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L’Observateur de la Suisse auprès des Nations Unies à New York, B. Turrettini, au Secrétaire général du Département politique, P. Micheli1

J’ai lu avec un grand intérêt la notice que vous avez envoyée à certains postes après le voyage à Vienne du Chef du Département2.

Un hasard de circonstances a voulu que je rencontre avant-hier, au cours d’un déjeuner chez mon collègue autrichien3, le Vice-Chancelier Bock qui avait manifesté une certaine mauvaise humeur à notre égard lors des entretiens de Vienne. Il était accompagné par l’ambassadeur Treu, qui connaît très bien Genève.

Le Ministre du Commerce autrichien et son collaborateur furent particulièrement aimables avec moi et s’exprimèrent extrêmement librement. Ils ne me cachèrent pas qu’un certain malaise était apparu lors de la visite du Chef du Département du fait, dirent-ils, des paroles trop directes qu’il aurait prononcées devant la presse au sujet de la neutralité autrichienne4 à propos du Marché commun et de la question qui touche au siège de Vienne en tant que ville internationale5. Cela aurait, toujours selon mes interlocuteurs, mis leur Gouvernement dans une position quelque peu délicate6, car bien que le point de vue suisse soit en général compris dans les milieux gouvernementaux, le fait de l’avoir relevé publiquement et surtout d’y avoir inclus certaines critiques à l’égard de la manière dont procédaient les Autrichiens, aurait contrarié leurs dirigeants.

L’Ambassadeur Treu ajouta que déjà lors d’une récente réunion des ministres de l’AELE à Stockholm, le Conseiller fédéral Schaffner aurait attaqué violemment la position autrichienne en présence des autres ministres des pays de l’AELE7. Le coup fut accusé; cependant, comme ces remarques avaient été faites dans le cadre d’une session des ministres, on pensa qu’on en resterait là. Aussi, lorsque le Chef du Département politique reprit d’une manière que les Autrichiens auraient trouvée trop catégorique ce même genre de critiques, cela causa un sentiment de réprobation. Après ces explications fort franches, il ne manqua pas de déclarer qu’il espérait que d’ici quelque temps tout serait oublié, mais que cela avait tout de même laissé certaines traces.

Ces remarques, dont je laisse naturellement la responsabilité à mes interlocuteurs, semblent refléter, d’après ce qu’a rapporté la Nouvelle Gazette de Zurich, les commentaires faits par la presse autrichienne8 après cette visite. Sans vouloir y attacher trop d’importance, elles me paraissent révélatrices d’un certain état d’esprit des dirigeants autrichiens, aussi je pense qu’il vous intéressera d’en prendre connaissance à titre purement personnel.