federal Archives, Bern | |
▼ ▶ Archival classification | CH-BAR#E2001D#1000/1552#7342* | |
Old classification | CH-BAR E 2001(D)1000/1552 229 | |
Dossier title | Schweiz.-spanische Wirtschaftsverhandlungen (1941–1942) | |
File reference archive | C.21.21.1 • Additional component: Spanien |
dodis.ch/47464
Négociations hispano-suisses1
Compte rendu2 de la séance tenue le 14 décembre 1942 à 14.40
chez Monsieur de Torrenté, Division du CommercePrésident: Monsieur de Torrenté. Présents: MM. Probst et Stopper, de la Division du Commerce;
M. le Directeur Schwab, de la Banque Nationale;
M. Mehnert, de l’Office suisse de compensation;
M. Martinoli, de l’Office fédéral des assurances;
M. Aubaret, du Département Politique.
M. de Torrenté: les délégués espagnols ont accepté de venir négocier à Berne au début de janvier 1943. M. de Torrenté se propose d’établir un projet d’accord qui servira de base aux pourparlers dont l’objet sera le règlement des transferts financiers et celui des paiements d’assurances et de réassurances entre l’Espagne et la Suisse. Il s’agit uniquement aujourd’hui de préciser les grandes lignes, le principe adopté à l’égard des principaux points qui seront mis en discussion.
M. Stopperpasse en revue les dispositions des accords de 1940/41 et 19423 qui ont trait aux questions financières et aux questions d’assurance (voir en annexe le résumé rédigé par M. Stopper)4.
M. Stopper rappelle ensuite que d’après l’enquête effectuée en 19425, les placements suisses en Espagne sont de l’ordre de 84 mio f.s.6, les arriérés financiers, non compris les éventuels arriérés des compagnies d’assurances, atteindront environ 15 mio f.s. à fin décembre 1942. Les moyens à disposition du fonds de transfert se monteront à env. 4,5 mio f.s., auxquels s’ajoute env. 1 mio provenant du clearing autonome de 1936, soit au total env. 5,5 mio f.s., représentant à peu près le tiers des arriérés à régler pour les seuls créanciers financiers, sans compter les arriérés éventuels en matière d’assurance. Or les compagnies d’assurance viennent d’annoncer à la Division du Commerce qu’elles demandent pouvoir disposer du 50% de ce fonds de transfert, et du 50% du fonds de transfert qui sera constitué aux termes du nouvel accord!
ad II.A.2. (Einbezug schweizerischer Passivzinsen). La question se pose d’inclure ou non ces éléments dans le clearing; c’est une question d’alimentation du clearing.
M. de Torrenté: il est probable que les milieux bancaires feront opposition à l’introduction d’un tel élément dans le clearing; faut-il insister ou non?
M. Schwab: il semble à première vue normal d’inclure ces montants dans le clearing. Il est certain que, vu l’origine des dépôts bancaires existant en Suisse, les banques feront opposition en se basant sur le principe du secret des banques, etc. Aussi M. Schwab propose-t-il comme règle d’admettre au clearing les versements que les créanciers espagnols désirent transférer en Espagne. Il ignore l’importance que pourraient avoir ces transferts, mais il estime que c’est une source d’alimentation du clearing à ne pas négliger. Il conviendra également, à son avis, de régler de façon analogue l’amortissement des capitaux, même si seuls de petites quote-parts devaient entrer en considération.
M. de Torrenté: les dépôts espagnols en Suisse sont très importants, plus importants même que les dépôts français, puisque certains vont jusqu’à parler de 1,5 à 2 milliards. Donc, même si une fraction seulement des revenus de ces dépôts devait alimenter le clearing, elle pourrait être d’une importance non négligeable.
M. Mehnerttrouve que nous avons ici l’occasion de créer un précédent fort utile à l’équilibre du clearing. L’argument principal des banquiers («Nos clients retireront leurs dépôts pour les placer dans des pays qui ne sont pas liés par des accords de clearing, s’ils sont contraints de recourir à cette voie de transfert») ne joue plus en l’occurrence, nous avons la possibilité d’insister pour obtenir une meilleure alimentation du clearing.
M. Mehnert propose que l’on décide par arrêté du Conseil fédéral que les intérêts de créances financières espagnoles sont en principe payables au clearing, sauf en des cas exceptionnels où il serait possible de créditer l’ayant-droit en compte spécial. M. Mehnert estime également indispensable d’inclure la compensation des capitaux dans le clearing.
M. de Torrentépréfère la solution proposée par M. Schwab, qui laisse toute liberté aux individus et qui pourra probablement être admise par les banques sans querelle trop sérieuse. La proposition de M. Mehnert lui paraît présenter trop de complications pour les avantages qu’elle procurerait au clearing.
M. Schwab: Si sympathique que soit l’idée de M. Mehnert, nous risquerions en l’adoptant que les Espagnols se demandent pourquoi nous voulons créer avec eux seuls ce système que nous n’avons dans aucun de nos accords avec les autres pays. En outre, M. Schwab est d’avis qu’il ne faut pas envisager un système trop rigide.
M. de Torrenté: à son avis, les banquiers suisses se font aujourd’hui de dangereuses illusions sur les possibilités d’évasion fiscale après guerre. Il est persuadé qu’on en viendra malheureusement pour les banques suisses à un système qui les ramènera à leur standing de 1890 ou de 1900. Il est clair cependant que les banques suisses feront tout pour lutter contre une telle évolution, puisqu’elles croient que l’avenir leur sera favorable.
