Également: Explications concernant certaines questions relatives au procès Conradi posées au Ministre de Suisse à Londres par une délégation du comité «Hands of Russia». Annexe de 12.2.1924
Pubblicato in
Documenti Diplomatici Svizzeri, vol. 8, doc. 311
volume linkBern 1988
Dettagli… |▼▶Collocazione
Archivio | Archivio federale svizzero, Berna | |
▼ ▶ Segnatura | CH-BAR#E2001B#1000/1504#537* | |
Vecchia segnatura | CH-BAR E 2001(B)1000/1504 21 | |
Titolo dossier | Ermordung von Worowsky in Lausanne am 10. Mai 1923, Prozess Conradi, [Akten siehe Separatschachten 21 von 1923] (1923–1927) | |
Riferimento archivio | B.56.21 |
dodis.ch/44953
Pour faire suite à ma lettre du 15 janvier2, j’ai l’honneur de vous remettre, sous ce pli, le manuscrit de l’entretien que j’ai eu, le 15 novembre dernier3, avec la députation du Comité «Hands off Russia» au sujet du procès Conradi.4 Ce compte rendu n’a pas encore été publié jusqu’ici et, d’une façon générale, aucune publication ne sera faite avant que les conversations entre le comité et la légation n’aient pris fin.
Ainsi que je vous l’avais annoncé, j’ai eu un nouvel entretien, le 17 courant, avec quelques messieurs de la délégation. Selon votre désir, je les ai priés de me formuler exactement les points sur lesquels ils désirent recevoir des explications par le Département politique.
Voici les divers points qui semblent spécialement intéresser les champions des Soviets.
1. Le Gouvernement suisse, lui-même, n’est-il pas responsable de l’attitude prise par le Procureur général dans son acte d’accusation et n’est-il pas dû à son influence que le procès ait été mené dans l’esprit où il l’a été?
2. Si, conformément à la législation actuelle, le procès ne peut pas être révisé, ne serait-il pas du devoir du Gouvernement suisse de faire voter une mesure spéciale pour rendre cette révision possible. Le Conseil fédéral ne devrait-il pas, tout au moins, élaborer immédiatement une loi permettant une juridiction équitable dans de pareils cas?
3. Le Gouvernement suisse ne s’est-il pas chargé par cet assassinat et par le résultat du procès d’une responsabilité spéciale, comme il s’agissait en l’espèce du représentant d’une Puissance étrangère?
4. Si, ainsi que M. Paravicini le prétend, le gouvernement fédéral n’a rien à voir en tout ce qui concerne le procès, n’y a-t-il pas lieu de rendre responsable de l’acte d’accusation et de la conduite du procès le Gouvernement du Canton de Vaud?
Je retiens de la conversation que j’ai eue avec ces messieurs les points suivants, en omettant les réponses que j’ai faites à leurs arguments, étant donné que cellesci sont faciles à reconstruire.
1. L’opinion générale en Grande-Bretagne non seulement dans les milieux du parti ouvrier et des ouvriers eux-mêmes, est que la première des questions ci-dessus est à répondre affirmativement et que, dès le début, il y a eu des manœuvres pour arriver à l’acquittement, si le Gouvernement suisse n’est pas responsable, comment se fait-il qu’il n’ait pas fait réviser le procès; en Angleterre cela se ferait immédiatement par un acte spécial du parlement. Il est relevé qu’en Angleterre un procès de la nature de celui de Lausanne aurait été mis d’emblée, et par autorité du parlement, devant une cour spéciale appelée à juger l’affaire; pour quelle raison le Conseil fédéral n’a-t-il pas adopté une mesure analogue en Suisse?
2. Evidemment, le Gouvernement suisse n’a rien fait pour montrer sa désapprobation vis-à-vis de l’attitude du Procureur général. Il n’a fait aucunes représentations au gouvernement du Canton de Vaud. En Angleterre, un pareil Procureur général serait révoqué et probablement mis en état d’accusation.
3. L’attitude du Procureur général n’est explicable que par le fait qu’il s’était assuré, soit expressément, soit moralement, l’appui du Gouvernement fédéral ou tout au moins celui du Gouvernement vaudois.
