Printed in
Diplomatic Documents of Switzerland, vol. 20, doc. 9
volume linkZürich/Locarno/Genève 2004
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Archive | Swiss Federal Archives, Bern | |
▼ ▶ Archival classification | CH-BAR#E2001E#1970/217#3397* | |
Old classification | CH-BAR E 2001(E)1970/217 176 | |
Dossier title | Société Anonyme Suisse d'Exploitations Agricoles, Genève (1955–1957) | |
File reference archive | B.34.77.0 • Additional component: Italien |
dodis.ch/12818 Le Président de la Société anonyme suisse d’exploitations agricoles, A. van Berchem, au Président du Conseil d’Administration de la Société de Banque Suisse, R. Speich1
Nous nous permettons de nous adresser à vous en nous référant à la lettre que nous avons envoyée à votre Direction générale, le 2 novembre 19542.
Ainsi que nous le disions dans cette lettre, notre société, propriétaire de domaines agricoles en Italie depuis 1893, s’est vue exproprier récemment de la plus grande partie de ses terres, malgré les améliorations considérables qu’elle y a apportées et dont l’Italie a bénéficié dans une très large mesure. En outre, l’indemnité de 274 millions de lires qui lui est offerte ne représente que le quart environ de la valeur des terrains expropriés, laquelle atteint ou dépasse même le milliard, ainsi qu’il résulte non seulement d’une expertise que nous avons demandée, mais également de l’estimation fiscale sur la base de laquelle notre société vient d’être imposée.
Jusqu’à une date très récente, les nombreuses démarches entreprises par notre Légation de Rome, pour que nous obtenions l’indemnité équitable à laquelle les principes du droit international nous permettent de prétendre, se sont heurtées à une mauvaise volonté évidente. Depuis quelques semaines, en revanche, les autorités italiennes se montrent mieux disposées et elles ont suggéré elles-mêmes d’entamer des négociations sur ce sujet au début de juin avec une délégation du Département politique3.
Les raisons de cette volte-face sont évidentes: l’Italie a besoin de capitaux étrangers, notamment dans le cadre du Plan Vanoni et nos autorités lui ont fait comprendre très fermement que la Confédération se refuserait à tout octroi de crédit tant qu’un certain nombre de problèmes, dont celui qui nous occupe, ne seraient pas réglés.
Or, nous apprenons que deux groupes italiens, l’IstitutoMobiliare Italiano et la Société Pirelli, sont en train de négocier des emprunts privés en Suisse. L’avis absolument formel, tant des personnalités italiennes qui nous conseillent et nous appuient de leur autorité, que des représentants du Département politique fédéral, est que la conclusion de pareils emprunts, à la veille des conversations qui vont s’ouvrir, risquerait d’affaiblir la position de nos négociateurs et de diminuer leurs chances de succès: voyant qu’elles sont à même de s’adresser en Suisse aux capitaux privés, les autorités italiennes ne marqueraient plus aucun empressement à satisfaire nos légitimes demandes.
S’il s’agissait de vous demander le renvoi à une période ultérieure indéterminée de tout prêt à des groupes italiens, nous ne nous permettrions pas de recourir à vous. Cependant, vu l’imminence des négociations, nous pensons qu’il suffirait que nos grands établissements marquent le désir de reporter la conclusion de ces emprunts à une période plus favorable. Les groupes italiens intéressés ne manqueront pas alors de prévenir leurs autorités des obstacles qu’ils rencontrent et l’on peut espérer que la conclusion d’un accord en sera facilitée et accélérée.
Nous sommes persuadés qu’en agissant de la sorte les grandes banques rendront un service signalé non seulement aux nombreux actionnaires de notre Société, mais également à tous les créanciers de l’Italie, y compris les futurs porteurs des obligations des nouveaux emprunts. Il importe, en effet, que les autorités italiennes, qui attachent un grand prix à la collaboration financière de la Suisse pour leur programme d’expansion, soient persuadées que notre pays – qu’il s’agisse de ses autorités ou des organismes privés – exige de ses débiteurs le respect inconditionnel des normes du droit des gens. Si elles peuvent bafouer ces règles au détriment de nos compatriotes et simultanément obtenir notre appui financier, cela créera un précédent extrêmement fâcheux pour l’avenir de nos relations avec l’Italie. Si, au contraire, nos concitoyens s’affirment solidaires dans une circonstance de ce genre, les rapports financiers de nos deux pays pourront se développer ensuite dans une atmosphère de confiance et de respect mutuel.
- 1
- Lettre (Copie): E 2001(E)1970/217/176.↩
- 2
- Cf. la lettre de A. van Berchem à la direction générale de la Société de Banque Suisse du 2 novembre 1954, E 2001(E)1969/121/131.↩
- 3
- Les négociations en question auront bien lieu. Sur leurs résultats, cf. la note 4 du DDS, vol. 20, doc. 69.↩