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Notice du Délégué du Conseil fédéral aux Œuvres d’Entraide internationale, E. de Haller, pour le Chef du Département politique, M. Pilet-Golaz1

TONNAGE POUR LES SECOURS DE CROIX-ROUGE.

Depuis que les Etats-Unis ont cessé d’être neutres, la Croix-Rouge américaine se préoccupe d’assurer la continuité du transport transatlantique des secours destinés aux prisonniers de guerre et autres victimes de la guerre. Jusqu’ici le transport a été fait d’Amérique à Lisbonne par des bateaux américains et de Lisbonne à Marseille par des bateaux affrétés par la Croix-Rouge britannique battant pavillon neutre et portant la marque du CICR, conformément à un accord intervenu avec tous les belligérants.

La Croix-Rouge américaine a songé à l’adoption du régime Lisbonne-Marseille pour le trajet Amérique-Lisbonne et a demandé au CICR si les bateaux qu’elle voudrait affréter pourraient battre pavillon suisse2. Le CICR a répondu que selon la législation maritime suisse en vigueur, seuls les bateaux dont des personnes physiques ou morales de nationalité suisse sont propriétaires peuvent battre le pavillon suisse.

Pour des raisons évidentes, le CICR souhaiterait éviter d’avoir à se rendre acquéreur de bateaux, seule solution susceptible de réaliser le vœu précité de la Croix-Rouge américaine.

M. Cari Burckhardt a reçu hier la visite du Consul des Etats-Unis à Genève. Il semblerait que la Croix-Rouge américaine - qui, dans la circonstance, s’identifie probablement avec le State Department - ayant pris connaissance de la réponse du Comité international concernant les conditions auxquelles est subordonné l’usage du pavillon suisse, souhaiterait que le Gouvernement suisse offrît le bateau «Säntis» pour être affrété par la Croix-Rouge américaine et transporter sous la marque du CICR les envois de secours entre l’Amérique et Lisbonne. M. Burckhardt ayant demandé à son interlocuteur si une demande dans ce sens avait été ou serait présentée aux autorités suisses, il lui aurait été répondu que l’on ne voulait pas faire cette démarche. M. Burckhardt en a conclu que les Américains s’attendent probablement à ce que la Suisse prenne l’initiative d’offrir le «Säntis» dans le but précité3.

Il faut sans doute être reconnaissant à M. Burckhardt d’avoir signalé cette occasion de faire un geste vis-à-vis des Américains s’il est jugé possible et opportun.

Il est clair que ce que les Américains désirent ce n’est pas simplement du tonnage neutre ordinaire pour les secours de Croix-Rouge, mais du tonnage privilégié, c.à.d. bénéficiant, en plus des droits reconnus aux bateaux neutres, des immunités contractuelles et morales spéciales auxquelles ont droit les bateaux portant la marque du CICR.

Sans aller, pour commencer au moins, aussi loin que le souhaiteraient les Américains, on pourrait leur offrir l’excédent de tonnage dont la Confédération dispose actuellement par rapport au chiffre maximum fixé par l’Angleterre, à savoir environ 3000 tonnes par mois, pour autant que Londres renonce à la prétention tendant à l’abandon d’un des bateaux dont dispose la Suisse4.