M. Stoppersouligne qu’en adoptant la solution Mehnert, nous aurions au moins un élément positif pour négocier: de leur côté les Espagnols ont tout bloqué, tandis que nous n’avons aucune arme de ce genre.
M. de Torrenté: nos banquiers se chargeront bien de faire savoir aux Espagnols qu’une telle arme ne serait qu’un sabre de bois. M. de Torrenté estime donc qu’il est préférable de s’en tenir à la proposition Schwab: tout ce qui est transféré passe par le clearing.
Il est cependant entendu que, à titre de sondage, M. Mehnert maintiendra sa proposition devant les banquiers7.
[...]
La séance se poursuit à 16 h avec:
MM. Pessina, Grossmann et Nägeli, pour l’Association des compagnies d’assurance suisses concessionnées;
MM. von Schulthess et Dunant, pour l’Associationsuisse des banquiers;
M. Waldesbühl, pour le groupement Nestlé/Holdings.
La discussion reprend sur les différentes questions examinées au cours de la précédente séance. Je me borne donc à noter ici les éléments nouveaux: [...]
Alimentation du clearing.
M. de Torrentéexpose la solution proposée par M. Schwab de faire passer par le clearing les revenus des créanciers financiers espagnols ayant des placements en Suisse.
MM. v. Schulthess et Dunantdéclarent que les créanciers espagnols préféreraient sans doute renoncer au transfert plutôt que d’être astreints à utiliser la voie du clearing.
M. de Torrenté: ne serait-il pas logique pourtant d’alimenter le clearing au moyen de ces revenus lorsque les créanciers espagnols en désirent le transfert?
M. v. Schulthess: ce serait logique en effet.
M. de Torrenté: avez-vous une idée de la proportion existant entre créances espagnoles «avouables» et créances «inavouables»? Ce serait fort intéressant pour savoir quels éléments peuvent alimenter le clearing.
M. Dunantn’a pas de chiffres, mais estime que les avoirs «avouables» ne forment qu’une très petite part de l’ensemble.
M. Schwab: variations sur un thème connu!
M. Schwab s’en tient à son idée, car il considère cette solution comme importante pour l’ensemble des créanciers suisses.
M. de Torrentéinsiste également, car il est évident que nous avons tout intérêt à utiliser le maximum des moyens dont nous disposons pour équilibrer le clearing. Il faut donc que les banques nous donnent des renseignements plus pertinents.
M. Dunantest prêt à sonder les grandes banques.
M. de Torrentéen revient à son idée: tout ce qui est à transférer en Espagnedevrait passer par le clearing.
M. Mehnertexpose ensuite quelle est sa proposition (voir plus haut).
Cet exposé provoque de la part de M. Dunant la réponse que l’on attendait des banques.
M. Dunants’oppose violemment à l’institution d’un système obligatoire qui n’aurait, estime-t-il, que des inconvénients pour l’économie suisse, sans avantages appréciables pour le clearing, et qui ne ferait que provoquer la fuite des capitaux espagnols.
M. de Torrentérevient toujours à son «Leitmotiv»: quand il y a transfert, pourquoi ne pas prévoir la voie du clearing?
M. Waldesbühl: les capitaux espagnols sont considérables en Suisse et il s’agit très souvent de fonds qui ont échappé au fisc espagnol. On ne risque donc nullement de froisser les Espagnols en proposant un transfert par le clearing. Il serait juste d’ailleurs que les banques participent elles aussi à l’alimentation du clearing.
M. Pessinase range à l’avis de M. v. Schulthess.
M. Dunantadmet la solution Schwab mais pas la solution Mehnert.
M. de Torrentélui demande alors d’indiquer l’importance des placements espagnols.
M. Dunantrépond que le conseil d’administration de l’Associationsuisse des banquiers est opposé à ce genre d’enquête.
M. Schwab: pourquoi persister dans un tel refus? Une enquête minutieuse n’est pas nécessaire. Quelques sondages auprès des grandes banques et de quelques banques cantonales suffiront sans doute.
M. de Torrentérappelle que le clearing n’est alimenté pour le moment que par les paiements commerciaux et qu’il est normal que les milieux financiers fassent également un effort.
M. Dunantpersiste dans son point de vue mais répète qu’il est d’accord de faire quelques sondages. [...]
- 1
- E 2001 (D) 2/229.↩
- 2
- Selon le code «DB», ce texte a été rédigé par P. Aubaret.↩
- 3
- Cf. No 2, note 4 et No 97, note 11.↩
- 4
- Non reproduit.↩
- 5
- Pour les résultats détaillés de cette enquête, cf. E 2001 (E) 2/605.↩
- 6
- Ce montant ne comprend pas les investissements des sociétés d’assurances suisses en Espagne, comme le précise d’ailleurs lors de la même séance le représentant des assurances, P. Pessina. Les capitaux se montent à 36 millions de pesetas environ pour les assurances directes (environ 15 millions de francs suisses). Au total, les investissements suisses en Espagne approchent les 100 millions de francs (déclaration de E. Stopper lors de la même séance).↩
- 7
- Cf. plus bas.↩
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