Argumente für die Teilnahme der Schweiz an der Pariser Konferenz, an der das Hilfsprogramm für den wirtschaftlichen Aufbau Europas ausgearbeitet wird. Die Neutralität der Schweiz steht nicht auf dem Spiel: Gelegenheit, dass das Neutralitätsstatut anerkannt wird.
Printed in
Diplomatic Documents of Switzerland, vol. 17, doc. 10
volume linkZürich/Locarno/Genève 1999
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Archive | Swiss Federal Archives, Bern | |
▼ ▶ Archival classification | CH-BAR#E2300#1000/716#493* | |
Old classification | CH-BAR E 2300(-)1000/716 237 | |
Dossier title | London, Politische Berichte und Briefe, Militärberichte, Band 41 (1947–1947) |
dodis.ch/4500
Vous m’avez fait l’honneur de me demander mon avis2 sur les problèmes que pose l’invitation, adressée à notre Pays par les Gouvernements britannique et français, de participer à l’élaboration d’un programme en vue du relèvement économique de l’Europe3.
A mon sens, il paraît indispensable de répondre affirmativement à l’invitation anglo-française4, et ceci pour les raisons suivantes.
A. Raisons d’ordre général.
1. La coopération de la Suisse aux préparatifs entrepris en vue d’une action de relèvement économique de l’Europe est sans doute conforme à la ligne d’action que notre Pays s’est tracée et qu’il a toujours déclaré vouloir suivre.
2. Le Conseil fédéral a fait savoir qu’il aurait souhaité, à cet effet, une collaboration européenne aussi large que possible.
L’abstention d’une grande Puissance – ayant de grands intérêts en Europe, mais qui est aussi et surtout une puissance à intérêts extra-européens (comme l’est l’URSS qui se tient, en l’espèce, délibérément à l’écart) ne saurait constituer un motif, valable au point de vue moral ou même juridique, de notre abstention – si, en elle-même, la participation suisse est désirable au point de vue national.
3. Au point de vue de la neutralité, comme statut international de la Suisse, rien ne s’oppose, à mon sens, à la participation à la Conférence de Paris5.
La neutralité ne pourrait être en jeu que dès le moment où des mesures de pression seraient envisagées à l’égard de l’URSS. Rien n’est, cependant, plus loin de la pensée des puissances invitantes.
Hier soir encore, M. Anthony Eden a souligné que la porte demeurait largement ouverte à la participation soviétique et que le concours de l’URSS à la conférence des ministres des affaires étrangères prévue pour le mois de novembre permettrait alors, malgré les refus actuels, d’assurer la participation de l’Union soviétique à la reconstruction de l’Europe.
De toutes mes conversations successives avec Sir Stafford Cripps, M. Bevin, M. McNeil, M. Mayhew et d’autres, j’ai retiré la conviction que le problème de la reconstruction économique de l’Europe est, toujours, considéré comme devant – autant que possible – être résolu sur un plan européen très large. On voudrait écarter les «contingences politiques» créées par d’autres.
Un article très sage du «Times» d’hier souligne que les relations commerciales avec les pays de l’Est doivent, en tout état de cause, être poursuivies, si possible développées.
4. Tout en étant un «Etat neutre» dans le cadre de la SdN, la Suisse à l’Assemblée de Genève de 1935 et précédemment déjà, a voté pour constater les «agressions commises» (contre l’Ethiopie6, contre la Chine7). Elle a participé, dans une certaine mesure, à des sanctions, ce qui a créé des difficultés politiques très réelles et graves à notre pays – difficultés acceptées dans l’intérêt général.
Il serait difficilement concevable que les critiques – ou mêmes les difficultés – résultant d’une participation à une conférence constructive, tendant au relèvement de l’Europe puissent motiver moralement l’abstention de la Suisse dans un moment peut-être décisif pour l’histoire de l’Europe.
Ce serait même créer un précédent dangereux que de donner au terme de neutralité une interprétation exagérément abstentionniste. Nous perdrions, en créant une «coutume», notre droit souverain de qualification des cas où notre neutralité est réellement en jeu.
5. Les contributions que la Suisse peut donner, sur un plan général, ne sont pas trop fréquentes. Elle en a donné une par le communiqué, très positif, du Conseil fédéral, publié au moment de la «conférence des Trois» à Paris8. Elle peut en donner une autre, plus grande, par une réponse rapide à l’invitation anglo-française et par sa collaboration active à la conférence à venir.
B. Raisons particulières.
6. Une prise de position positive de la Suisse est, probablement, attendue de la part de certains pays qui sentent une pression directe de l’URSS.
Les Etats du Nord (Suède, Norvège, Danemark) notifieront leur adhésion mercredi (d’après ce que m’a déclaré aujourd’hui à midi le Ministre de Suède, Boheman).
En attendant, le Ministre de Suède a déjà fait comprendre à Londres que son pays accepterait l’invitation, en expliquant le retard de l’avis formel par le fait que des consultations des trois Etats du Nord devaient encore avoir lieu avec la Finlande, dont on comprend la position précaire.
D’autre part, le Sous-Secrétaire d’Etat aux Affaires étrangères m’a dit hier qu’il y avait des signes de la volonté de milieux tchécoslovaques et même polonais d’accepter – si possible – l’invitation anglo-française. J’ai recueilli des indices dans le même sens9.
7. Les pays et régions entourant la Suisse désirent participer aux pourparlers. Ni l’Italie (d’après ce que vient de me dire l’Ambassadeur Carandini), ni sans doute l’Autriche pourraient considérer une abstention de la Suisse comme autre chose qu’un affaiblissement de leur prise de position positive qui a été plus difficile à déterminer que la nôtre.
