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Le Chef du Département des finances et des douanes, J. Bourgknecht, au Chef du Département politique, F. T. Wahlen1

J’ai pris connaissance de la lettre que la Section des Organisations internationales de votre département a adressée, le 15 décembre 1961, à l’Administration fédérale des finances2 au sujet d’un emprunt éventuel que l’Organisation des Nations Unies se proposerait de contracter en Suisse3. Bien que votre département estime que la question serait encore prématurée et qu’il n’y a pas lieu, pour le moment, de prendre position sur une participation de la Suisse à un tel emprunt, je crois de mon devoir d’éviter que mon silence ne puisse conduire à un malentendu.

Je considère que notre pays n’a pas à prêter de l’argent à une organisation internationale dont il n’est pas membre et qui semble être acculée à la faillite parce que ses membres refusent d’acquitter leurs contributions statutaires. S’il y a un emprunt qui ne pourra jamais nous être remboursé, c’est bien celui-là. Nous n’avons pas à prêter de l’argent, me semble-t-il, aux assassins du peuple katangais. Que les Etats-Unis, qui convoitent les trésors de l’Union minière, se chargent de financer les lamentables opérations militaires et agressives de l’ONU, mais surtout qu’on ne s’adresse pas à un Etat neutre. En ce qui me concerne, j’estime qu’il est de mon devoir de ne pas taire mon sentiment et de déclarer, avec netteté et dès maintenant, que je combattrai, par tous les moyens, cette demande d’emprunt. Il serait peut-être bon que ceux, qui ont avec cette triste organisation dont nous devons nous honorer de ne pas faire partie, quelque contact en notre nom, adoptent dès maintenant une attitude très réservée qui lui ôte l’envie de poser le problème et de nous contraindre à un refus. L’ONU ne devrait pas pouvoir déduire d’une attitude bienveillante et réservée à l’excès que nous sommes prêts à examiner avec bienveillance ou compréhension sa demande. Pas d’argent suisse pour les assassins de pauvres nègres sans défense!