4. Les comités des branches locales des Unions ouvrières ont discuté cette affaire et ont remis à leur comité central des résolutions. Les leaders de ces branches ont été informés que le comité est en pourparlers avec le Ministre de Suisse; il est toutefois entendu que ces pourparlers gardent, pour le moment, un caractère confidentiel.
5. Quand les socialistes seront au pouvoir en Angleterre, la Russie des Soviets sera reconnue et les efforts nécessaires seront faits pour la faire entrer dans la Ligue des Nations. Si le Gouvernement suisse est responsable de l’acte d’accusation et de la conduite du procès, les représentants russes, après le jugement Vorowski, se sentant nécessairement sans protection en Suisse, n’iront pas à Genève. Ceci nécessiterait le transfert du siège de la Ligue des Nations dans un autre pays.
6. Le procès Vorowski sera discuté par la prochaine conférence annuelle des Unions ouvrières. S’il devait être impossible de prouver la non-responsabilité du Gouvernement fédéral, des résolutions seront présentées dans l’intention d’exercer une pression pour le transfert du siège de la Ligue des Nations. Il est déclaré qu’une pression analogue dans une affaire entre le Japon et la Russie des Soviets a eu, il y a deux ans, un succès complet (??).
7. L’affaire Yorowski fera également l’objet de discussions dans le cabinet dès l’entrée au pouvoir du parti socialiste.
Il me semble qu’il doit être possible de faire parvenir à mes interlocuteurs une réponse à leurs questions mettant les choses suffisamment au point. Puisque, selon toute probabilité, le parti ouvrier sera au pouvoir mardi prochain, il me paraît indiqué de remettre au comité «Hands off Russia» votre réponse dans le plus bref délai possible. Je ne crois pas qu’il s’attende à un exposé très circonstancié, car il ne faut pas oublier que toute cette démarche n’est au fond qu’une entreprise de réclame imaginée par l’élément extrémiste du parti socialiste.5 Mais, comme nous n’avons absolument rien à cacher dans cette affaire, il vaut, d’après moi, beaucoup mieux donner les renseignements demandés et ne pas causer l’impression du contraire, impression dont on pourrait se servir comme argument contre nous. A propos de la protection des représentants des Etats étrangers, il y aurait peut-être lieu de mentionner la conduite de la Mission bolchevique en Suisse en 19186 et le discours bien connu de Berzine à Moscou, dans lequel il a avoué ouvertement avoir manqué à sa parole d’honneur; on pourrait également rappeler le traitement infligé à notre personel diplomatique à Pétrograde en 1918 et 1919 et les vols à la Légation.7
On me dit, en effet, de source indépendante, qu’il y a un dossier fort volumineux concernant le procès Vorowski, documentation prête à recevoir l’attention du Gouvernement socialiste. Dans ces conditions, on peut se demander s’il n’est pas opportun de tâcher de venir à bout de cette affaire dans le plus bref délai possible.
P.S. On n’a pas reparlé du procès de Tatiana Leontieff8, de sorte que ce détail peut, pour le moment, être laissé de côté.s
- 1
- Lettre (Urgent): E 2001 (B) 4/21. Affaire Conradi.↩
- 2
- Non reproduite.↩
- 3
- Non reproduit. Ce procès-verbal de la réunion entre le Ministre de Suisse et son attaché juridique d’une part et quatre membres du comité mentionné comprend 19pages, cf. E 2001 (B) 4/21.↩
- 4
- Le 16 novembre 1923, Moritz Conradi, assassin de V. Vorovsky, fut acquitté par le jury du tribunal de Lausanne.↩
- 5
- Note marginale de P. Dinichert: Donc ne pas se laisser émouvoir.↩
- 6
- Cf. DDS 7/1 no 1.↩
- 7
- CFDDS 7/1 ri, s 26 et 154.↩
- 8
- Anarchiste russe arrêtée (1906) et jugée (1907) pour assassinat. Cf. DDS 5, no 213.↩
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Russia (Altro)
Affare Conradi (1923)