8. Vis-à-vis des grandes Puissances occidentales, notre position négative serait difficilement soutenable. Je me suis rendu compte combien ceci serait difficile en Angleterre10. J’ai regretté, d’ailleurs, les effets d’échos de presse – négatifs dans leur pronostic quant à la Suisse – dans des journaux de «standing» relatif, mais à grand tirage.
9. Nous avons finalement l’occasion attendue de prendre notre place sur un pied d’égalité dans une réunion qui, certainement, touchera à nos intérêts. Si nous laissons passer cette occasion, nous aurons de la peine à quitter le plan de techniciens et d’observateurs dans des affaires même non-politiques qui nous concernent directement.
10. Quelles seraient les conséquences économiques en cas de non-participation? La politique – vraisemblable selon Lord Layton – des «combined Boards» pourrait – sans notre participation – rendre plus difficile notre ravitaillement en blé, en phosphates, en charbon.
Sans nous, le «comité de coordination» ou «steering committee» pourrait, que nous l’approuvions ou non, prendre des décisions ayant une influence directe ou, en tout cas, indirecte très grande sur nos accords bilatéraux et enfin sur notre balance des paiements.
Nous avons toujours – depuis 1920 – invoqué l’argument économique à l’appui de notre participation à des organisations internationales. Parfois, cet argument a été avancé d’une manière un peu abstraite; aujourd’hui, il s’agit d’une réalité certaine.
11. Un argument qui me semble d’assez grande portée est enfin le suivant: la Suisse doit, en vertu d’un mandat implicite du peuple et des cantons, essayer tôt ou tard à faire reconnaître à nouveau, dans le monde de demain, le statut de sa neutralité perpétuelle. Nous connaissons les difficultés de réaliser ce programme dans le cadre de la Charte des Nations Unies11.
Ce ne sera, probablement, possible que sur la base de démonstrations tangibles et renouvelées des côtés positifs et actifs de notre neutralité. Une abstention dans un essai ordonné de relever l’Europe serait inscrit, je crains, pour longtemps à notre passif. Conclusion.
12. Pour des raisons multiples, une réponse affirmative à l’invitation anglofrançaise me paraît donc s’imposer.
S’il devait y avoir des scrupules, du point de vue de nos rapports futurs avec les pays de l’Est, à prendre cette décision, il serait loisible d’ajouter – peut-être d’emblée – à notre réponse une déclaration nouvelle ainsi conçue: que «vu l’absence regrettée de certains Etats européens de la prochaine conférence, la Suisse se réserve d’assurer, le moment venu, aussi à ces Etats, un concours économique correspondant aux circonstances, aux conventions en vigueur et à ses propres possibilités»12.
- 1
- Rapport politique (Copie): E 2300 London/41.↩
- 2
- Cf. le télégramme de M. Petitpierre à P. Ruegger du 22 juin 1947, E 2800(-)1990/106/10.Le même télégramme a été envoyé aux Ministres de Suisse à Washington, Paris et Moscou.↩
- 4
- Cf. la lettre commune de l’Ambassade de France et de la Légation de Grande-Bretagne du 4 juillet 1947, E 2001(E)-/1/218.↩
- 5
- Cf. l’avis de C. J. Burckhardt sur la compatibilité de la neutralité avec la participation au Plan Marshall formulé dans une lettre à M. Petitpierre du 6 juillet 1947: Natürlich muss immer an den eminent politischen Aspekt der Frage gedacht werden, grösste Aufmerksamkeit und Hellsicht wird jetzt, wie in den nächsten Jahren, im Lauf der Entwicklung dieses Vorganges von Nöten sein. Aber man muss es in jeder Weise vermeiden, von diesem politischen Aspekt zu sprechen, weil leider dadurch die international zur Diskussion stehenden Thesen zu Gunsten der einen Seite entschieden würden. Aus diesem Grunde scheint mir, empfehle es sich, nur den unserer Tradition entsprechenden Aspekte der ökonomischen Solidarität der europäischen Völker und den schweizerischen Solidaritätswillen zu erwähnen. Den Begriff der «Neutralität», von welcher der Begriff «Konflikt» untrennbar ist, sollte man in diesem Zusammenhang möglichst vermeiden. Cf. E 2801 (-)1968/84/21 (dodis.ch/5220).↩
- 6
- Cf. DDS, vol. 11, table méthodique: I. Société des Nations, 4. Conflit italo-éthiopien.↩
- 7
- Cf. DDS, vol. 10, table méthodique: I. Société des Nations, 5.1. La Suisse et le conflit sino-japonais.↩
- 8
- La conférence mentionnée a commencé le 27 juin 1947 et a duré jusqu’au 3 juillet 1947. Le texte du communiqué suisse du 27 juin 1947 est publié dans FF, 1948, vol. 100, II, p. 1116.↩
- 9
- Cf. le télégramme de la Légation de Suisse à Prague à M. Petitpierre du 7 juillet 1947, E 2001(E)-/1/218, et le télégramme de la Légation de Suisse à Varsovie à M. Petitpierre du même jour, ibid.↩
- 10
- Cf. la notice interne de la Légation de Suisse à Londres du 8 juillet 1947, E 2200.40(-)-/ 64/1: Da der schweizerischen Aussenpolitik ein feines Empfinden dafür zugeschrieben wird, wo politische Spannungsfelder sich auf wirtschaftlichem Boden entwickeln können, würde eine Ablehnung der Schweiz als Urteil aufgefasst, dass es sich bei der neuen Pariser Konferenz nicht um eine wirtschaftliche Besprechung, sondern um den Beginn einer Blockbildung handelt.↩
- 12
- Cf. la réponse de M. Petitpierre à l’invitation franco-britannique, FF, 1948, vol. 100, II, p. 1117-1118.↩
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